Le ministre de l’Administration territoriale, Abdoulaye MAIGA, a rejeté ce samedi 20 janvier à Kampala le document final du sommet des Etats non-allignés au motif que l’un de ses chapitres impose l’accord de paix d’Alger en dépit des amendements du Mali. Ce passage en force, selon le ministre MAIGA, est une alerte sur le danger qui guette le Mouvement des non-alignés face aux velléités d’un pays d’imposer son agenda et une ingérence dans les affaires intérieures d’autres États.
Les rideaux sont tombés sur le sommet des Chefs d’État et de Gouvernement du Mouvement des non-alignés tenu du 19 au 20 janvier en Ouganda sur une note de désaccord autour du document final de ladite rencontre.
Dans le texte, un chapitre est consacré au processus de paix et la réconciliation nationale en redonnant la force à l’Accord d’Alger, en dépit des amendements des autorités maliennes, à travers le ministre Abdoulaye DIOP qui a levé la voix sans être écouté.
« En effet, en réaction au projet de document final, notre Ministre des Affaires Étrangères a formulé des amendements, qui ont été refusés par je ne sais qui, et au nom de je ne sais quoi. Malgré sa vive protestation lors de la conférence des Ministres des Affaires Étrangères, la situation ne semble pas avoir évolué », a rappelé le ministre porte-parole du gouvernement, Abdoulaye MAÏGA, représentant le chef de la transition malienne à la clôture des travaux de ce sommet.
La désapprobation
du Mali
Le refus de prendre en compte les observations de son pays, pour le ministre Abdoulaye MAÏGA, est une entorse grave à l’usage diplomatique contre son Mali pour autant très attaché aux valeurs du Mouvement des non-alignés constitué d’une centaine de pays.
« Rejeter les amendements d’un État membre sur un sujet qui concerne d’abord et avant tout cet État lui-même est un fait suffisamment grave, qui alerte sur le danger qui guette notre organisation commune face aux velléités d’un pays d’imposer son agenda et s’ingérer dans les affaires intérieures d’autres États », a-t-il denoncé.
Dans un monde profondément divisé, où la confiance entre les acteurs internationaux est fortement entamée, selon le ministre Abdoulaye MAÏGA, il est important, pour notre Mouvement, de veiller à privilégier les acquis du multilatéralisme et de la coopération internationale, qui demeurent des cadres efficaces de règlement des multiples foyers de tension dans plusieurs régions du monde.
Ce malentendu intervient après une tension diplomatique entre le Mali et l’Algérie accusée d’avoir rencontré des responsables hostiles à la transition sans se référer aux autorités maliennes.
Par conséquent, à défaut de prendre en compte les amendements du Mali, tels que proposés par le ministre des Affaires Étrangères, « le Mali se dissocie totalement de la rédaction proposée et exige un retrait pur et simple du chapitre qui lui est consacré dans le projet de document final sur les résultats du Sommet de Kampala », a déclaré Abdoulaye MAÏGA.
A l’avenir, conseille-t-il, il est important de revoir le fonctionnement de notre Mouvement, pour plusieurs raisons : lorsqu’un chapitre porte sur un État membre, il est important d’obtenir par écrit le consentement de l’État, ainsi que le pays qui est à l’origine du projet de chapitre.
« Les règles et les procédures ne peuvent pas être plus importantes que la souveraineté des États membres. Sans changement de ces règles, il y a une forte probabilité de raser la tête d’un État membre en son absence et sans son consentement, ce qui ressemble à de la sorcellerie », a indiqué le ministre MAÏGA.
En acceptant ce document final à l’état, le Mali serait cohérent avec ses principes pour avoir expérimenté le dialogue inter-Maliens après avoir conclu que l’Accord d’Alger signé en 2015 a montré ses limites.
L’objectif de ce processus inter-Maliens consiste à donner « toutes ses chances à un dialogue direct inter-maliens, afin d’éliminer les racines des conflits communautaires et intercommunautaires », a annoncé le Président de la Transition lors de son adresse de nouvel an.
Non aux remèdes
imposés
Selon le ministre Abdoulaye MAÏGA, l’initiative de dialogue direct entre les Maliens s’inspire d’expériences réussies en Afrique qui ont eu des résultats probants, citant notamment la Commission vérité et réconciliation en Afrique du Sud, puis la Charte pour la paix et la réconciliation nationale en Algérie. Pour autant, elles ont réussi, sans influence extérieure, pour résoudre une décennie de terrorisme.
« Partant du principe que nul ne peut aimer le Mali plus que les Maliens, le Gouvernement est pleinement engagé dans la mise en œuvre de solutions endogènes, issues de la volonté, des attentes et des besoins de nos populations. Par conséquent, nous rejetons d’office les remèdes imposés ou importés et contre-productifs », a-t-il déclaré, ajoutant à cet égard « le Mali s’oppose à toutes les formes d’ingérence étrangère dans les affaires intérieures des États ».
Dans la même veine, le Mali dénonce toutes les autres mesures coercitives unilatérales dont souffrent plusieurs pays de notre organisation commune, à l’instar des sanctions illégales, inhumaines et illégitimes que l’UEMOA et la CEDEAO ont pris contre le Mali, ensuite le Burkina et présentement le Niger, alors qu’elles ont été impuissantes à aider substantiellement ces trois pays dans la lutte contre la menace terroriste.
Accusée d’être à l’origine dudit chapitre controversé, l’Algérie dans un communiqué signé par son ministère des Affaires étrangères, dément « formellement avoir pris une telle initiative. Tout ce que le document final de Kampala comprend comme langage à propos de la crise malienne a été adopté depuis la réunion ministérielle de Baku du Mouvement des PNA. Ce langage appartient en propre au Mouvement des Non-allignés et l’Algérie n’est intervenue à aucun moment dans sa formulation ».
PAR SIKOU BAH
Info Matin