Un recul des libertés en plein temple de la démocratie ? L’année parlementaire s’annonce, en tout cas, avec un bouleversement démocratique de taille à l’hémicycle, une chambre qui s’est de tout temps illustrée comme l’épicentre des valeurs républicaines. Soumis annuellement à une relecture en vue de son adaptation au travail des députés, le règlement intérieur de l’institution parlementaire, selon certaines indiscrétions, a subi cet exercice cette année en essuyant une retouche très controversée. Il s’agit, confie-t-on, d’une extension de la restriction du temps de parole aux débats sur les lois. Il faut mentionner que jusqu’ici la parole ne connaît de limitation temporelle que pendant les interpellations et la Déclaration de Politique Générale où elle constitue un réel enjeu. Et, vérification faite, il nous revient que le changement de tradition ne repose que sur les grandes difficultés qu’éprouve le président de l’Assemblée pour une gestion optimale de la tribune. Autant en déduire une adaptation du règlement intérieur aux insuffisances d’un seul homme. Seulement voilà : on peut donner sa langue aux chats que la nouvelle mesure ne résistera pas plus d’une année d’épreuve, tant la nature et le sens du débat parlementaire ne s’y accommodent pas.
L’hémicycle ne compte plus qu’un seul non-inscrit
Il s’appelle Iliassou Goro, député élu à Douentza, sous la bannière de l’ancien parti présidentiel, le PDES. Les attributs et maigres avantages du statut de non-inscrit, qui n’existent que dans le droit à la parole, ont toujours été disputés entre lui et le chef de file des députés Sadi, Oumar Mariko depuis le début de la 5ème législature. Mais la question a été finalement tranchée par la jonction avec les députés ADP pour former un groupe, faisant du parlementaire élu à Douentza l’unique député non-inscrit de l’hémicycle. Finis donc les habituels tiraillements entre lui et Mariko pour la répartition du temps de parole réservé à cette catégorie d’élu. Sauf que l’Honorable Goro a choisi ce moment précis pour déclarer solennellement son adhésion à la politique de la majorité, à l’issue de la mise en place du nouveau bureau de l’Assemblée. Alors même que la formation dont il se réclame demeure de l’opposition, il s’est inscrit de fait à la majorité présidentielle. Comme quoi, son statut de non-inscrit n’a plus de sens.
Le plus malheureux des Députés dogon
Cet élu de la nation est probablement le plus malheureux que les législatures aient vu passer à l’hémicycle. Sa faute n’est pas tant d’avoir quitté son parti, membre de l’opposition, pour un autre groupe de l’opposition à peine constitué, mais elle réside plutôt dans la façon de le faire. L’honorable Damango, député élu à Bankass, fait en effet partie des cinq députés ayant rejoint armes et bagages l’ADP-Maliba, un parti qui n’a pas lésiné sur les moyens pour augmenter un capital de parlementaire aussitôt porté à un neuf élus. Au fait, Il n’est plus un secret pour personne que chacun des nouveaux adhérents a empoché jusqu’à la cinquantaine de millions contre un changement de vestes. Même si le député de Bankass se trouvait dans le même box, il va savourer les avantages beaucoup moins que les autres, tant la pratique est bannissable dans son milieu d’origine. Les connaisseurs desdits milieux sont d’ailleurs persuadés qu’il en fera les frais pour beaucoup de générations. Il va sans dire qu’il a déjà mis une croix sur une éventuelle ambition de réélection et qu’il ne servira à l’Adp que pour son mandat finissant.
La Rédaction
Source : Le Témoin