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Timbuktu de Abderrahmane Sissako projeté à Alger

Un regard figé sur l’Afrique

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Timbuktu, le dernier film du Mauritanien Abderrahmane Sissako, laisse peu de place à la libre réflexion.

Les deux premières scènes du film Timbuktu, du Mauritanien Abderrahmane Sissako, projeté mercredi soir à la salle El Mougar à Alger, lors du 5e Festival international du cinéma d’Alger, sont supposées résumer l’esprit du film. D’abord, une gazelle qui court en plein désert poursuivie par des hommes armés. Ensuite, des masques africains criblés de balles.

Nous sommes censés comprendre que l’Afrique est attaquée par le terrorisme ou par «le djihadisme». Pas la peine d’aller plus loin, nous avons tout compris. Mais soyons patients, essayons de voir de près ce que veut bien nous raconter Abderrahmane Sissako. «La musique, le football, la cigarette sont interdits.

Les femmes doivent porter des gants», annoncent deux hommes armés dans un mégaphone à bord d’une mobylette. Un ordre radical s’installe donc à Tombouctou, la cité millénaire du Nord Mali. Mais d’où sortent ces extrémistes au visage caché et portant des kalachnikovs en bandoulière ? Que veulent-ils ? Imposer la chariâ ? Oui, mais pourquoi ? L’intérêt est-il d’instaurer «l’Etat islmique» ? Ou l’intérêt est-il ailleurs ? Abderrahmane Sissako n’a pas tenté de répondre à ces questions, son souci principal est de dénoncer la violence et l’obscurantime. Son film, qui est inspiré directement de l’actualité malienne de 2012, se contente de montrer les méchants, de les ridiculiser au besoin et de dire qu’ils sont la négation de la modernité et des libertés. Ok, mais c’est déjà connu.

L’extrêmisme religieux porté par les armes ne peut pas être autre chose que le rejet de la civilisation, de la libre pensée. Qu’y a-t-il donc de nouveau sous le ciel de Tombouctou ? En face, les habitants sont passifs, résignés, écrasés, presque réduits au silence. Ils sont fouettés, mariés de force, subissent des procès absurdes… Méritent-ils leur sort ? Abderrahmane Sissako trace donc une ligne simple : à droite les méchants, à gauche des gens humiliés.

L’acte de résistance ne viendra de nulle part. Même Kidane, le Targui qui vivait paisiblement dans le désert avec sa femme Setima et sa fille Toya, ne fait rien pour échapper à ce qui lui arrive face à des «djihadistes» décidés à imposer leur «loi». Timbuktu est un film qui, certes, aborde un sujet sensible, actuel, mais peine à convaincre. Il y a trop d’évidences, trop de simplicité, trop de prêt-à-penser. Le regard de Abderrahmane Sissako, qui visiblement a subi la pression de ses producteurs, porte un regard standard, figé, politiquement correct sur la situation malienne, et par extension sur le phénomène djihadiste, sur l’Afrique et ses drames.

La violence islamiste qui s’est propagée en Afrique ces dernières années ne peut pas être le résultat d’une fatalité, de quelque chose qui était déjà écrit, établi. Timbuktu vend la marchandise avec son emballage, sans possibilité de réfléchir, de s’autoriser un début d’analyse ou de questionnement.

Le scénario de Timbuktu est décousu, les personnages évanescents et la narration perduent entre les dunes. Le film de Abderrahmane Sissako, qui a fait partie de la sélection officielle du Festival de Cannes 2014, est décevant malgré le souci de mettre un peu de poésie dans un monde de brutes. Mais cette opposition entre le beau et le laid, le lumineux et l’obscur a alourdi le récit et dévoilé la faiblesse du propos.

Le cinéaste aurait pu traiter son sujet autrement que par la vision «qui peut plaire» ailleurs. Son histoire «brûle» rapidement, comme une bougie à grosse flamme. Le point de vue du cinéaste est presque invisible dans ce long métrage. La ville de Tombouctou, qui aurait pu être son personnage principal, est inexistante. Le recours aux images touristiques, malgré leur beauté, n’ont servi à rien.

Dans Timbuktu, on parle en tamachaq, en bambara, en arabe, en anglais et en français. L’Afrique dans toute sa richesse. Mais c’est tout. Nous sommes déjà loin de En attendant le bonheur dans lequel Abderrahmane Sissako, qui a été formé à l’école du cinéma de Moscou, abordait avec courage et finesse la question migratoire en 1998.

Fayçal Métaoui

 

Source: elwatan.com

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