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Réorganisation territoriale: ce que veut IBK, sa vision et son projet 2015-2024

Les conférences régionales sur les avant-projets de réorganisation territoriale qui ont commencé ce mardi 13 novembre, se poursuivent sur l’ensemble du territoire. Pour le Gouvernement, elles s’inscrivent dans la volonté de poursuivre la réforme territoriale mise en chantier par la Loi n° 2012-017 du 2 mars 2012 portant création de circonscription administrative en République du Mali. Au cours de ces assises régionales, rassure le Gouvernement, il n’y aura pas de nouvelles régions en dehors de celles prévues par ladite loi.

Pour couper court à la controverse, le Premier ministre monte au créneau : à travers cette réforme « nous mettrons en œuvre la Loi de 2012, intégralement et sans modification. Nous ne créerons pas de nouvelles régions ».

Doit-on tirer l’enseignement qu’en se limitant à mettre en œuvre « intégralement et sans modification » l’opérationnalisation des régions créées par la loi-ATT, le régime du Président IBK n’a ni vision ni projet en matière de réorganisation du territoire ?

La reforme ainsi envisagée, mais fortement polluée par les manœuvres de coulisses et les ambitions contrariées, l’instrumentalisation du débat au service d’agenda politique, semble mettre le régime du Président IBK dans les cordes qui fait face à des échéances incompressibles au plan de la conduite des reformes.

Mais, en organisant ces concertations pour relancer le débat sur les voies et moyens du comment rapprocher l’Administration des populations et donner une plus grande efficacité à l’Administration, le régime qui adopte un Document Cadre de Politique Nationale de Décentralisation (DCPND), couvrant la période 2015-2024, prouve qu’il n’est pas absent du terrain de la vision, du projet et de la prospective.Que recouvrent la vision et le projet du Président IBK en matière d’organisation territoriale ?

La crise politique et sécuritaire que le Mali a connue en 2012 a remis en avant la dimension politique de la décentralisation, ainsi que la nécessité de renforcer le processus, afin de relever, dans le cadre de la refondation de l’État, les défis liés au développement, à l’unité nationale et à l’intégrité du territoire.

Déclinant sa vision dans son Projet présidentiel ‘’le Mali d’abord’’, le Président IBK dit qu’elle est celle d’un État fort, au service de l’efficacité. Cet État fort, responsable et protecteur, explique-t-il, devra garantir à chaque citoyen un égal accès aux soins, à l’éducation, et à tous les services publics, sur l’ensemble du territoire.

Le Président IBK est et reste convaincu que cette vision ne pourra s’accomplir que dans la proximité avec les citoyens. Aussi, estime-t-il que si l’une des causes de la crise multidimensionnelle qu’a connue notre pays à partir de 2012 est la déliquescence de l’État, elle offre toutefois l’opportunité historique de refonder l’État.

 

Comment ?

Le Président IBK pense que 20 ans après sa mise en chantier, la réforme de la décentralisation a profondément changé le visage de notre pays. Elle a transféré aux collectivités territoriales des pouvoirs importants dans tous les domaines. Le Maire, a dit le PM, dans son discours d’ouverture des assises de la décentralisation, est devenu un personnage familier, au cœur de la mise en œuvre des politiques sociales de l’État.

Pour autant, pour autant !

Le Président IBK pense, sous le contrôle de tous les experts, qu’il urge de corriger les insuffisances constatées, les dysfonctionnements qui se sont multipliés, des frustrations qui se sont accumulées dans la mise en œuvre de la réforme. Pour lui, « il faut apporter des réponses définitives aux frustrations qui alimentent l’irrédentisme de certains de nos frères touareg ».

 

I.LA VISION

D’IBK

Pour le locataire de Koulouba, « une part essentielle des propositions qui permettront de réconcilier les communautés qui forment la Nation gît dans un approfondissement de la décentralisation des pouvoirs publics ».

Pour mieux accorder le possible et le souhaitable, il propose que la réforme soit soumise à nouveau à l’examen, à la lumière de l’expérience accumulée et des nouveaux défis à relever, afin de formuler des recommandations propres à corriger les dysfonctionnements constatés et de définir les axes d’un approfondissement de la politique de décentralisation.

 

Objectif : assurer une meilleure adéquation entre les ressources transférées et les fonctions assumées pour conserver au dispositif mis en place sa crédibilité. La vocation économique de la Région devant être réaffirmée, car la Région dans sa vision doit servir de point nodal pour accélérer le développement.

Pour le Président IBK, régionaliser, c’est, reconnaître une prééminence du niveau régional pour coordonner et intégrer les politiques de l’État et les programmes des collectivités territoriales, dans le respect de l’autonomie de celles‐ci et de leurs compétences respectives. La Région doit être assez forte pour développer des fonctions que les communes ne peuvent envisager, mais proche d’elles pour aider à mettre en œuvre les projets et faire émerger des priorités adaptées et partagées.

 

A.Fondement

Les défis auxquels fait face le Mali post-crise fondent le régime du Président IBK dans sa politique de renforcement de la décentralisation. Ces défis nouveaux sont au nombre de 5 :

 

  1. La stabilité et de la paix sociale

Après la crise multidimensionnelle de 2012-2013, le grand défi pour le Mali est de s’engager durablement dans la voie de la réconciliation, de la refondation et de la reconstruction du pays.

Bien que ce défi ne soit pas propre à la reforme territoriale et ne puisse pas être entièrement pris en charge dans ce cadre uniquement, pour le régime du Président IBK, les collectivités territoriales se doivent d’intégrer la dimension sécuritaire dans leurs actions, en veillant à une distribution judicieuse des rôles et responsabilités entre les différents acteurs locaux. Les collectivités territoriales doivent devenir un des piliers d’une nouvelle approche de gestion des questions de paix et de sécurité qui permettra à la fois de contribuer à la stabilité du pays, de renforcer le processus démocratique et de pérenniser le développement économique, social et culturel, aux niveaux local et régional.

 

  1. Le développement territorial cohérent, équilibré et durable

Clairement affichée dans le cadre du Programme National d’Appui aux Collectivités Territoriales (PNACT 3), la dynamique de développement économique des collectivités territoriales devra s’inscrire plus explicitement dans la perspective du développement durable conçu, mis en œuvre et évalué en fonction de ses 3 dimensions : économique, sociale et environnementale. En se basant sur les spécificités propres à chaque région, il s’agira de valoriser le potentiel dont regorgent les territoires dans la perspective de création de richesses, grâce à une dynamique de production, de transformation et de distribution susceptible de soutenir la création continue d’emplois, notamment l’emploi des jeunes.

Le rôle de la Région dans le développement économique territorial sera renforcé pour mieux prendre en compte sa position d’interface dans la territorialisation des politiques publiques. Ainsi, un accent sera mis sur l’aménagement du territoire dans le dialogue entre l’État et les collectivités décentralisées pour un développement territorial cohérent.

En outre, la mobilisation du secteur privé, afin de créer la richesse endogène capable d’impulser le développement économique, demeure un défi important à relever pour la prochaine décennie.

 

  1. La gouvernance inclusive du territoire

La gouvernance démocratique du territoire constitue un défi majeur à relever. Il paraît désormais primordial d’asseoir et de renforcer des mécanismes de gouvernance à l’échelle régionale et locale qui confortent la légitimité des collectivités territoriales. Ces mécanismes devront permettre une meilleure prise en compte des citoyens, des organisations de la société civile dans la gestion des affaires publiques, y compris celles relatives à la sécurité du pays, à la prévention et à la gestion des conflits. Ce défi renvoie également aux questions liées à la reconnaissance du rôle important des autorités traditionnelles dans la gestion locale, la redevabilité des élus des collectivités territoriales vis-à-vis des citoyens.

 

  1. L’offre de services de qualité aux populations

Le constat est que les collectivités territoriales sont confrontées à des difficultés financières, matérielles et humaines qui les empêchent d’assumer correctement leurs missions axées sur l’amélioration des services de base aux populations. Cela renvoie à l’épineuse question du transfert des compétences et surtout des ressources de l’État aux collectivités territoriales pour leur permettre de satisfaire aux besoins des populations. Bien que le Gouvernement ait engagé des actions tendant à concrétiser le processus de transfert, il est évident aujourd’hui que les résultats sont mitigés, vu le rythme lent imprimé au processus. Aujourd’hui, il s’agit de rendre l’État efficace aussi bien dans son mode décentralisé que dans son mode déconcentré, en replaçant l’usager/le citoyen au centre de la délivrance des services publics de proximité.

L’enjeu principal est le rétablissement de la confiance entre les citoyens usagers des services publics et les administrations décentralisées et déconcentrées.

Au-delà de la question des transferts de compétences et de ressources, d’autres aspects tels que la coopération inter collectivités, la disponibilité de statistiques fiables et l’exercice de contrôle efficace sur la délivrance des services de proximité constituent de véritables défis à relever.

 

  1. Le financement soutenable de la décentralisation à partir des ressources domestiques

Le besoin d’accroître les ressources financières des collectivités territoriales «hors appuis extérieurs» demeure important. La réforme de la gestion des finances publiques avec un accent particulier sur la décentralisation financière permettra d’accroître significativement les ressources des collectivités territoriales. Pour ce faire, certaines options devront être envisagées : i) le transfert d’impôts et taxes, ii) les transferts budgétaires conséquents (garantis par voie législative), iii) la mobilisation de financements innovants (prêts, partenariat public-privé, etc.).

En somme, seul un accroissement rapide et substantiel de l’effort budgétaire de l’Etat à l’endroit des collectivités territoriales pourrait éviter que ce processus ne devienne de plus en plus fragile, et artificiellement entretenu par l’aide extérieure, avec le risque de subordonner les choix et les options d’une politique publique nationale à ceux des partenaires techniques et financiers extérieurs.

 

B.Les grandes lignes

Ce nouveau cap fixé exige la formulation d’une nouvelle vision et l’adoption d’une nouvelle orientation politique pour le renforcement de la réforme.

Nonobstant le projet « le Mali d’abord », la vision de la décentralisation du Président IBK pour la période de 2015 -2024 est issue, comme nous l’avons vu, des États Généraux de la décentralisation. Elle met la régionalisation au centre du développement institutionnel et territorial du Mali et focalise la contribution des collectivités territoriales sur le renforcement de la paix, de la sécurité, de la gouvernance démocratique et du développement durable. La Région est désormais vue comme l’échelle de mise en cohérence du développement socio- économique du Mali et le niveau pertinent de gestion des équilibres entre les territoires, valorisant les ressources et potentialités des collectivités territoriales.

Les nouvelles lignes directrices de la politique qui en découle s’articulent autour des éléments suivants :

-un rôle plus important de la région dans le développement territorial ;

-une gouvernance qui donne confiance à la population ;

-un partenariat renforcé entre l’État et les collectivités territoriales.

 

Ces lignes directrices sont portées par l’État et les collectivités territoriales avec l’ambition commune de renforcer le processus de décentralisation à travers la création d’un environnement favorable au développement économique régional et local, l’amélioration des capacités internes de financement de la décentralisation, la promotion de l’expression des diversités socioculturelles, le renforcement de la citoyenneté locale et l’affermissement des principes démocratiques dans la gestion des affaires publiques au niveau régional et local.

Dans la réforme telle qu’envisage le Président IBK, les régions se verront octroyer d’importantes responsabilités. Aussi, le Gouvernement central en tient-il compte dans ce projet de réorganisation aujourd’hui proposé, tant pour sa représentation sur le territoire, et ses services déconcentrés, que pour les administrations centrales.

 

C.L’articulation

Le consensus politique pour une « décentralisation renforcée », dégagé par les États Généraux de la Décentralisation tenus les 21, 22 et 23 octobre 2013, a mis donc la régionalisation au centre de la décentralisation et du développement institutionnel au Mali.

Dans cette dynamique, le Gouvernement a adopté, en mars 2014, un Document Cadre de Politique Nationale de Décentralisation (DCPND 2014-2015) assorti d’un plan d’actions prioritaires pour 2014.

Au nombre des actions devant être réalisées à court et moyen termes, le Gouvernement a affiché sa volonté de faire de la régionalisation une nouvelle opportunité pour un développement équilibré du territoire national.

Au-delà de sa dimension administrative liée à l’érection des régions en collectivités territoriales, la régionalisation participe de l’approfondissement de la décentralisation. Elle vise notamment à renforcer la légitimité des élus régionaux et accroître leur maîtrise du développement de leurs territoires. À ce titre, il a été introduit dans le droit électoral le mode de scrutin direct pour l’élection des organes délibérant et exécutif de la Région et du District et l’élection du conseiller, à la tête de la liste majoritaire, comme maire de la commune, président du conseil régional ou maire du District de Bamako ainsi que la possibilité d’une seconde prorogation de six (06) mois des mandats des conseils communaux, de cercles et régionaux, comme palliatif à la mise en place de délégations spéciales.

Le Gouvernement qui a approuvé le 10 février 2016 un Document Cadre de Politique Nationale de Décentralisation (DCPND) pour la période 2015- 2024 qui propose la régionalisation comme nouvelle phase de la réforme de décentralisation a donc ouvert la voie à l’instauration de nouveaux rapports entre le Gouvernement central et les collectivités territoriales basés sur le partenariat et la régulation.

 

LE PROJET

D’IBK

La régionalisation qui est sans nul doute pour le Président IBK une nouvelle étape de la décentralisation ambitionne de faire revivre les territoires, contribuera à promouvoir un développement plus inclusif permettant aux diversités locales et régionales de s’exprimer librement tout en restant ancrées dans un ensemble plus grand qu’est l’État, garant de l’unité et de la souveraineté nationale.

Pour le Président IBK, le choix de la régionalisation est celui de l’avenir, c’est-à-dire un Mali uni, en paix et fier de ses diversités dans lequel les citoyens auront davantage confiance dans leurs institutions qui seront au service d’un développement durable, d’une économie diversifiée, d’un système de santé et d’éducation plus performant, d’un environnement plus sain et d’une plus grande solidarité entre les communautés.

Ce choix est d’autant plus pertinent qu’il a été rappelé par le Président de la République le 16 avril 2014, lors du premier Conseil des ministres du Gouvernement MARA. À cette occasion, le Président IBK, dans le souci de construire un État unitaire fort et décentralisé, a fixé l’option et l’agenda : « il vous faudra, Monsieur le Premier ministre, aller plus loin, pour élaborer une Déclaration de Politique générale, à valider dans les plus brefs délais par la représentation nationale, et qui soit le prélude à un travail profond de réflexion stratégique, permettant, au-delà de la relance de l’économie, de produire et faire valider le business-plan du Mali émergent.

Ce plan, qui sera celui de la présente mandature, reposera sur le socle de la régionalisation, étape majeure d’une politique de décentralisation qui, face aux frémissements du pays, n’est pas un luxe, mais un impératif.

Dans ce cadre, Monsieur le Premier ministre, j’instruis que soit immédiatement créée, dans chacune de nos régions, une Agence de développement régional, avec un portefeuille d’actions, des ressources identifiées et des partenaires stratégiques. Et que dans un délai de 6 mois, les états des lieux soient faits, les opportunités identifiées, et les plans régionaux horizon 2025 ficelés. Je veux, dès janvier 2015, que le Mali soit en chantiers perceptibles et visibles partout, de Kayes à Kidal et de Labezanga à Niono. Le développement humain et harmonieux dans tous les coins et recoins du Mali, telle doit être notre dédicace ! »

 

A.Mise en oeuvre

Par la mise en œuvre de l’approfondissement de la décentralisation, à travers la régionalisation, l’ambition du Président IBK est de :

 

1 : Promouvoir le développement territorial équilibré des régions et des pôles urbains en donnant plus de cohérence au développement territorial, la promotion d’une économie régionale créatrice de richesses et d’emploi, la promotion des villes comme pôles de croissance et de développement.

 

1.1 : Réorganiser le territoire pour asseoir la cohérence du développement territorial régional.

La révision du découpage territorial autour de la Région à travers un dialogue inclusif, est la voie appropriée dans le contexte actuel pour créer des collectivités territoriales en capacité de prendre en charge à la fois les défis sécuritaires, sociaux et économiques. Il s’agit de rationaliser l’organisation territoriale du Mali et de régler la question de la pertinence de la Collectivité Cercle. Cette révision doit se faire avec une forte implication des autorités traditionnelles afin de prendre en compte les réalités socioculturelles des territoires. À cet effet, des études complémentaires et approfondies seront réalisées de manière à disposer d’informations pertinentes sur la meilleure option de réorganisation territoriale en termes de cohérence dans la délivrance du service public, de potentialités économiques, d’échelles pertinentes de promotion du développement économique.

 

1.2: Développer une économie régionale et territoriale afin de créer des richesses et des emplois aux niveaux régional et local.

L’objectif ici est de créer un environnement favorable à la création de richesse et d’emplois au niveau régional et local. À cet effet, il s’agit de doter les collectivités Régions de moyens (humains et financiers) pour l’identification et la mise en œuvre de projets productifs et structurants. Aussi, il sera important de mettre en place un cadre favorable à la libération des énergies et des initiatives locales, notamment celles du secteur privé, dans le but de dynamiser les économies locales, en faisant de chaque collectivité région un espace d’initiatives et de valorisation des ressources et des savoirs- faire locaux.

 

1.3 : Promouvoir une politique volontariste et anticipatrice de la ville fondée sur la détermination du statut, de la vocation et des fonctions des différents types d’agglomération sur le territoire.

Avec une population urbaine dont la croissance est notoirement rapide, les villes maliennes représentent le condensé de tous les problèmes de développement du pays. L’attirance qu’elles exercent sur le milieu rural fait qu’on assiste à une urbanisation accélérée (de l’ordre de 22,5%) et mal maîtrisée avec son corollaire de mal vivre généralisé (habitat spontané, chômage, banditisme, exclusion sociale, pauvreté et mendicité…). En cherchant à faire des villes des pôles de croissance et de développement, la nouvelle politique de décentralisation affiche l’ambition de repositionner les collectivités territoriales au cœur du développement urbain. Une stratégie claire de promotion des pôles de croissance et développement sera élaborée et mise en œuvre. Elle s’appuiera sur le partenariat public-privé comme un des leviers d’impulsion des pôles de croissance et de développement. Elle s’adossera sur la Politique Nationale de la Ville (PONAV) et la Stratégie de Développement des Villes du Mali (SDVM).

 

  1. Améliorer la qualité des services rendus par les collectivités territoriales en rendant les collectivités territoriales plus performantes dans la fourniture des services aux populations à travers des transferts significatifs de compétences et de ressources, le renforcement des capacités du personnel et la valorisation de la fonction publique des collectivités territoriales

 

2.1 : Rendre la fonction publique territoriale attractive.

Il s’agit ici, à travers une fonction publique des collectivités territoriales plus attractive, de créer les conditions favorables aux collectivités territoriales afin qu’elles aient une administration performante, capable de gérer efficacement leurs affaires propres et répondre aux nombreuses attentes des citoyens. Il s’avère nécessaire de créer les conditions de motivation du personnel des collectivités territoriales (conditions et modalités d’allocation de primes et indemnités, y compris les indemnités de déplacement).

 

2.2: Développer les capacités des ressources humaines des collectivités territoriales.

Pour que la décentralisation puisse se mettre à hauteur des défis qu’elle doit relever, les acteurs doivent être en mesure d’assumer pleinement leurs rôles et responsabilités. Il s’agit, en premier lieu, de disposer des ressources humaines compétentes et motivées, en particulier au niveau des collectivités territoriales.

Le développement des capacités devrait être considéré systématiquement comme un processus continu, flexible et apportant des réponses pertinentes, et non comme une somme d’actions isolées et ponctuelles sans amélioration vérifiable des savoirs faires et des savoirs être.

D’une part, les élus locaux doivent disposer des capacités requises pour leur permettre d’assurer leur mission de gestionnaire local. D’autre part, les agents des collectivités territoriales doivent également justifier des expertises indispensables pour le fonctionnement des services des collectivités territoriales. L’évaluation des ressources humaines sera instituée comme à la fois un moyen d’appréciation des performances des agents et une stratégie de ciblage des actions de renforcement de capacités en leur faveur.

 

2.3 : Accélérer les transferts de compétences et de ressources en vue d’améliorer l’offre de services aux citoyens.

Les transferts des compétences et des ressources, bien que déjà amorcés (notamment dans les secteurs de la santé, de l’éducation et de l’hydraulique), ont besoin d’une nouvelle impulsion pour s’élargir à d’autres domaines et accélérer le rythme des transferts de ressources (financières, humaines et matérielles) liées aux compétences transférées. Des dispositions spécifiques devront être prises tant au niveau central de l’État que des services déconcentrés pour rendre effectifs les transferts de compétences et de ressources dans tous les domaines de compétences des collectivités territoriales. Dans cette perspective, une meilleure coordination et cohérence sera recherchée entre la mise en œuvre des programmes sectoriels de l’État et l’exécution des programmes de développement des collectivités territoriales.

 

  1. Renforcer l’accompagnement de l’État.

Une meilleure présence de l’Etat aux côtés des collectivités territoriales devra se traduire par une déconcentration plus efficiente des services de l’État sur le territoire se traduisant par un contrôle systématique et de l’évaluation des collectivités territoriales.

 

3.1 : Rendre plus efficiente la déconcentration.

La déconcentration qui permet à l’État de se rapprocher des citoyens, exige de plus grandes ambitions afin, d’une part, d’assister efficacement les collectivités territoriales dans l’élaboration et la mise en œuvre de leurs plans et programmes de développement en conformité avec les politiques publiques sectorielles et, d’autre part, d’assurer plus de territorialisation des politiques publiques.

Le renforcement de la déconcentration doit se traduire par l’octroi de crédits de fonctionnement suffisants aux services déconcentrés et par une réorganisation et une rationalisation de la représentation de l’Etat sur le territoire. Un certain nombre de textes réglementaires ont récemment été adoptés, parmi lesquels on peut citer notamment le Décret n°2015-0067/P-RM du 15 Février 2015 fixant les conditions de nomination et les attributions des chefs de circonscription administrative.

Une optimisation de l’accompagnement de l’État pourrait se faire à travers un transfert complet de certains services opérationnels aux collectivités territoriales afin de doter ces dernières de moyens opérationnels nécessaires à un plein exercice de la maîtrise d’ouvrage du développement local et régional.

 

3.2 : Systématiser le contrôle interne et l’évaluation externe des collectivités territoriales afin d’accroître la redevabilité des élus.

Les autorités de tutelle éprouvent des difficultés à jouer convenablement leur rôle de contrôle de légalité dans la décentralisation. Cela fait que la fonctionnalité des collectivités territoriales est aujourd’hui affectée par des pratiques illégales non sanctionnées (par exemple la gestion foncière), qui compromettent à bien des égards l’atteinte des objectifs de la décentralisation. Il s’agit de doter la tutelle davantage de moyens lui permettant d’assurer un meilleur suivi des collectivités territoriales.

L’exercice de la tutelle doit s’exprimer plus fortement et plus régulièrement à travers les missions d’inspection sur le terrain pour diagnostiquer in situ les problèmes des collectivités territoriales. Pour ce faire, la tutelle doit être outillée et ses moyens renforcés (humains, financiers et logistiques) afin que les représentants de l’État puissent jouer pleinement leur mission de contrôle régulier de la gestion des collectivités territoriales.

Les services rendus aux populations, sous maîtrise d’ouvrage des collectivités territoriales, ne doivent aucunement s’initier et être réceptionnés dans l’indifférence totale des représentants de l’État et des populations. Malheureusement, cette situation déplorable s’installe progressivement dans la plupart des collectivités territoriales. Il en résulte de nos jours une dégradation de plus en plus accentuée des infrastructures et équipements acquis il y a quelques années. Cette tendance pourrait être inversée en mettant en place des mécanismes de contrôle ainsi que l’obligation de rendre compte.

 

  1. Renforcer la gouvernance inclusive du territoire par une gouvernance territoriale qui valorise les légitimités traditionnelles, améliore la participation et le contrôle des citoyennes et citoyens, et fait de la sécurité intérieure une affaire collective qui implique fortement les collectivités territoriales et les citoyens.

 

4.1 : Renforcer l’implication des chefs de village, de fraction et de quartier dans le processus de gestion des affaires publiques locales.

La collaboration entre les collectivités territoriales et les autorités traditionnelles reste fragile malgré les dispositions législatives et réglementaires prévues dans les textes de la décentralisation en vigueur. Il est important que la place des chefs de village, de fraction et de quartier, dans la gestion des affaires locales, soit désormais valorisée à travers le renforcement de leurs attributions.

Les collectivités territoriales doivent chercher à renforcer l’implication de la population pour permettre l’expression des différentes légitimités et ainsi limiter les sources de conflits. Il s’agit notamment d’assurer la participation des chefs de village, de fraction et de quartier, des représentants des associations locales et des organisations socioprofessionnelles aux sessions des organes délibérants des collectivités territoriales. Dans ce registre, les chefs de village, de fraction, de quartier, et leurs conseils seront en situation d’assumer leurs attributions d’intermédiation entre l’Etat et les communautés de base, conformément aux dispositions de la Constitution et du Code des Collectivités Territoriales.

 

4.2 : Améliorer la gouvernance de la sécurité au niveau régional et local.

À la lumière de la crise sécuritaire et institutionnelle, il importe désormais d’instaurer une gouvernance inclusive de la sécurité au niveau régional et local. En effet, l’expérience a montré qu’il n’y a pas de développement durable sans sécurité fiable et inversement. Aussi, l’implication plus visible des collectivités territoriales permettra de bâtir un développement durable sur une sécurité fiable adaptée aux spécificités locales. Il s’agit de redéfinir les pouvoirs, les compétences et le champ d’intervention des collectivités territoriales en matière de sécurité.

 

4.3 : Améliorer la transparence, la redevabilité et la collégialité de la gestion publique.

Comme toute grande réforme, la décentralisation n’atteindra ses objectifs que si elle continue de bénéficier de l’adhésion des populations. Si la reforme a mobilisé, lors de sa conception et au début de sa mise en œuvre, une frange importante de la population, aujourd’hui, les citoyens sont très peu informés du fonctionnement des collectivités territoriales et, en conséquence, exercent très peu de contrôle sur les décisions de leurs élus, d’où la nécessité de ressusciter l’engouement qui a prévalu lors des premières heures de la réforme.

L’indifférence apparente de la population par rapport à la gestion des affaires locales, entre autres, pose avec acuité la question du plaidoyer, de la mobilisation citoyenne dans la consolidation de la démocratie locale, de la solidarité et du vivre ensemble, et dans la mobilisation des ressources internes des collectivités territoriales.

Les organisations de la société civile doivent poursuivre sans relâche le plaidoyer et l’éducation au civisme et à la citoyenneté afin de mobiliser la population autour du projet communal. La reconstruction de la citoyenneté s’impose et doit devenir une exigence de la tutelle qui doit amener les maires à faire respecter les dispositions prévues en matière de consultation et de restitution publique.

 

4.4: Améliorer l’intégration du genre dans la gestion des collectivités territoriales.

Aucune gouvernance inclusive ne peut ignorer l’approche genre qui implique la prise en compte des femmes, des jeunes, des handicapés et autres couches sociales plus ou moins marginalisées dans la gestion locale.

Cette prise en compte doit se refléter non seulement en termes de participation aux responsabilités locales, mais aussi en termes de satisfaction de besoins catégoriels dans l’offre de service au niveau local. Ceci se traduira par l’affectation de ressources budgétaires pour soutenir la programmation d’investissements spécifiques en leur faveur.

 

  1. Améliorer le financement de la décentralisation par l’augmentation significative des dotations financières de l’État aux collectivités territoriales, le renforcement de la fiscalité des collectivités territoriales pour améliorer leurs ressources propres et l’amélioration des mécanismes d’aide des partenaires techniques et financiers aux collectivités territoriales.

 

5.1: Procéder à une allocation substantielle et garantie des dotations budgétaires de l’État aux collectivités territoriales.

La part du budget national destinée au financement des collectivités territoriales en 2014 représente 9,9% des recettes de l’État. Cette situation fragilise le processus de décentralisation et limite le champ d’initiatives des collectivités territoriales. Une augmentation significative et progressive de la part des ressources publiques gérées par les collectivités constitue un enjeu majeur à moyen terme. Cela permettra aux collectivités territoriales de se doter des moyens (humains, financiers et patrimoniaux) nécessaires pour une exécution correcte de leurs missions. Des financements innovants seront mis en place en vue d’accroître les flux de capitaux aux fins d’investissements structurants dans les collectivités territoriales.

 

5.2 : Renforcer la fiscalité locale.

La réforme de la gestion des finances publiques avec un accent particulier sur la décentralisation fiscale permettra sans doute d’accroître significativement les ressources des collectivités territoriales. Par ailleurs, la promotion du développement économique local élargira à terme l’assiette fiscale des autorités locales.

5.3 : Améliorer la mobilisation de l’Aide publique au Développement.

Il s’agit de faire des collectivités territoriales le point d’entrée d’une partie de l’aide publique en faveur du Mali, afin d’améliorer la gouvernance locale et régionale et de parvenir à une appropriation par les populations qui doivent être pleinement intégrées dans le processus. Pour ce faire, il s’agit d’adapter le financement des programmes et plans sectoriels aux réalités de la décentralisation en faisant respecter la mission et la responsabilité de gestion de la maîtrise d’ouvrage du développement local et régional dévolue aux collectivités territoriales. Ainsi, l’Aide budgétaire décentralisée pour les collectivités, sur la base de leurs instruments et documents de planification au niveau régional, est l’innovation majeure à développer.

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Info-matin

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