Les pays du Sahel ont une particularité commune, c’est la présence quasi permanente des mendiants, surtout dans les villes. Cette présence est vécue comme une espèce de honte par les gouvernants de ces pays qui, de temps en temps prennent des mesures coercitives contre ces gueux qui écument les rues et avenues des grandes agglomérations. Le plus souvent, on leur interdit les quartiers huppés de la ville, où le gratin de la capitale se retrouve. C’est ainsi que les quartiers administratifs et les quartiers résidentiels leur sont interdits. Mais ces personnes qui ne veulent pas les voir ont souvent recours à eux pour accomplir les rites que leur recommandent leurs marabouts, « gangas » et autres lanceurs de cauris. C’est cette position d’hypocrisie vis-à-vis de ces misérables que dénonce avec beaucoup d’humour la romancière sénégalaise Aminata Sow Fall, dans son remarquable roman, « La grève des bàttu », paru en 1979.
A côté de ces misérables qui se retrouvent dans les rues des grandes villes ou qui font du porte à porte, il existe d’autres types de mendiants au Sahel et même dans les pays développés : ce sont des mendiants 5 étoiles. Il s’agit des chefs d’Etats et des gouvernements. Tandis que les chefs d’Etats et des gouvernements des pays développés voyagent de pays en pays pour pouvoir acquérir de juteux contrats pour leurs firmes industrielles ; ceux des pays d’Afrique au sud du Sahara se déplacent pour la plupart du temps pour quémander, afin de pouvoir résoudre des problèmes primaires : appui budgétaire, déficit alimentaire, financements de projets structurants.
Cette mendicité « des grands » s’est surtout accentuée dans les pays du Sahel, avec l’apparition du phénomène de l’extrémisme religieux que nos partenaires occidentaux appellent terrorisme.
Alors, nos braves chefs d’Etats se sont transformés en commis voyageurs pour la recherche de fonds d’appui soit budgétaire, soit de lutte contre le terrorisme, rarement pour le développement. Sans gêne, ils crient leur détresse pour pouvoir mieux appâter le sollicité. La plus remarquable de cette mendicité des 5 étoiles, a été mise en exergue à la création du groupe G5 Sahel de lutte contre le terrorisme.
Avec des ambitions démesurées au-dessus de leurs moyens, le G5 Sahel et leur parrain de mentor la France, se sont retrouvés à chercher à boucler le budget nécessaire à son fonctionnement : 420 millions de dollars US selon le président IBK, président en exercice du G5 Sahel. On assiste alors, à des opérations de charme tous azimuts envers des pays nantis, Allemagne, Etats –Unis, principautés et royaume de la péninsule 0arabique… On tente même de faire endosser toutes les charges par l’ONU.
Evidemment les pays riches ne sont pas dupes. C’est ainsi que l’Allemagne accompagne prudemment la France, son alliée dans cette aventure. Les Etats-Unis de même, qui ne tiennent pas à mettre un dollar dans le G5, mais le feront de façon bilatérale, c’est-à-dire qu’ils donneront à chacun des pays du Sahel. L’ONU n’a pas perçu la nécessité de prendre en charge une activité dont elle n’est pas l’initiatrice. En réalité, derrière cette attitude dubitative des partenaires, les uns et les autres ont décelé un activisme français pour servir « la nouvelle politique de la France en Afrique ».
Chacun sait que le G5 est une création de la France. La majeure partie de la somme engrangée sera ainsi utilisée pour acheter des armes à la France ou financer des projets dont les principaux adjudicataires seront des entreprises françaises : 400 cent millions de dollars par an, ce n’est pas rien !
Puisque la France n’a pas les moyens de « sa nouvelle politique africaine », puisque l’ONU ne voudrait pas prendre en charge le G5, il faudrait bien trouver les moyens ailleurs.
Les voyages dans les pays du Golfe et en Arabie procèdent de cela. Et l’indicible facétie nous est offerte quand le président en exercice du G5 élabore un budget de plus de 400 millions de dollars, le président français Macron, le ramène à 250 millions ! Qui a tort, qui a raison ? Dans tous les cas, en Afrique nous sommes abonnés à la surfacturation, ce que les institutions françaises ne pourraient permettre à un de ses dirigeants fut-il président de la république. Heureusement que la guerre des chiffres n’a pas eu lieu.
Bien qu’ici, chez nous, qu’on veuille bien nous faire avaler que c’est grâce au leadership du président en exercice du G5 que les pays du golfe et l’Arabie Saoudite ont voulu bien délier les cordons leurs bourses. Ceux qui suivent les actualités ont certainement relevé que, c’est à l’issue de la visite du président Macron chez le roi Salman et aux Emirats Arabes Unis que les annonces des 100 millions et 30 millions de dollars ont été faites et que la réunion a eu lieu à Paris et non à Bamako. De même le prochain appel à contribution ne se fera même pas en Afrique à fortiori à Bamako, mais en Europe, à Bruxelles au siège de l’Union Européenne.
Tout cela indique qu’il y a mendiant et mendiant. Et il semble que le mendiant 5 étoiles d’un pays développé attire plus de « compassion » que celui d’un pays où les citoyens ne peuvent même pas manger pas à leur faim. Comme quoi, le dicton selon lequel, « on ne prête qu’aux riches » pourrait se déclamer en : « on ne donne l’aumône qu’aux riches ! »
Mais le hic dans tout cela c’est comment rendre pérenne le fonctionnement de ce fameux G5. Avec l’argent des autres ?
Hamidou Ongoïba
Par Delta News