Le gouvernement burkinabé a rompu, depuis le jeudi 24 mai 2018, ses relations diplomatiques avec Taïwan. Des raisons purement économiques fondent cette décision.
Le Burkina Faso était jusque-là avec le Swaziland, les deux seuls pays africains à entretenir des relations diplomatiques avec Taïwan, anciennement appelée Formose ou la Chine nationaliste. La grande offensive diplomatique que mène Pékin, à coups de milliards de dollars d’investissements en Afrique, depuis une dizaine d’années, a fini par séduire Ouagadougou, qui a décidé depuis hier de mettre fin à ses relations diplomatiques avec la Chine insulaire. C’est depuis 1994 que le Burkina Faso, sous la présidence de Blaise Compaoré, a établi les relations avec Taïwan. A l’époque, il fallait choisir entre l’une ou l’autre des deux Chine. Le choix de l’un des deux pays frères ennemis entraînait de facto le rejet de l’autre.
Le dirigeant burkinabé avait pris ses responsabilités, en choisissant la République de Chine. En guise de récompense, Taïwan donnait sans compter, tant en infrastructures qu’en matériels, à son partenaire. Le palais de Kosyam, l’imposant siège de la présidence du Faso, est un don de Taïwan. Depuis les attaques terroristes contre le Burkina, Taipei s’est également montré très généreux, en offrant en 2017 deux hélicoptères d’une valeur de 4 milliards de Fcfa. Le 27 mars 2018, trois semaines après les attaques terroristes du 2 mars contre l’ambassade de France et l’État-major de l’armée dans la capitale burkinabé, le vice-ministre des Affaires étrangères taïwanais, Jose Maria Liu, avait déclaré, au sortir d’un entretien avec le président Roch Marc Christian Kaboré, que son pays allait offrir trois autres hélicoptères et 50 véhicules militaires à l’armée burkinabé, pour lui permettre de lutter contre le terrorisme. Au moment où Ouagadougou met fin à ses relations avec Taipei, l’île chinoise a 26 projets en cours d’exécution au Burkina.
En emboîtant à son tour le pas aux autres pays africains qui ont abandonné Taïwan, à savoir le Malawi (2008), la Gambie (2013) et Sao Tome et principe (2016), le ”Pays des hommes intègre” a fait preuve tout simplement de realpolitik. En effet, le 15 mai 2018, à Abidjan, à l’ouverture d’un colloque sur le thème « Approfondir le financement et l’investissement dans la coopération Chine-Afrique », l’ambassadeur de Chine en Côte d’Ivoire, Tang Webin, a rappelé qu’en décembre 2015, lors du Forum sur la coopération sino-africaine à Johannesburg, le gouvernement chinois avait annoncé 30 mille milliards de Fcfa d’investissement en Afrique pour la période 2015-2018, dont 2.500 milliards de Fcfa de dons et prêts sans intérêts, 17.500 milliards de Fcfa de prêts concessionnels et 10 mille milliards de Fcfa pour alimenter différents fonds. C’est donc une opération de charme que Pékin mène sur le continent, en mettant la barre des investissements si haut. En annonçant hier la décision, le chef de la diplomatie burkinabé, Alpha Barry, n’a fait aucun mystère sur les raisons qui fondent cette rupture avec la Chine nationaliste : « Cette décision est guidée par la ferme volonté du gouvernement de défendre les intérêts du Burkina Faso et de son peuple et de nouer le meilleur partenariat afin de consolider le développement socio-économique de notre pays…». Il est donc clair qu’entre les deux Chine, le Burkina a cédé à l’offre de la plus généreuse.
Taïwan : Un pays peu connu en Afrique
Taïwan, officiellement la République de Chine, est un État souverain d’Asie de l’Est d’une superficie de 36.191 km2, dont le territoire s’étend actuellement sur l’île de Taïwan, ainsi que d’autres îles avoisinantes. Sa population est de 23,5 millions d’habitants. Le PIB par habitant en 2013 est de 10,4 millions de Fcfa. Taïwan fut officiellement gouverné par la Chine de 1683 à 1895, puis cédé au Japon, par le traité de Shimonoseki (1895), à la suite de la première guerre sino-japonaise. Ce dernier entreprend le développement de Taïwan, la dotant d’infrastructures importantes. En 1945, à la suite de la défaite japonaise à l’issue de la Seconde Guerre mondiale, la République de Chine recouvre Taïwan. En 1949, le gouvernement de la République contrôlé par le Kuomintang s’y installe, après avoir perdu la guerre civile contre les communistes. Cette installation est accompagnée d’un transfert massif de populations. À partir de 1950, après avoir perdu Hainan, la République de Chine ne contrôle plus que l’île de Taïwan et quelques autres territoires insulaires plus petits. La république de Chine occupait le siège de la Chine à l’ONU jusqu’en 1971, date à laquelle la République populaire de Chine la remplaça.
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