Au Mali, les pratiques de faux et usage de faux ne se font plus en catimini, mais en plein air. La société ERD-SARL a signé plusieurs conventions avec l’Agence malienne pour le développement de l’énergie domestique et de l’électrification rurale (AMADER). Mais de l’ouverture des projets jusqu’à la liquidation de ladite société, des sommes se sont évaporées. Mahamadou Sacko, un associé du projet ERD-SARL, a entamé depuis des années des démarches auprès des juridictions pour que lumière soit faite sur cette affaire, mais en vain.
Créée en 2004, la société ERD-SARL constitue une société qui évoluait dans le domaine de l’énergie domestique et de l’accès universel aux services de base. Le capital social de la société s’élevait à 1 500 000 FCFA à sa création. Cette société a conclu trois conventions d’électrification : Sanankoroba-Banankoroni et Kalana.
La convention de financement N°06-003/AMADER/DG/DAF est celle pour l’électrification de la commune de Sanankoroba-Banankoroni. Cette convention, signée le 20 janvier 2006, devait s’étaler sur une durée de 15 ans.
Toutes les conditions posées par cette convention ont été remplies par le permissionnaire, ERD-SARL, comme le laisse voir cette lettre du 25 avril 2006 envoyé par le directeur général d’AMADER : « Nous avons le plaisir de vous annoncer que vous avez satisfait aux conditions indiquées dans l’article 3 de la convention de financement relatif à la justification de la mise en place de votre contribution au projet. »
La convention qui lie AMADER à ERD-SARL fait ressortir que le permissionnaire doit faire preuve d’une contrepartie en nature ou en espèce, AMADER devra ensuite s’assurer de l’existence de la contrepartie. Pour la bonne exécution des travaux, le permissionnaire était tenu d’ouvrir un compte opérateur à la BNDA. Le fonctionnement dudit compte était soumis à la signature d’AMADER et d’ERD-SARL. Ainsi, l’intégralité des sommes devant être investi dans le cadre dudit projet aurait dû être déposée sur le compte central opérateur, en l’occurrence le compte BNDA.
Le coût de réalisation dudit projet s’élevait à 281 653 513 FCFA dont la contribution AMADER se chiffrant à 200 000 000 FCFA soit 71% du coût. Selon les affirmations du comptable agrée, Mahamadou Coulibaly, consignées dans le rapport d’expertise de gestion de la société Energie rurale (ERD-SARL) daté d’avril 2009, la première tranche payée le 22 mai 2006 s’élevait à 50 000 000 FCFA. Quant à la deuxième tranche, d’un montant de 100 000 000 FCFA, fut payée le 13 décembre 2006.
Le montant de la subvention allouée à ERD-SARL par AMADER, à titre de financement partiel en vue de la réalisation des trois projets s’élève à 703 540 000 FCFA, dont 443 160 000 FCFA pour le projet de Sanankoroba-Banankoroni ; 260 390 000 FCFA pour celui de Kalana.
Il faut noter que, aux dires de Mahamadou Sacko, le permissionnaire, par le biais de son gérant statutaire Mr. Boubacar Diallo, a mobilisé un apport en nature à titre de la contrepartie d’ERD-SARL au projet. Cet apport en nature se résume à deux groupes électrogènes contre-évalués par AMADER à 81 679 739 FCFA le 25 avril 2006.
Cependant, aux dires de l’associé M. SACKO, il n’a eu connaissance de l’existence du projet initial d’électrification de Sanankoroba, objet de la convention N°06-003/AMADER/DG/DAF en date du 20 janvier 2006 et du lancement de l’activité de distribution d’électricité qu’à travers le journal de 20 heures de l’ORTM diffusé courant janvier 2007.
À cet effet, il eut rencontré le Gérant au siège de leur société, en son temps, domicilié à l’immeuble Toukoto Ly courant janvier de l’année 2007 afin d’être mis dans le bain. N’ayant daigné mettre à la disposition de son co-associé, Mr. Sacko, les documents relatifs au projet initial, transmis à ERD-SARL par l’AMADER le 27 janvier 2007 ; ce dernier saisit le partenaire AMADER pour requérir lesdites informations, lequel, dans sa lettre N°0562/MMEE-AMADER-DG-DER du 06 juin 2007 a demandé à Mr. Sacko en sa qualité d’associé de s’adresser à ladite société pour réclamer une copie de la convention signée entre elle et l’AMADER.
En réponse à l’une des correspondances de Mr. Sacko à lui adresser, le gérant statutaire Mr. Diallo, par l’entremise de Me. Elhadji Lassana Koita, huissier de justice, lui notifia la lettre sans numéro du 1er octobre 2007 accompagnée des documents suivants : convention de financement, contrat d’autorisation, cahier des charges et bilan des exercices 2004, 2005 et 2006 ; ce 21 mois après la signature de la convention de financement N°06-003/AMADER/DG/DAF.
Par ailleurs, nonobstant les nombreuses sollicitations de son co-associé, le gérant Mr. Diallo s’est prêté à une gestion opaque ne daignant tenir d’assemblée générale annuelle, ce de la création de ladite société à sa dissolution suite au prononcé du jugement N°14 du 09 janvier 2009, toute chose attestée par les conclusions du rapport d’expertise de gestion sus cité.
Quant à la seconde convention N°093/AMADER/DG/DAF relative au projet d’extension Sanankoroba-Banankoroni, conclu entre la société et son partenaire AMADER le 19 juin 2009, était assortie d’une subvention de 243 160 000 FCFA. Après que Me. Elhadji Lassana Koita lui en est notifié une copie le 2 juillet 2009, Mr. Sacko par l’entremise de Me. Sékou Koné, Huissier de justice, adressa au gérant statutaire Diallo une proposition de mise en place d’un apport en nature à titre de contrepartie de la société au projet, proposition consignée dans la correspondance en date du 03 août 2009, à lui notifier le même jour. Aux dires de Mr. Sacko, cette correspondance est restée sans suite.
Quant à la troisième convention, celle de Kalana, assortie d’une subvention de 260 390 000 FCFA. Mahamadou Sacko en tant qu’associé dit n’avoir pris connaissance de l’existence ladite convention que lors de la liquidation de leur société ; ce lors d’un passage à l’AMADER pour information relative au remboursement de la valeur comptable des investissements réalisés par l’ERD-SARL dans lesdites localités objet d’autorisation.
Il faut noter que selon Mr. Sacko, il n’aurait jusqu’à présent pas connaissance du contenu de cette convention. À ses dires, le gérant statutaire se serait abstenu de lui en communiquer une copie. Cette abstention ne serait-elle pas significative ?
Plusieurs procédures judiciaires ont été initiées par Mahamadou Sacko contre le Gérant statutaire, mais aussi contre d’autres personnes ayant produit auprès du liquidateur de ladite société l’expert-comptable agrée Mr. Alou Konaté des faux documents, comme justificatifs d’hypothétiques créances, ayant permis de ponctionner des sommes colossales à concurrence de plusieurs dizaines de millions sur le compte bancaire BMS-SA d’ERD-SARL.
- Sacko se plaint de la gestion opaque du gérant statutaire, qui, est pratiquement le seul à être au courant de la destination prise par les différentes sommes versées à leur société par le partenaire AMADER à titre de subvention. Le constat est amer, aucune assemblée générale n’ayant été tenue de la création à la dissolution de la Société Energie rurale durable (ERD-SARL). La mésentente née de la gestion du gérant, qualifiée d’opaque par Mr. Sacko, va aboutir à la dissolution de la société le 9 janvier 2009, confirmée par l’arrêt 26/11 du 20 avril 2011.
Fousseni TOGOLA
À suivre
Source: Le Pays