Le conflit en Ukraine quoiqu’il-en-coûte: le projet de loi budgétaire 2025 en Russie dévoilé lundi prévoit une envolée de 30% des dépenses militaires l’an prochain, confirmant la détermination du Kremlin à poursuivre son offensive, malgré le coût humain et économique.
La publication de ce texte, qui doit être approuvé par le Parlement russe à l’automne avant sa promulgation par Vladimir Poutine, intervient le jour où la Russie célèbre le deuxième anniversaire de l’annexion revendiquée de quatre régions ukrainiennes qu’elle ne contrôle toutefois pas entièrement.
Dans une vidéo diffusée pour “La Journée de la réunification”, Vladimir Poutine a ainsi répété que “tous les objectifs fixés seront atteints” en Ukraine.
Pour cela, le Kremlin a décidé de poursuivre ses lourds investissements en faveur de l’armée.
Les dépenses de Défense vont atteindre en 2025 près de 13.500 milliards de roubles (130 milliards d’euros au taux actuel), selon le projet de loi.
Le budget militaire national avait déjà explosé sur un an de près de 70% en 2024, représentant cette année avec les investissements de sécurité 8,7% du PIB selon Vladimir Poutine, une première dans l’histoire moderne de la Russie.
Depuis 2022, le Kremlin a largement réorienté son économie sur l’effort de guerre, développant à grande vitesse son complexe militaro-industriel, notamment en recrutant des centaines de milliers de nouveaux employés.
Le Kremlin anticipe un conflit long avec l’Ukraine et ne semble pas préoccupé par les risques de dépendance accrue de son économie envers les commandes militaires, au moment pourtant où l’inflation tourne autour de 9%, amputant le pouvoir d’achat des Russes.
Vladimir Poutine avait érigé mi-septembre “le renforcement de la capacité de Défense du pays” et “l’intégration des régions” ukrainiennes occupées en “priorités”.
La somme allouée pour la Défense représentera ainsi en 2025 près d’un tiers des dépenses fédérales totales et plus de deux fois plus que les investissements “de politique sociale”.
Le budget dédié à la sécurité intérieure, qui inclut la police et les services spéciaux en charge notamment de la répression des critiques du Kremlin, va, lui, passer à 3.460 milliards de roubles (33 milliards d’euros), représentant près de 10% des dépenses annuelles de l’Etat russe.
Ce cumul Défense-Sécurité représentera environ 40% du budget. Sans compter de nombreux investissements classés secrets.
– 1,5 million de soldats –
Signe que les dépenses militaires ne sont pas prêtes de diminuer, Vladimir Poutine a signé mi-septembre un décret ordonnant une augmentation de près de 15% du nombre de soldats, le portant à 1,5 million.
Avec cette nouvelle hausse, 1 actif sur 50 en Russie sera désormais dans l’armée qui, d’après des médias russes, deviendrait la deuxième plus grande au monde après celle de la Chine.
Pour gérer “efficacement” les comptes de l’armée, où la corruption reste endémique, Vladimir Poutine a placé depuis mai un économiste, Andreï Belooussov, à la tête du ministère de la Défense. Et de nombreux responsables du secteur de la Défense ont été incarcérés.
Au total, les dépenses fédérales vont passer en 2025 à 41.500 milliards de roubles (environ 400 milliards d’euros).
Pour boucler son budget, le gouvernement a prévu au 1er janvier prochain une augmentation des impôts sur les hauts revenus et les entreprises, un moyen de continuer à financer l’offensive en Ukraine et ses dépenses connexes.
Les pénuries de main d’oeuvre demeurent toutefois problématiques dans un grand nombre de secteurs, ce qui entraîne la surchauffe de l’économie nationale, au point que la patronne de la Banque centrale russe, Elvira Nabioullina, s’est alarmée récemment d’un risque, à terme, de “stagflation”.
Face à l’offensive russe, l’Ukraine, largement dépendante du soutien financier et militaire occidental, prévoit pour sa part de consacrer plus de 60% de son budget l’an prochain pour la défense et la sécurité (48,3 mds EUR).
– Poussée russe dans l’Est –
Depuis l’attaque russe à grande échelle contre l’Ukraine, en février 2022, de nombreuses villes ukrainiennes ont été visées par des bombardements meurtriers réguliers.
Dans la nuit de dimanche à lundi, la capitale ukrainienne, Kiev, a été visée par une nouvelle attaque de drones qui, selon les autorités, n’a cette fois pas fait de victimes.
Sur le front, l’armée ukrainienne est sur la défensive, notamment dans la région de Donetsk, où progressent petit à petit les forces russes, qui ont revendiqué lundi la conquête d’une nouvelle petite localité Nelipivka.
Les troupes de Moscou se rapprochent par ailleurs dangereusement de Pokrovsk, ville minière située sur un axe stratégique pour la logistique de l’armée ukrainienne.
Pour tenter d’inverser la tendance, l’Ukraine a lancé le 6 août une attaque dans la région russe de Koursk, plus au nord, s’emparant de plusieurs centaines de kilomètres carrés, mais sans réussir à ce stade à contraindre Moscou à y redéployer suffisamment de troupes pour soulager le front.