Jeudi, au sortir de son sommet d’Abuja, la CEDEAO (Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest) a encore surpris tout le monde et donné raison à ses détracteurs. Cela, lorsqu’elle a annoncé l’activation immédiate de sa force d’intervention pour extirper l’ancien président nigérien, Muhammed Bazoum des mains du CNSP, en vue de le rétablir dans ses fonctions. A part eux-mêmes (quelques Chefs d’Etat) cette annonce n’a pas été du goût du grand nombre de l’opinion publique, des observateurs et dirigeants de la sous-région ainsi que du Parlement même de ladite organisation communautaire. Encore une fois, la CEDEAO vient de se ridiculiser à cause de ses menaces inutiles et chimériques.
Après le coup d’Etat du 26 juillet au Niger, toutes les attentions étaient braquées sur ce qui va être la conduite à tenir de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao). Ce, pour savoir si les Chefs d’Etat de cette organisation sous régionale vont mesurer les enjeux et les risques que de telle situation pouvait engendrer en cas de mauvais diagnostic de leur part. A savoir, s’ils vont cette fois-ci privilégier la raison par rapport à l’émotion. Malheureusement encore une fois, ces dirigeants qui assurent les destinées de cette organisation ont réédité et aggravé leurs erreurs des cas précédents en privilégiant le bâton à la carotte, sans comprendre que le contexte actuel de la sous-région ne sied plus à de telles postures. Ainsi, la mort dans l’âme de voir un des leurs (celui qui prétendait être le grand défenseur des intérêts français en Afrique de l’ouest) tomber de son piédestal, ils ont à la hâte brandi la menace d’intervention militaire le 30 juillet. Et sans manquer de lancer un ultimatum de sept jours aux protagonistes du CNSP pour remettre Bazoum à sa place.
Une décision qui n’a produit autre que son effet contraire. Elle a permis de donner une soudaine popularité aux militaires et susciter la solidarité des pays voisins, notamment le Burkina Faso et le Mali en faveur du Niger. De même que la classe politique nigérienne dans sa majorité.
Auréolés de cette popularité, les actuels hommes forts de Niamey ont même répondu par un pied de nez à la visite d’une délégation des émissaires de la CEDEAO envoyés pour être reçus par les autorités nigériennes.
De l’autre côté, sans tirer les conséquences de leur annonce de va-t’en guerre, les Chefs d’Etat de la Cedeao ont convoqué un autre sommet à Abuja, le jeudi 10 août, toujours sur la situation au Niger. Comme d’habitude celui-ci aussi fut sanctionné par des mesures graves à l’encontre du Niger et la réaffirmation dans un délai immédiat d’une intervention militaire, en cas d’échec de la voie diplomatique.
Pour enfoncer le clou, le rôle dévolu à cet effet aux présidents du Nigéria, Bola Tinubu et de la Côte d’Ivoire, Alassane Dramane Ouattara, ont constitué à faire des déclarations sur fond de menaces d’intervention militaire afin de réinstaller Bazoum dans son fauteuil de Président du Niger. A cet effet, ils ont même annoncé la structuration de la force qui doit intervenir avec l’identification du nombre respectif des pays mobilisateurs de militaires (Nigéria, Côte d’Ivoire et Bénin). « Nous sommes déterminés à réinstaller le président Bazoum dans ses fonctions » a clamé fort le Président Ouatarra. Malheureusement, ces menaces téléguidées depuis l’occident pour une fois ont été sanctionnées d’un désaveu cinglant.
Le Président Eyadema du Togo (selon Confidentiel Afrique) aurait refusé l’utilisation de l’espace aérien de son pays dans le cadre de cette opération.
La réunion des chefs d’Etat majors des pays devant se tenir à Accra samedi pour peaufiner les derniers réglages de cette intervention fut reportée sinedie. Comme si cela ne suffisait une institution légitime de cette organisation, le Parlement de la CEDEAO a tenu une session extraordinaire virtuelle, le samedi 12 août, sur la situation politique au Niger. A l’issue de la rencontre, les députés communautaires se sont opposés à une éventuelle intervention militaire au Niger, tel envisagé par les chefs d’Etat. Il a prôné le dialogue et la négociation avec les nouvelles autorités militaires du Niger. Et demander la mise en place d’un comité de médiation. Pour finir, les parlementaires de la communauté ouest africains ont plaidé en faveur de la levée de certaines sanctions, notamment la fermeture des frontières et la suspension de l’approvisionnement en électricité par le Nigeria, qui selon eux, font souffrir plus les populations.
Toujours lors de cette session du Parlement de la CEDEAO on annonce que sur les 21 interventions enregistrées, 18 voix étaient contre une quelconque intervention militaire au Niger, 2 pour et une sans avis sur la question.
En somme ce qui reste évident relève du fait que les menaces ‘’inutiles’’ de certains Chefs d’Etat de la CEDEAO à chaque évènement dans un pays ne feront qu’envenimer la situation, légitimer ceux qui sont indexés et accentuer la disparité entre les Etats. Le savent-ils ?
Moustapha Diawara
Le Sursaut