Depuis plus de quatre ans, le Mali vit sous le régime de la transition, une période censée marquer le retour à l’ordre constitutionnel après le coup d’État de 2021. Cependant, au fil du temps, cette transition semble s’éloigner des objectifs initiaux, alimentant un sentiment croissant de confusion et d’inquiétude au sein de la population et des acteurs politiques. Les récentes déclarations du ministre délégué, Mamani Nassiré, mettent en lumière les obstacles techniques et institutionnels qui continuent d’entraver la tenue d’élections transparentes et apaisées, pourtant au cœur des engagements du gouvernement de la transition.
Bamada.net-Lors d’un atelier d’information organisé le 30 janvier dernier à la Maison de la presse, Mamani Nassiré a révélé une réalité inquiétante : le Mali ne dispose ni d’un fichier électoral conforme à la réorganisation territoriale, ni d’une loi électorale fonctionnelle pour organiser des élections. Ces déclarations viennent confirmer un constat qui commence à se faire jour : malgré les promesses, le retour à l’ordre constitutionnel semble s’éloigner de plus en plus. Une nouvelle remise en cause de la transition se dessine, particulièrement à un moment où le gouvernement est confronté à une pression croissante pour fixer un calendrier précis pour la reprise du processus électoral.
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Il est surprenant de constater que, malgré l’adoption de la loi électorale en 2022, son application reste inexistante. Le ministre Mamani Nassiré a même précisé que le gouvernement n’avait pas encore de cadre juridique adéquat pour la mise en place d’élections, ce qui jette un doute sérieux sur la volonté réelle de mettre en œuvre les réformes nécessaires. Ce vide juridique, couplé à l’incertitude autour du fichier électoral, soulève des interrogations sur la transparence et la fiabilité des futures élections. En outre, les données du RAVEC, récupérées depuis février 2024 après une longue période de blocage, ne sont toujours pas exploitées de manière efficace pour établir un fichier fiable et à jour.
Ce paradoxe se retrouve également dans les annonces du président de la Transition, le Général Assimi Goïta. Lors de la présentation des vœux des présidents des institutions de la République, il a réaffirmé son engagement envers un retour à l’ordre constitutionnel, soulignant que la condition sine qua non de son effectivité était un processus électoral “sécurisé et apaisé”. Mais force est de constater que, malgré cette déclaration, les conditions minimales pour la tenue d’élections, notamment la loi électorale et un fichier électoral conforme, ne sont toujours pas réunies. Ce décalage entre les discours et la réalité sur le terrain nourrit un climat de scepticisme et d’incertitude quant à la suite de la transition.
La question fondamentale que l’on peut se poser aujourd’hui est celle de savoir si la transition, telle qu’elle se présente, est toujours en phase avec son objectif principal : organiser des élections libres, transparentes et apaisées. Après quatre ans de transition, il semble que l’on soit encore loin de la stabilité institutionnelle et politique nécessaire pour garantir des élections crédibles. Le report continu de l’ordre constitutionnel et les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre des réformes essentielles posent la question de l’efficacité réelle de ce processus.
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Il est impératif que les autorités de la transition prennent des mesures concrètes pour surmonter ces obstacles. La mise en place d’un fichier électoral fiable, la réactivation de la loi électorale et la mise en œuvre effective des réformes institutionnelles et administratives sont des préalables incontournables pour un retour à l’ordre constitutionnel. En outre, il est crucial que le gouvernement et les partis politiques établissent un dialogue plus constructif pour définir clairement les étapes à suivre et apaiser les tensions qui risquent de compromettre la crédibilité des futures élections.
Le Mali se trouve à un carrefour. La transition, loin d’être un passage vers une démocratie stable, risque de s’éterniser si des décisions claires et fermes ne sont pas prises rapidement. Ce n’est qu’en réunissant toutes les conditions nécessaires pour organiser des élections transparentes, inclusives et sécurisées que le pays pourra envisager un avenir politique stable et démocratique. Le temps presse, et il appartient aux autorités de prendre les mesures nécessaires pour ne pas laisser l’histoire du Mali se répéter sous forme d’un éternel recommencement.
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Fatoumata Bintou Y
Source: Bamada.net