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Restauration de l’autorité de l’état : Enjeux et défis

Aux lendemains de l’élection présidentielle qui a consacré le retour à l’ordre constitutionnel, il fusait de partout à travers le monde des interrogations angoissées sur l’énorme défi de restauration de l’autorité de l’État que devait affronter fatalement le nouveau régime.

 

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C’est que le Mali était depuis plusieurs mois confronté à une crise d’autorité civile et militaire sans précédent avec notamment, l’avènement sanglant d’une oligarchie putschiste ne répondant qu’au seul instinct de prédation aux soubassements profonds de l’appât du gain facile : rackets, intimidations, meurtres crapuleux ou rituels, enlèvements, saccages de biens privés et publics, détournements de toutes natures, que d’actes criminels et odieux subis par le brave peuple dans une ambiance d’impunité générale pour les coupables.

 

 

Dans ce contexte d’héritage lourd de menaces, comment le nouveau pouvoir issu d’un plébiscite exemplaire allait-il faire face à la forteresse de Kati devenue presque un État dans un État ? Comment le président IBK et son régime comptaient-ils transformer leur légitimité découlant du suffrage universel en une légitimité institutionnelle incontestée, respectée et obéie ? Le défi était historique. Une immense gageure.

 

 

Mais c’était sans compter avec la détermination du nouveau Chef de l’État et le professionnalisme républicain de son Ministre de la Défense Soumeylou Boubèye Maïga, fin connaisseur de l’environnement militaire.

 

 

En un temps record, le Mali et le reste du monde furent témoins d’une extraordinaire opération de reprise en main de l’autorité de l’État à travers une stratégie en trois actes qui marqueront sans doute l’histoire du pays.

 

 

ACTE 1 : OPÉRATION SANIYA

Le 30 septembre 2013, les Maliens apprennent avec stupéfaction l’éclatement d’une nouvelle mutinerie à Kati. Le noyau dur qui a organisé le coup d’État explose et s’adonne à cette occasion à un piteux et sanglant règlement de compte, au moment où le nouveau Président de la République fraichement investit était en tournée internationale.

 

 

Face à cette situation brusque et menaçante, le Ministre de la Défense temporise, fait semblant de négocier et gagne du temps en attendant le retour à Bamako du Chef suprême des armées.

 

 

Les mutins euphoriques et naïfs font monter les enchères en lançant des ultimatums à leur tutelle. Le président de la République qui rappliqua dare-dare consulte à tout va et donne des directives de fermeté en s’adressant au peuple. Il oppose la légitimité à l’aventure. A partir de ce moment l’implacable machine mis en œuvre par le Ministre de la Défense se met en marche. En quelques heures, les mutins sont neutralisés, le général Sanogo et ses hommes désarmés et la garnison de Kati récupérée. L’opération Saniya a vécu, une réussite spectaculaire qui a été rendue possible grâce à l’adhésion des chefs de l’armée acquis à la cause sacrée de la République.

 

 

ACTE 2: L’ARRESTATION DE SANOGO

Se croyant intouchable malgré l’arrivée d’un pouvoir démocratiquement élu, le Général Sanogo a manqué à deux reprises de jugement politique qui lui a été fatal.

 

 

Primo : à l’occasion de l’attaque dont lui et ses partisans avaient fait l’objet lors de la mutinerie du 30 septembre, il n’a pas résisté à la tentation de renouer avec ses pratiques de justice expéditive et privée au moment même où l’État dans ses prérogatives régaliennes avait mis en place une opération de neutralisation des mutins.

 

 

En liquidant avec sans froid ses adversaire (en tous cas c’est la lourde présomption de culpabilité qui pèse désormais sur lui), il a voulu perpétuer ainsi une pratique criminelle de règlement de compte inacceptable dans une République. Les temps avaient changé et le Général Sanogo ne l’avait pas compris.

 

 

Secundo : pendant des semaines, il a créé et entretenu sciemment un feuilleton de défiance vis-vis de l’État en refusant ostensiblement de répondre à une convocation de justice. Ses partisans qui crient aujourd’hui à l’injustice ont-ils réfléchi un instant à ce qui serait advenu du Mali, son État et sa République si le refus méprisant de déférer à une convocation de la justice devait triompher. Notre pays a été pendant des semaines la risée du monde “quoi, disait-on dans les chancelleries… c’est encore Sanogo qui commande ce pays malgré une élection présidentielle démocratique” ?

 

 

Pour son honneur et sa crédibilité, l’État devait réagir avec vigueur, fermeté pour donner une mémorable leçon au général récalcitrant et par extension à tous ceux qui seraient à l’avenir tentés de suivre son exemple. La détermination du Chef de l’État a été exemplaire. L’engagement et le sang froid du Ministre de la Défense a fait le reste. L’ex-seigneur de Kati fut interpellé sans bavures.

 

 

ACTE 3 : PRÉSENTATION D’UN AGENDA CRÉDIBLE DE LA REFONDATION DE L’ARMÉE MALIENNE

Au moment où certains esprits subversifs et antinational dissertent avec irresponsabilité et inconscience sur une hypothétique relance de la guerre des bérets (rouges et verts), consécutive aux conditions de l’arrestation de Sanogo, voilà le chef suprême des armées qui instruit à son Ministre de la Défense de présenter au public les contours impressionnants de l’agenda de réorganisation, de l’armée républicaine.

 

 

En ce lundi 2 décembre 2013, le Ministre de la Défense a convié ses collaborateurs et la communauté internationale à une séance inédite d’échanges sur un document qui va bouleverser la donne militaire au Mali dans les prochaines années. Adapter la défense nationale, équiper et soutenir l’armée, entrainer les forces, améliorer la gestion des ressources humaines, promouvoir la condition militaire, créer progressivement un service national des jeunes et un service de réserve, développer l’instruction et la formation, se préparer aux engagements de demain, inscrire l’outil militaire malien dans une perspective régionale, voilà le challenge historique décliné à la hiérarchie par le pouvoir politique. Et au delà à tout le peuple malien qui est invité à se mobiliser autour de cette mission historique qui transcende les petites querelles personnelles et des règlements de compte de nature politicienne (les grands hommes discutent des principes, les hommes moyens discutent des idées et les médiocres discutent des gens, disait Jules Romain).

 

 

Les affaires militaires sont très sérieuses. Les défis sécuritaires qui se posent à la nation sont immenses. Le temps n’est-il pas venu de tourner la page de l’agitation inutile et dangereuse pour encourager et aider les grands chantiers de la renaissance nationale par amour de la patrie et par devoir envers la prochaine génération ?

 

 

Ce qui fait la différence entre un homme d’État et un politicien, c’est que le premier pense à la prochaine génération, le second pense à la prochaine élection.

Le président de la République et son Ministre de la Défense ont posé des actes fondateurs d’une nouvelle République. Aux démocrates et républicains d’y souscrire sans réserve.

 

 

Daouda K. TRAORÉ, chercheur en sciences politiques, Bamako

SOURCE: Soir de Bamako

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