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Think tank : Le Mali doit renforcer ses capacités pour absorber les milliards de la reconstruction

Conjonction entre les effets de l’intervention de l’OTAN en  Libye et ceux d’une mauvaise gouvernance au Mali  faite, entre autres maux, de laxisme et d’incurie, la crise sécuritaire et politico-institutionnelle que le Mali vit  depuis plus d’une année semble perdre en intensité. L’on se surprend même à entrevoir le bout du tunnel.

 

L’un des signes de cette détente, c’est l’engagement massif des partenaires techniques et financiers, bi et multilatéraux, en faveur de la  reconstruction du Mali à l’occasion de la conférence des donateurs qui s’est tenue le 15 mai à Bruxelles. Une rencontre qui a été sanctionnée  par des annonces d’aides, à la fois  sous forme de dons et de prêts, totalisant 3,2 milliards d’euros ou 2 100 milliards de FCFA. Ces annonces ont été suivies par une autre venant, cette fois-ci, du Japon pour une enveloppe s’élevant à 750 millions d’euros dédiée à la lutte contre la sécurité au Sahel. Si l’on sait que le Mali est au cœur des problèmes de sécurité au Sahel, notre pays est alors prioritairement concerné par cet autre financement. Sans compter les 24 milliards d’euros (dont 10 milliards d’aide étatique) devant être déboursés sur cinq ans par le pays du soleil levant en faveur de l’ensemble des pays africains.

Ces différentes annonces de financements dont certains ont déjà commencé à tomber ouvrent de réelles perspectives pour  le développement du Mali. Il ne serait même  pas exagéré de parler d’un mini plan Marshall pour les deux années à venir (2013-2014) tant est que l’argent est le nerf de la guerre. Cette manne est, a priori, synonyme de création d’emplois, de lutte contre la pauvreté, voire de création de richesses.

 

 

Il faut cependant des mesures d’accompagnement pour transformer ces opportunités en actions concrètes de développement. Des mesures comme la promotion de la bonne gouvernance et le renforcement de la lutte anti-corruption pour que l’aide ne soit pas détournée de son objectif et que les fonds alloués ne se retrouvent pas dans les poches ou les comptes  de responsables peu délicats.

 

Mais ces mesures seules ne suffisent. Il en faut d’autres comme le renforcement des capacités d’absorption du pays. Combien de fois des fonds, s’évaluant souvent en dizaines de milliards de FCFA, sont retournés à leurs bailleurs tout simplement parce qu’il n’y a pas eu assez d’expertises nationales pour identifier, concevoir  ou même exécuter des  projets de développement pertinents ? Ce qui est aberrant dans un pays croulant sous le poids de la misère et de la pauvreté, où les populations n’ont pas accès aux services de bases, où les infrastructures manquent cruellement, où les jeunes, représentant la couche la plus importante de la société, constituent une bombe à retardement du fait du chômage.

 

Pour augmenter cette capacité d’absorption il faut mettre en branle sans délai une stratégie tous azimuts. Il faut, certes, redémarrer des projets qui avaient été arrêtés à cause de la crise et de l’insécurité. Il faut, ensuite, faire preuve d’imagination, de beaucoup d’imagination. Il faut, entre autres, aider le secteur privé, censé être le moteur du développement et le plus grand pourvoyeur d’emplois, à se doter d’une banque d’investissement et autres instruments économiques appropriés. Il s’agit aussi d’investir massivement dans les secteurs où le pays a des avantages comparatifs certains comme, l’agriculture, l’élevage et la pêche.  A ce sujet, pourquoi ne pas accroitre, de façon sensible, les surfaces aménagées de l’Office du Niger (seul 10% du million d’hectares est valorisé présentement) et  y  installer  le maximum de jeunes diplômés et non diplômés ? Pourquoi ne pas élaborer beaucoup de projets dans le domaine de la transformation des produits agricoles et d’autres filières porteuses comme le lait, la viande, l’embouche bovine et ovine, les peaux et cuirs et les sous-produits d’abattage ? Pourquoi  ne pas mettre en place une grande unité de transformation du karité et profiter de l’AGOA ? Ou créer une chaîne de valeur autour du secteur des pierres semi-précieuses dont le Mali regorge tant mais qui est complètement laissé à l’abandon ? Cette stratégie tous azimuts et inclusive doit impliquer  les décideurs politiques et administratifs, mais aussi les principaux acteurs concernés, à savoir les associations de jeunes, de femmes, les milieux d’affaires, les bureaux d’études,  les ONG, les banques et les collectivités locales. Comme on le voit, les idées ne manquent. Encore faut-il qu’il y ait la volonté politique, le préalable à tout. Que les décideurs, les hauts responsables politico-administratifs s’intéressent aux problèmes de développement du pays au lieu d’être uniquement préoccupés-pour ne pas dire obnubilés-comme on l’a toujours vu, à se remplir les poches ou à garnir davantage  leurs parcs de véhicules plus luxueux les uns que les autres rendant notre économie encore plus extravertie, ou édifier des châteaux insultant la misère du peuple.

 

Yaya Sidibé 

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