Une plongée dans l’inconnu. Les députés de la coalition présidentielle et du groupe appartenant au Parti démocratique sénégalais (PDS), dont la candidature du leader, Karim Wade, a été déclaré irrecevable, ont adopté le 5 février une proposition de loi reportant l’élection présidentielle au 15 décembre prochain.
Le projet de loi décalant le scrutin a été voté à la quasi-unanimité, après l’exclusion de députés d’opposition de l’Hémicycle par la gendarmerie. Le mandat du chef d’État Macky Sall a également été prorogé jusqu’à l’investiture de son successeur. Le Président de la République, réaffirmant sa décision de ne pas se présenter à la prochaine présidentielle, avait annoncé le 3 janvier avoir abrogé le décret convoquant le corps électoral le 25 février prochain, en attendant les résultats de la commission d’enquête parlementaire visant à clarifier les conditions dans lesquelles certaines candidatures avaient été déclarées irrecevables. Le Parti démocratique sénégalais (PDS) avait demandé et obtenu la mise en place de cette commission après l’invalidation de la candidature de Karim Wade pour cause de double nationalité. Le PDS avait également émis des accusations de corruption présumée à l’encontre de certains membres du Conseil constitutionnel, chargé de l’examen des candidatures. L’opposition dénonce un « coup d’Etat institutionnel » et cette crise précipite le Sénégal dans l’incertitude car c’est la première fois que la présidentielle est reportée dans le pays. Juste après l’annonce du report, des manifestations ont été organisées, dispersées par des tirs de gaz lacrymogènes des forces de l’ordre. Une partie de l’opposition appelle à la désobéissance civile. Certains proches du Président Sall ont choisi de démissionner. D’après certains journaux, la décision du report cache un conflit entre le Premier ministre Amadou Ba, dauphin désigné du Président Sall, et des très proches de celui-ci qui ont peu confiance en ses chances de victoire. Après le vote des députés, El Hadji Mamadou Diao, candidat à l’élection présidentielle, a déposé une requête auprès du Conseil constitutionnel « aux fins de poursuite du processus électoral », a annoncé la coalition qui le soutient. La CEDEAO, très scrutée sur ce dossier, a dans un communiqué, le 6 février, « encouragé » la classe politique sénégalaise à prendre de toute urgence les mesures nécessaires pour « rétablir » le calendrier électoral conformément aux dispositions de la Constitution du Sénégal. L’organisation régionale assure qu’elle restera attentive aux évènements et prendra « toutes les mesures nécessaires pour accompagner le gouvernement et le peuple sénégalais à maintenir la tradition démocratique du Sénégal ».