L’Ouganda confirme que ses soldats étaient engagés aux cotés de l’armée sud-soudanaise dans les combats contre la rébellion alors que Human Rights International dénonce jeudi des tueries sur une base purement ethnique.
Sur le plan diplomatique, les pourparlers pour mettre fin à plus d’un mois d’un conflit entre troupes du président Salva Kiir et unités fidèles à son rival, l’ex vice-président Riek Machar limogé en juillet, restaient bloqués dans la capitale éthiopienne. Aucune information nouvelle n’était disponible sur les combats entrés dans leur deuxième mois.
L’Ouganda joue un rôle majeur dans les négociations engagées à Addis Abeba en tant que membre du bloc est-africain de l’Igad qui joue un rôle de médiateur.
Mais son président, Yoweri Museveni, a reconnu publiquement pour la première fois que des soldats ougandais combattaient – et avaient subi des pertes – aux cotés de l’armée gouvernementale, la SPLA.
“Au cours de la seule journée du 13 janvier, la SPLA et des soldats de notre contingent ont mené de vifs combats avec les troupes rebelles à environ 90 km de Juba, et nos troupes leur ont infligé une sévère défaite”, a-t-il déclaré mercredi soir lors d’un sommet régional à Luanda.
“Malheureusement, beaucoup de rebelles ont été tués. Nous avons également déploré des blessés et quelques morts”, a-t-il ajouté.
L’Ouganda a déployé des troupes au Soudan du Sud cinq jours après le début des combats le 15 décembre pour évacuer des citoyens ougandais et aider le président Salva Kiir mais Kampala était resté vague sur la nature exacte des opérations.
Les interventions étrangères “ne feront que contribuer aux souffrances de notre peuple”, a averti jeudi un groupe de dirigeants religieux et intellectuels.
“Ce qui était une querelle politique au départ est devenu une crise s’étendant à l’ensemble du pays”, a ajouté l’organisation Citizens for Peace and Justice.
Le conflit qui a déjà fait des milliers de morts et forcé 400.000 civils à fuir se double d’affrontements entre ethnies, opposant Dinka du président Kiir et Nuer de son rival M. Machar.
‘Crimes effarants”
Dans un rapport sur le Soudan du Sud, l’ONG Human Rights Watch écrit que “des crimes effarants ont été commis contre des civils pour la seule raison de leur appartenance ethnique”.
HRW détaille des “tueries généralisées”, dont le massacre le 16 décembre à Juba, la capitale, de 200 à 300 hommes tués par les forces de sécurité gouvernementales qui ont “tiré systématiquement” sur des Nuer enfermés dans un local.
L’ONG a également réuni des données sur “le ciblage et le meurtre de civils de l’ethnie dinka par les forces de l’opposition dans d’autres parties du pays”.
D’autres informations citent des meurtres ciblés dont ceux d’enfants.
“Ils ont fait sortir cinq de mes voisins et les ont abattus dans la rue”, a déclaré un maçon de Juba, âgé de 42 ans, rapportant des meurtres qu ont eu lieu au début du conflit.
“Nous avons couru, les soldats ont crié ‘stop’, nous avons refusé et ils nous ont tiré dessus. Je me suis arrêté pour ramasser mon fils mais il était lourd et mort. Quand ils sont arrivés vers lui, ils lui ont de nouveau tiré dessus”.
HRW évoque de possibles crimes de guerre et crimes contre l’humanité et appelle à une enquête internationale.
“Les deux côtés doivent laisser les civils en dehors du conflit, laisser les organisations humanitaires avoir accès aux gens qui ont besoin d’aide et accepter une enquête crédible et indépendante sur ces crimes”, a déclaré Daniel Bekele, directeur Afrique de HRW.
L’armée sud-soudanais n’était pas joignable jeudi matin sur l’évolution des combats mais la télévision officielle a lu la veille un communiqué militaire appelant les civils à quitter immédiatement la ville de Bor, à 200 km au nord de Juba, que les soldats gouvernementaux tentent de reprendre depuis des jours.
La capitale de l’Etat du Jonglei a déjà changé trois fois de mains depuis le début du conflit.
Les rebelles de leur côté ont lancé en début de semaine un assaut contre la ville de Malakal — principale agglomération de l’Etat producteur de pétrole du Haut-Nil. La bataille impliquerait des chars. Les deux camps ont affirmé contrôler la ville.
© 2014 AFP