Un nouveau rendez-vous manqué avec l’histoire, une comédie dantesque, ce ‘’dialogue politique inclusif’’ truffé ambiguïtés est un fiasco annoncé. Et ce ne sont pas que des Maliens ‘’aigris’’ qui en ont fait l’amer constat. Qu’y a-t-il derrière ce grand numéro de bluff ? Plongée dans au cœur de manœuvres secrètes déloyales.
Après un départ fulgurant vers la réforme intentionnelle, ‘’priorité la plus pressante’’, en ce début d’année 2019, les vieux démons du vol à vue effectuent un retour fracassant. Ainsi, à cette observation du confrère Jeune Afrique, au cours d’une interview accordée en juin dernier, ‘’sept ans pour une législature, c’est plus qu’un simple glissement’’, le Président IBK rugit : ‘’on ne peut pas vouloir une chose et son contraire. Beaucoup de Maliens, ainsi que de nos partenaires étrangers, insistent pour que se tienne un dialogue national inclusif et qu’il soit prioritaire par rapport aux législatives. En termes de chronogramme, faire les deux à la même période, c’est mission impossible’’.
Étrange, cette hiérarchie des valeurs, puisque dans une lettre en date du 6 août 2019, adressée au Président du Conseil de sécurité, le Groupe d’experts créé en application de la résolution 2374 (2017) du Conseil de sécurité sur le Mali euphémisme : ‘’ayant décidé d’ouvrir un dialogue politique sans exclusive le but en étant de dégager des solutions consensuelles aux crises institutionnelle et sécuritaire, le nouveau gouvernement n’a cependant confié de portefeuille ministériel à aucun membre des groupes armés signataires. L’Accord étant largement dénoncé par la population, il reste à savoir si ce dialogue suscitera l’adhésion politique nécessaire ‘’.
Ce rapport jette une lumière crue sur une des arnaques politiques des plus grossières et des plus grotesques de ce siècle. Les dés étaient pipés et ils le sont encore. La preuve, au-delà de cette conclusion assez édifiante du Groupe d’experts !
Un- Le ‘’dialogue national inclusif’’ annoncé, en juin, par le garant de l’unité nationale, de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire, du respect des traités et accords internationaux, s’est mué en l’espace d’un mois, en juillet, on ne sait par quelle opération du Saint Esprit, en ‘’dialogue politique inclusif’’. Il ne s’agit pas d’un détail, mais d’une différence essentielle de formulation visant à édulcorer l’esprit et la lettre du dialogue proposé par des adversaires politiques devenus grands messieurs pour la cause nationale.
Deux- ‘’Le dialogue national inclusif’’ est une émanation du Chef de file de l’Opposition, alors que le Président des FARE An Ka Wuli prône un ‘’dialogue national refondateur’’. À César, ce qui est à César à Dieu ce qui est à Dieu.
Par contre le ‘’dialogue politique inclusif’’ est voulu par le chef de l’État.
Certes, quelques-uns y trouvent leur compte, avec un cynisme inversement proportionnel à leur civisme. Mais pour tous les autres, c’est un bien mauvais service qui est rendu au pays. Obligé de se résoudre au scénario d’un dialogue national, le Gouvernement a cédé en retournant la situation à son avantage, à travers un habile ripolinage, une inversion de l’échelle des valeurs. Et pour cause ! La frustration populaire a été exacerbée par un premier report des élections législatives conduisant deux importants regroupements politiques à communiquer le 4 décembre 2018 : ‘’tout en rendant hommage aux députés qui, pendant les cinq années écoulées, se sont opposés aux politiques néfastes du régime par des motions de censure, des interpellations, des votes contre les lois des finances, la CoFoP et le FSD se démarquent clairement et nettement de l’adoption de la loi organique portant prorogation du mandat des députés, car elle viole la constitution du 25 février 1992’’.
C’est la preuve que ‘’beaucoup de Maliens’’ ne partagent pas la même hiérarchie des valeurs, que le ‘’dialogue politique’’ quelles que soient ses déclinaisons, ne prime pas sur le respect du mandat légal des députés.
Trois-Placer le dialogue inclusif au sommet de la hiérarchie des valeurs, est un passage en force, une camisole de force qu’on veut faire porter aux Maliens.
Toutes proportions gardées, il y a eu les élections municipales de 2016 et la présidentielle de 2018, dans un environnement sécuritaire aussi instable que volatile que celui que nous connaissons en ce moment. L’alibi de l’insécurité est donc irrecevable. Alors, le dialogue politique inclusif, à la sauce IBK paraît et s’impose en tête des priorités absolues du Mali. Ce, quand bien même personne ne peut gager qu’il ‘’suscitera l’adhésion politique nécessaire’’.
Quatre- Il y a un changement de l’ordre hiérarchique qui est aussi spectaculaire que douteux. L’année 2019 a débuté sur les chapeaux de roue d’une réforme constitutionnelle. Un Comité d’experts a été mis en place. Et patatras ! Voilà le projet de réforme par terre ; en tout cas, il est mis en veilleuse au profit du dialogue qui n’avait pourtant reçu aucune oreille attentive du côté du pouvoir depuis au moins 2014. En termes de ‘’chronogramme’’, il y a un grave problème. La méthode, n’en parlons pas. A priori, c’est le genre de comportement qui traduit par excellence le manque de vision, de projet. Mais, au fond, il semble y avoir une logique de récupération politicienne d’une demande légitime des Maliens (qui n’établissent pourtant pas d’échelle de valeurs) de se trouver autour du grand malade qu’est le Mali.
En fait, ce régime alterne les contradictions abyssales et les mensonges horrifiques. Il finit par s’enfermer dans une dynamique irrationnelle pour l’opinion malienne dans sa plus grande expression.
Ce dialogue, dans sa conception, est le moyen par excellence d’enfumer les Maliens. Une entourloupe de haut vol. Une fois encore. Hélas ! On a vu la Conférence d’entente nationale qui s’est terminée en eau de boudin. Un pire sort attend ce dialogue qui n’est rien moins qu’une mise en scène. Le Gouvernement, intentionnellement, a transformé cet or massif réconciliateur, pacificateur et générateur d’espoir d’un Mali nouveau, en plomb politique, institutionnel, social… L’espoir est confisqué par ceux qui, au réalisme, à l’urgence de relever le pays, préfèrent le grotesque pour mieux (re) vendre leurs obsessions de pouvoir.
PAR BERTIN DAKOUO