Le 20 mai dernier, Moussa Oumar Diawara, dissident du CNID, ancien parlementaire, membre de la coalition politique APR, chef de formation politique, était dans « les mailles de la justice du grand jury », face à Oumar B. Sidibé, Bruno Sebgedji, Directeur de publication de l’hebdo Mali–Horizon, Badou S. Koba, directeur de publication de l’hebdo Le Triomphe. Au cœur du débat, la démocratie, la levée de bouclier contre le PM Choguel Kokalla Maïga.
A écouter Moussa Oumar Diawara, il faut qu’on sorte du populisme et de la démagogie devenus monnaie courante. Pour lui, le Mali est en train de perdre la face vis-à-vis du monde. Aussi, le PM Choguel Kokalla Maïga doit-il partir, à son avis. Visiblement francophile, il a posé la question de savoir le nombre de Maliens travaillant dans les entreprises de la Fédération de Russie. En revanche, il a cité la réussite de Malamine Koné, fondateur de la célèbre marque Airness, en France.
Ce débat nous a rappelé l’évidence que le citoyen lambda martèle à tout bout de champ le vocable démocratie, se focalisant sur sa définition, à travers le prisme occidental et occultant notre socle culturel. Mais il ne prend nullement en compte les besoins réels de la communauté ni les moyens de les satisfaire.
Théoriquement, on a fait l’apologie de la démocratie. Nos donneurs de leçon de l’hexagone ont eu recours à sa posologie contre la dictature. Cela s’est soldé par une déconvenue dans les différents secteurs socio-économiques, d’où l’avalanche des coups de force.
Il semble que les pourfendeurs de la transition politique du Mali soient atteints d’amnésie. Présidé par François Mitterrand, le Sommet de la Baule de 1990 a exigé des ex-colonies françaises l’avènement de l’ère démocratique, avec le multipartisme en toile de fond. L’aide budgétaire accordée à ces pays francophones y était conditionnée. Voilà une démocratie taillée sur mesure, une camisole de force acceptée à notre corps défendant.
Les 30 ans d’expérimentation démocratique ont été un fiasco sur toute la ligne. Au lieu de la démocratie, nous avons plutôt bénéficié de la fiction démocratique, qui n’est pas féconde en progrès. Sa stérilité est irréversible et les élections qui en découlent sont toujours une tragédie.
En tout état de cause, l’arrivée des « putschistes » a permis à beaucoup de comprendre les coulisses de nos relations tumultueuses avec la France, via la Françafrique. Les faits sont sans équivoque : renvoi de l’ambassadeur de France du Mali, fin de l’opération Barkhane et Takuba, de l’espace aérien malien aux avions militaires français, retrait du Mali du G5 Sahel et de sa force conjointe, restriction des mouvements de la MINUSMA.
A notre sens, en cette période de crise sécuritaire, d’embargo imposé par la CEDEAO, de gel des avoirs financiers du Mali à la BCEAO, l’heure a plutôt sonné pour une union sacrée autour de la Transition, de la part de tous les fils du pays.
Révolution silencieuse
Néanmoins, l’invité a salué la montée en puissance de la grande muette grâce à ses conquêtes territoriales. A nos yeux, il n’est pas au parfum de la révolution silencieuse dans différents secteurs : grâce à la réduction de son train de vie, l’Etat a enregistré plus de 100 milliards d’économie en 2021, a révélé le ministre de l’Economie et des Finances, Alhousséni Sanou, lors de l’émission Mali kura taasira. Ces ressources obtenues ont été affectées à la défense, la réhabilitation des écoles, l’entretien routier, le relèvement du plateau technique, l’assainissement, le sport et les dépenses sociales.
Les détracteurs de la transition mettent en exergue la flambée du prix des denrées alimentaires. Pour eux, les gens ont tout perdu à cause de cet embargo et pour quel résultat ? Plus grave, ils pensent que nous sommes dans un pouvoir de fait et de surcroît non démocratique. Aller à des élections transparentes le plus vite possible, tel est leur désir.
Quid de la lutte contre la corruption ? Sur plus de 126 milliards détournés, plus de 4 milliards ont été versés au Trésor public à titre de remboursement. Les cautions versées pour la remise en liberté de prévenus et autres sont de l’ordre de 15 milliards 372millions 827mille 410 FCFA, rien que pour la session d’assises de décembre 2021, aux dires du ministre de la Justice, Mahamoudou Kassogué.
Par ailleurs, la construction du plus grand hôpital militaire est en voie d’achèvement à Banankoro. Dans la même veine des réalisations, l’Ecole de Guerre du Mali, créée sous la Transition, a accueilli sa première promotion d’officiers en formation durant l’année académique en cours.
Dans le Mali Kura taasira du 21 mai dernier, le ministre de l’Industrie et du Commerce, Mahamoud Ould Mohamed, a éclairé la lanterne des journalistes. De juin 2021 à mai 2022, le gouvernement de la Transition a créé 15. 111 entreprises pérennes, a-t-il révélé.
Au plan humanitaire, les acquis sont notables. En témoignent les centaines de milliers de réalisations hydrauliques, comme ces forages équipés de châteaux d’eau à travers le pays. Tout cela sur le fonds de souveraineté de la présidence.
Par devoir de rédévabilité, depuis une semaine, chaque ministre, selon son domaine, est sous les feux croisés des questions des journalistes de l’ORTM et du privé, sur le petit écran, en synchronisation avec la radio du même nom. Cela est une forme d’exercice de la démocratie, même étant en régime d’exception.
Maliens de tous bords, en cette période de crise aigüe pour la nation, serrons-nous les coudes, tout en sachant raison garder.
Mohamed Koné, Correspondant à Kadiolo
Source : Le Challenger