La première du genre pour votre journal et aussi celle qu’il accorde à un journal privé depuis la crise qui l’oppose au Chef de l’Etat. Dans cet entretien exclusif, en présence de dizaines fidèles qui après la prière de l’Asr, se sont installés confortablement dans la mosquée, ainsi que sa cour pour écouter l’érudit, le sage de Nioro parle de ses relations avec IBK du temps où il était Premier Ministre d’AOK, jusqu’à sa candidature à l’élection présidentielle de 2013 pour laquelle il s’est beaucoup investi sans hésiter en déboursant beaucoup d’argent, a donné des consignes de vote à tous ses fidèles tantau Mali, qu’à l’extérieur. De son vrai nom, M. Mohamédou Ould Cheikana Ahamedah Hamahoula dit Bouyé, l’homme de paix, rassembleur de Nioro du Sahel, patriote dans l’âme, discret, humble, affable, lucide, percutant et précis, dévoile ses relations devenues sulfureuses ces derniers temps avec le Président IBK, sa vision du Mali démocratique, le respect de la dignité humaine, l’égalité de tous devant la loi, le bonheur des maliens pour lesquels, il a soutenu en 2013, le candidat du RPM en qui il croyait sur sa capacité de faire avancer le Mali.
Bref, ce religieux hors pair qui est rarissime en propos, peu bavard, n’intervenant dans la politique que s’il est sollicité, mais très attentif à la gestion du pays, explique pour la première fois, depuis qu’il y a eu rupture avec le locataire de Koulouba, les vraies raisons de ce divorce total Ladji Bourama, dont il jure de combattre…, explique également son dévolu mis sur Alou Diallo, premier candidat à l’avoir abordé, ensuite au second tour, sur Soumaila Cissé, lors de la présidentielle du 29 juillet 2018. Lisez plutôt l’interview vérité réalisée par Bokari Dickoi, envoyé spécial à Nioro du Sahel.
Mali Demain : L’élection présidentielle qui vient de se dérouler il y a peu, s’est achevée par une crise électorale puisque le candidat Soumaila Cissé ne reconnait pas la victoire d’IBK. Quand pensez-vous en tant que Malien d’abord, ensuite en tant que leader religieux ?
Mohamédou Ould Cheikana Ahamedah Hamahoula dit Bouyé: D’une manière directe, la question que vous venez de me poser, je ne saurai la répondre parce que je ne suis pas membre d’aucun parti politique, encore moins un politicien. Quant aux candidats déclarés à la présidentielle, ils ne sont pas non plus, les miens. Ce sont des maliens dont je devrais choisir l’un d’entre eux selon son programme pour le pays. C’est ce qui s’est passé lors de l’élection présidentielle de 2013, cette année-là, la même chose s’est produite. A part cela, je n’ai jamais pratiqué la politique. Ceci n’est pas mon dada. Ces candidats se sont prononcés en fonction de leur programme pour le Mali. C’est fort de cela, que j’ai jeté mon dévolu sur Alou Diallo, qui a été le premier candidat à m’approcher, ensuite sur Soumaila Cissé, lors du second tour. En clair, si un candidat en fonction de ses propos et programme s’explique, s’il est convaincu, je le soutiens. C’est ce qui explique en guise de rappel, mon soutien en 2013 pour le candidat Ibrahim Boubacar Kéïta. C’est une première fois que je soutiens ouvertement un candidat dans notre pays.
Comment avez-vous soutenu IBK ? Pouvez-vous être plus explicite ?
Mohamédou Ould Cheikana Ahamedah Hamahoula dit Bouyé: J’ai soutenu IBK en 2013, en appelant tous mes fidèles à voter pour lui. Mieux, j’ai investi mon argent dans sa campagne. Ces faits se sont produits au vu et au su de tout le monde. Ce n’est pas un secret de polichinelle. D’ailleurs, à l’époque par cet acte que j’ai posé en connaissance de cause, il s’est trouvé des leaders religieux qui m’ont critiqué en disant que je ne devais pas intervenir sur ce terrain de la politique. Je n’ai pas donné d’importance à ces critiques.
Manœuvres pour disqualifier IBK
Lors du premier tour de cette présidentielle de 2013, j’ai appris qu’il y avait des manœuvres tendant à diminuer les voix d’IBK au profit d’un autre candidat afin qu’il ne se qualifie pas pour le second tour. En tout cas, des informations faisant état d’une machination de ce genre. Ce coup rappelle l’élection de 2002 qui a vu IBK, ATT et SoumailaCissé se sont retrouvés. Là, tout a été mis en œuvre pour qu’il ne se qualifie pas pour le second tour. Je vous dis cela parce que, vous m’avez demandé comment j’ai aidé IBK lors de la présidentielle de 2013?
J’ai demandé à tous mes fidèles de voter IBK
J’ai demandé à mes tous mes fidèles partout où ils se trouvent, de voter pour IBK. Aussi, j’ai dépensé beaucoup d’argent pour se faire. Mieux, en apprenant qu’il y avait des manœuvres pour le disqualifier pour le second tour, j’ai appelé la présidente de la Cour Constitutionnelle, Mme Manassa Danioko, la même qui dirige la Cour Constitutionnelle pour la mettre en garde contre toute tentative de disqualifier IBK pour le second tour comme ce fut le cas en 2002. Donc, les nouvelles qui me parvenaient sur cette tentative, m’emmènent à vous dire madame que sachez qu’IBK a des soutiens et non les moindres et que si cela se produisait, je vous combattrai (Manassa et ses collègues), je mettrai le Mali à feu et à sang. Je défie Manassa qui est aujourd’hui aux commandes de la Cour Constitutionnelle, si je ne lui ai pas fait cette mise en garde ferme.
Grosso modo, j’ai aidé IBK en terme d’électeurs, d’argent et surtout du côté de la Cour Constitutionnelle afin qu’on ne le triche pas.
Pourquoi, cette année, vous avez décidé de soutenir un autre candidat autre qu’IBK ?
- Mohamédou Ould Cheikana Ahamedah Hamahoula dit Bouyé: J’ai soutenu IBK en 2013 parce que lors du second et dernier mandat d’ATT, je ne m’intéressais pas à la politique mais, lorsque celui-làa apporté le code de la famille qui portait un grand préjudice à la religion musulmane, j’ai donc pris ma voiture pour aller le voir au palais de Koulouba, pour lui dire toute ma désapprobation sur ce projet gravissime qui portait atteintes à notre religion. Je lui ai donc dit d’arrêter ce projet et que, nous ne sommes pas prêts à accepter car il s’agit de la religion musulmane puisque nous leur avons laissé la gestion du pays mais de là, à s’attaquer à notre religion, cela n’est pas acceptable ! Nous sommes musulmans, tout comme vous mais qui n’aviez pas besoin de vous intéresser à notre religion autant jusqu’à ce niveau alors que pour nous, c’est notre raison d’être. Donc, occupez-vous de vos affaires, nous nous occupons des nôtres : la religion musulmane ! Ce dont nous avons besoin pour notre religion, laisse- nous cela. En ce qui concerne votre pouvoir, mes fidèles et moi, t’avons laissé l’exécuter comme vous le voulez. Donc, mets-toi à l’écart de notre domaine ! Je vous rappelle que ce Code de la famille s’est beaucoup appesanti sur bien de domaines mais tout ce qui concerne la religion musulmane m’intéresse à plus d’un titre. Nous les musulmans n’avons pas besoin qu’on vienne s’immiscer dans notre religion. Le partage de l’héritage dont a fait allusion le Code de la famille, se trouve dans le Coran qui est clair. Tout ce qui peut porter préjudice à notre religion, nous intéresse et sommes prêts à nous battre pour que cela ne se produise pas. Nous les musulmans, n’avons pas besoin qu’on vienne nous dicter des choses qui ne cadrent pas avec le contenu du coran. Cela est inadmissible. Le partage de l’héritage concerne une famille où il y a eu des décès (les parents). Donc, le pays, le pouvoir n’ont rien à voir dans cela. Le partage de l’héritage comme dit le coran, indique que la part de l’homme est égale à celle de deux femmes alors que le code parle d’égalité. Comment peut-on comprendre une telle chose ?
L’affaire du code de la famille m’a motivé à me battre pour le Mali
Parler qu’il n y a pas d’inégalité dans religion, c’est devenir mécréant. Nous ne pouvons poser de tel acte qui feront de nous des mécréants. ATT qui m’appelle mon père, je lui ai signifié en face, que ce code ne sera pas appliqué au Mali. Il m’a donc rassuré. La raison pour laquelle je me bats pour le pays, le code de la famille m’a motivé. Il a été mon premier acte. Dans cette affaire du code de la famille, ATT nous a tournés en bourrique. Mieux, il a essayé de nous endormir pour ensuite reprendre ce projet. Ila eu trop de laissé aller et le coup d’état a intervenu, son pouvoir a chuté. Dieu sait que je ne suis pour rien, encore m’associé avec qui que ce soit, pour que ce pouvoir tombe.
C’est le fait qu’AOK et ATT combattent IBK, que j’ai décidé de le soutenir…
Après la chute d’ATT, il y a eu l’élection présidentielle. J’ai dit à qui veut l’entendre que tous ceux sous ATT, ne se sont pas assumés pour que le projet code de la famille n’ai pas lieu, n’auront pas mon soutien. Mieux, il s’avère qu’outre ATT, AOK ont combattu IBK, l’ont isolé lui qui a été Premier Ministre, où il s’est bien défendu, aussi, le régime d’ATT l’a isolé, combattu comme cela se doit. C’est fort de ce qui précède que j’ai décidé de soutenir la candidature d’IBK à l’élection présidentielle de 2013 parce que j’ai cru qu’il était capable de faire avancer le pays. Je l’ai soutenu, dieu nous a aidé, il a gagné. Il est venu ici à Nioro pour me remercier. Je lui ai fait des bénédictions.
IBK m’a déçu, a déçu tous les maliens…
Depuis qu’il est venu au pouvoir, il a commencé à poser des actes qui m’ont beaucoup surpris et qui n’ont rien à voir de nos analyses sur l’homme, sur ses capacités à diriger le Mali. En clair, IBK m’a déçu, a déçu tous les maliens ; il a montré qu’il n’était pas capable de diriger ce pays en posant des actes qui n’ont rien à voir au code de la famille mais, ses relations avec le peuple, sa façon de diriger qui pose problème.
S’attaquer à mes enfants
Le premier acte posé sous le quinquennat IBK, c’était de s’attaquer à son fils à Diéma sous le prétexte de payer le péage. A ce péage, mon fils a été torturé, humilier, traiter de tous les noms d’oiseaux du fait qu’il a voulu payer le péage sans succès, mais il n y avait pas monnaie. Il sera conduit au poste de gendarmerie où il sera tabassé, blessé sans aucune forme de procès, sans raison valable à part que cet acte a révélé une sorte de rancune à mon égard via mon fils. Celui-ci pour vous expliquer, venait de Bamako pour Nioro du Sahel. Il s’est garé au péage où on lui demande de payer. Il n’avait qu’un billet de cinq mille francs pour le ticket de 500 FCFA. Le guichetier lui a signifié qu’il n’avait pas de monnaie. Mon fils a rétorqué que lui n’en avait pas, comment faire donc ? Après des minutes d’attentes, mon fils a demandé au guichetier de lui faire accompagner par un jeune en ville qui toute proche pour qu’il fasse la monnaie et payer le ticket. A côté se trouvait un gendarme qui a rétorqué qu’il est hors de question que le véhicule traverse la barrière avant que le ticket soit pris !
Mon fils battu et blessé
Ils ne sont pas entendus, le gendarme a pris les documents du véhicule et a demandé à mon fils de l’accompagner en ville pour faire la monnaie ; arriver au niveau du poste de gendarmerie, ce que celui-ci a fait sans douter de ce qui l’attendait là-bas. Contre toute attente, il sera violement descendu du véhicule et battu. La nouvelle ayant parvenu à Nioro, ses frères se sont rendus à Diéma pour s’enquérir de la situation pendant que je me reposais. A Diéma, un de nos frères a intervenu et a demandé à ce que les jeunes se calment. Il y a eu plus de peur que de mal. Nous avons trouvé qu’il n y avait plus de gendarmes sur place, que mon fils a été battu, ses habits déchirés, quelques blessures. C’est cela la vraie version des faits de cette affaire. Toutes les autorités ont été au courant de cette affaire.
Cette affaire m’a beaucoup fait mal
A mon réveil, j’ai été informé. J’ai appelé mon frère de Diéma pour le remercier de son acte et salué les jeunes pour leur retenue car, ce n’est pas une affaire trop sérieuse sur laquelle il fallait s’appesantir. C’est ce que j’ai dit publiquement mais au fond de moi même, cette affaire m’a beaucoup choquée parce que je n’aime pas qu’on me minimise ou me méprise. Il y a eu une enquête qui confirme ce que je viens de dire. Une plainte a été introduite en justice par mon frère de Diéma. Il n y a pas eu de suite. Le gendarme qui est à l’origine de cet acte n’a même pas été inquiété, encore moins puni, ni muté.
Le Ministre de la Justice menacé d’être limogé
Mieux, le ministre de la Justice voulait tirer cette affaire au claire, il a été dissuadé par IBK d’arrêter. Et comment ?
Pour preuve le Procureur Général Daniel Tessougué, n’a pas pris l’affaire à bras le corps et a refusé que le gendarme en question soit jugé. Pire, le Ministre de la Justice a été menacé d’être relevé.
Un règlement de compte politique
Après mes analyses et enquêtes sur cette affaire, j’ai compris que mon fils a été battu du fait qu’il a soutenu un candidat opposé à celui du pourvoir. Une sorte de règlement de compte politique. Je rappelle que nous ne sommes pas du RPM, encore moins, d’un autre parti mais il se trouve qu’il y a des partis tels que le MPR et ADP-Maliba qui nous ont aidé lors de la présidentielle de 2013, à battre campagne pour IBK qui nous ont contacté pour se faire. Aussi, malgré que Choguel Kokalla Maïga, soit candidat lors de cette présidentielle, les militants du MPR et nous, nous sommes battus pour IBK. Quoi de normal que de soutenir les listes de ces deux partis?
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Propos recueillis par Bokari Dicko
Mali Demain