Mahamadou Issoufou était à Paris, lundi 4 juin 2018. Le président nigérien a rencontré son homologue français, Emmanuel Macron, lors d’un tête-à-tête de plus d’une heure au palais de l’Elysée. L’occasion notamment de faire le point sur les questions migratoires, sécuritaires, et le G5 Sahel.
Lors d’une conférence de presse, le chef de l’Etat nigérien a répondu aux ONG et associations inquiètes de la situation des droits de l’homme dans son pays.« Le Niger est un Etat de droit », rappelle le président Issoufou, interrogé lundi sur le fait que depuis près de deux mois pour certains, des leaders de la société civile de son pays sont en prison. Pour lui, tout a été fait selon la loi, et cette trentaine d’arrestations est légitime ; les personnes concernées ont bravé l’interdiction de manifester de nuit que le gouvernement avait décrétée pour des raisons de sécurité. Pas de quoi faire trembler la République, selon M. Issoufou.
M. Issoufou: « en 2021 je m’en vais »
« Nous avons le devoir de protéger nos citoyens, même malgré eux ! Les responsables de la société civile ont décidé de passer outre, nous avons appliqué la loi. Le Niger est un Etat de droit, et moi je suis un démocrate convaincu. La preuve d’ailleurs : en 2021 je m’en vais, c’est mon dernier mandat ! Je ne vais pas triturer la Constitution ! Alors, quand j’entends des qualificatifs, “dictateur”, etc., ça me fait sourire… Parce moi, je ne me sens pas concerné. »
La situation n’inquiète pas Emmanuel Macron non plus, qui a rappelé le statut de partenaire privilégié du Niger pour la France : « J’ai un dialogue étroit et de confiance avec le président Issoufou. Il est démocratiquement élu, il y a une Constitution, il y a un pouvoir judiciaire encadré par la loi. Et je sais son engagement pour les droits fondamentaux, comme de l’esprit de responsabilité qui est le sien depuis que je le connais sur les sujets d’alternance démocratique. »
Alors que la procédure judiciaire concernant les leaders de la société civile emprisonnés est au point mort, « je suis attaché au respect mutuel, et je pense que personne n’irait demander au président Issoufou ce qu’il pense de ce qui se passe dans mon pays », a également déclaré le chef de l’Etat français, plus enclin discuter de la situation du G5 Sahel, cette force qui regroupe des bataillons des armées malienne, nigérienne, mauritanienne, burkinabè et tchadienne et qui a déjà démarré ses opérations.
Qui pour contribuer au financement du G5 Sahel ?
C’était le thème central de la rencontre de lundi à Paris ; le G5 Sahel est en train d’achever sa troisième opération, mais le président Issoufou n’a pas caché son inquiétude quant à la question de son financement. La force dispose de 420 millions d’euros pour sa première année d’activité, mais après ? « J’ai fait part de la préoccupation de nos pays par rapport à la pérennité du financement de cette force », a expliqué Mahamadou Issoufou à la presse.
« La France est je crois le pays qui a le mieux compris que la sécurité, dit-il, est un bien public mondial et que la sécurité des pays du Sahel dépendra aussi la sécurité de l’Europe et en particulier la sécurité de la France. »
Pour l’heure, le G5 Sahel est financé par des promesses de dons de pays partenaires comme la France, les Etats-Unis, l’Arabie saoudite ou d’institutions comme l’Union européenne. Les promesses sont une chose, mais maintenant il faut signer les chèques. Emmanuel Macron compte bien tenir la caisse. « Il faut maintenant que l’aide soit véritablement décaissée, estime le président français. C’est ce à quoi nous nous employons s’agissant de l’aide de l’Union européenne. »
Cette aide, a rappelé M. Macron lors du point presse, « est désormais une réalité sur le terrain. Les premières primes ont été réglées la semaine dernière, les équipements en protection individuelle seront livrés dans les prochaines semaines. ». Mais la France, précise-t-il, « est aussi engagée pour s’assurer que les engagements financiers de certains partenaires comme l’Arabie saoudite soient rapidement traduits en livraison concrète au bénéfice des pays du G5 ».
Le président nigérien juge nécessaire de « placer la force conjointe sous le chapitre 7 de la Charte des Nations unies ». D’ailleurs, sans mécanisme de l’ONU, le G5 devra compter sur une nouvelle conférence de bailleurs pour financer sa deuxième année d’activité.
RFI