A-t-on besoin d’une dissertation philosophique pour prouver l’évidence ? Introduction, thèse, antithèse, synthèse… pour répondre à quelques lignes d’un petit communiqué annonçant l’ouverture d’une enquête du Procureur du pôle spécialisé de la lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée, qui n’a jamais mis en cause encore moins désigné le CSP.
L’empressement des terroristes qui ont fui Kidal à répondre à la quête de la vérité dans cette affaire opaque dénote d’un manque de sang-froid, voire d’une panique de la part de ceux qui disent ne rien se reprocher et qui appellent à la rescousse leurs complices du silence, notamment ceux qui ont préféré fermer les yeux sur les massacres des centaines de Maliens dans l’attaque du bateau Tombouctou.
Qui fait du ciblage ethnique quand on recourt aux racistes qui n’ont aucune empathie pour la mort des dizaines de passagers civils noirs maliens le 7 septembre 2023 en guise de défenseurs de droits de l’homme ; des défenseurs des droits de l’homme qui ne se sont jamais émus et n’ont jamais condamné le massacre des populations civiles innocentes et des soldats par les rebelles et leurs alliés terroristes, au nord et au centre au Mali. Considèrent-ils les Maliens comme des êtres humains ces organisations de défense des droits de l’homme qui condamnent la mort dans un raid d’hélicoptère des trois chèvres dans un campement touareg (2006), mais qui sont restés coi quand il s’est agi du génocide d’Ogossagou, de Soban-Da…?
Pour la paix et la réconciliation, évitons de réveiller les morts, épargnons-leur le témoignage et pansons les blessures de l’âme et cœur de cette nation meurtrie par tant d’injustice. C’est facile de se cacher ailleurs, à l’extérieur de proférer des accusations insensés et de feindre plaider pour un peuple auquel on a tourné le dos, pour son propre confort raciste. Qu’on ne parle au nom du peuple de Kidal, abandonné, oublié et ignoré.
Comme si dans ce pays de fuyards, la justification ne saurait en aucun cas être une accusation légitime pour qui n’est pas nommément désigné, l’on peut objecter au CSP d’avoir répondu à des allégations montées ‘‘de toutes pièces par des terroristes habillés en robes d’institutions’’ qui ne sont que ‘‘pure diversion manifestement destinée à masquer les horribles massacres commis (…)de Léré à Kidal en passant par Ersan (Gao) Almoustrate, Dianka (Mopti), Tombouctou, Agouni, Tonka et tant d’autres lieux’’ ; et de n’avoir jamais porter plainte contre des prétendus massacres ni à l’interne ni à l’internationale.
Avec la floraison d’images d’enfants soldats dans les rangs de l’armée fuyarde de l’Azawad, le Porte-Parole du CSP, Mohamed Elmaouloud Ramadane, aurait dû nuancer son propos. Car affirmer que ‘‘dans la région de Kidal, aucune allégation ne serait-ce que sous forme de rumeur n’a jamais été rapportée par une quelconque source portant sur des violations des Droits de l’Homme par les forces du CSP-PSD’’ et que ‘‘depuis l’arrivée de la MINUSMA en 2013 à son départ le 31 Octobre 2023, sa section Droit de l’Homme n’a jamais mentionné pour toute l’étendue de la région de Kidal des violations impliquant des exécutions extrajudiciaires à plus fortes raisons l’existence de charniers’’, sont des grossiers mensonges qui pourraient irriter plus d’un.
Parce qu’en disant que ‘‘pendant dix ans de la présence de la MINUSMA et d’autres ONG œuvrant dans le domaine des droits humains, aucune organisation n’a relevé l’existence d’un quelconque charnier et que subitement, en moins d’une semaine, des terroristes institutionnalisés découvrent un charnier’’, le CSP ne dit pas la vérité.
Par exemple, dans son rapport fait en collaboration avec les partenaires humanitaires et couvrant la période d’août au 07 novembre 2023, consacré à la région de Kidal, OCHA (Office for the Coordination of Humanitarian Affairs ou Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies) écrit ceci : ‘‘Dans le cadre de la protection de l’enfant, les acteurs humanitaires estiment qu’une quinzaine d’enfants associés aux groupes armés, 22 enfants non accompagnés (ENA), et neuf (9) filles survivantes de violences basées sur le genre ont été enregistrés et suivis d’août à novembre 2023. Ces enfants ont bénéficié de la prise en charge transitoire au niveau du Centre de Transit et d’Orientation (CTO) et dans les Familles d’Accueil Transitoires (FAT)’’.
Le porte-parole du CSP aurait été plus crédible s’il avait brandi une plainte de son Mouvement ou celle d’une société civile contre toutes ‘’les dénonciations calomnieuses’’. Se rend-t-il compte qu’il tombe sous le coup au moins de la diffamation et de l’atteinte au moral des troupes et au pire sous la juridiction du procureur chargé du pôle de la cybercriminalité (qui ne blague pas) en affirmant que les FAMa depuis la prise de Kidal se sont livrés à ‘‘des tueries de civils, la décapitation puis le piège des corps pour faire le maximum des victimes, les viols et le pillage de biens de particuliers dont les images circulent à longueur de journée’’ ?
Le CSP gagnerait à mettre à jour son narratif dépassé s’agissant de ‘‘populations autochtones’’ qui auraient entièrement fui, à moins que le mythe de l’invincibilité de l’homme ne s’est avéré un vulgaire mirage, pardon un mythe qui s’est fondu sur le soleil des tropiques. ‘‘Populations autochtones’’ ? Pourquoi pas indigènes ? La quête irrédentiste d’autodétermination ne peut prospérer. Car le Mali est un seul peuple, une seule nation, un seul territoire, UN ET INDIVISIBLE.
C’est pourquoi beaucoup d’observateurs ont l’impression en lisant le bric-à-brac de son porte-parole que le CSP, après sa fuite de Kidal, est dans la fuite en avant par rapport aux crimes commis contre les populations maliennes de Kidal. Pourquoi et quel intérêt a le Mali de vouloir accuser de génocide des rebelles qui sont déjà criminels (et condamnés à mort) aux yeux de la loi malienne. Point ne s’agit d’en ‘‘rajouter aux crimes déjà commis’’ et de trouver des boucs-émissaires des crimes réels, en voulant défendre par anticipation, le CSP passe aux aveux.
PAR MODIBO KONÉ
Info Matin