Malgré les assurances que les autorités de la transition voudraient donner par rapport aux préparatifs en cours pour la libération de Kidal et le désarmement du MNLA, les Maliens, dans leur écrasante majorité, sont toujours sceptiques quant à une issue rapide à l’imbroglio juridico-administratif qui prévaut dans cette région.
Le mercredi 1er mai 2013, les ministres en charge des élections, de la défense et de la sécurité, Moussa Sinko Coulibaly et Yamoussa Camara et Tiéfing Konaté, étaient face aux élus de la nation à l’Assemblée nationale pour une séance d’interpellation du gouvernement.
A l’ordre du jour, il y avait notamment l’organisation des prochaines élections ainsi que la situation particulière de Kidal.
Les trois membres du gouvernement de transition se sont voulus, à tous points de vue, assez rassurants et déterminés à relever les défis de l’organisation d’un scrutin crédible sur l’ensemble du territoire national, y compris à Kidal, à la date fixée par les plus hautes autorités de la République.
A l’analyse des débats et de la résolution votée à cet effet à l’unanimité des députés présents à la séance, on peut déduire que l’objectif a été atteint. Les élus de la nation semblent les avoir crus sur parole en attendant la concrétisation effective des engagements pris.
Par ailleurs, lors de la conférence de presse hebdomadaire animée par la Dirpa dans la foulée de cette interpellation, le lieutenant-colonel Souleymane Dembélé, directeur adjoint de cette structure annonçait que « les dispositions étaient en cours pour la libération totale du territoire, notamment Kidal ». A ce sujet, l’armée serait déjà « prête à 60 % de ses capacités opérationnelles pour lancer l’assaut final sur la ville de Kidal et environs », toujours selon le directeur adjoint de la Dirpa.
Comme il est donné de constater, aussi bien du côté des populations que des politiques et militaires, la libération de Kidal hante tous les esprits et constitue aujourd’hui le sujet de préoccupation prioritaire des Maliens, loin devant l’organisation des élections ou autres. Tout le monde semble d’accord qu’il faut rapidement trouver une issue à « l’exception kidaloise ». Mais, il y a lieu d’attirer l’attention des uns et des autres sur les nombreux pièges que renferme cette situation.
En effet, le MNLA a de tout temps misé sur des allégations d’exactions et de massacres supposés de populations civiles par des soldats de l’armée malienne dans le Nord du pays. Cette campagne de désinformation et d’intoxication de l’opinion internationale dans laquelle ce mouvement rebelle est passé maître, trouve un écho favorable auprès de certains groupes de pression, notamment européens et de certaines organisations de défense des droits de l’Homme et ou des minorités de par le monde, dont Humains Right Watch (HRW).
Le risque est donc évident aujourd’hui qu’en cas d’assaut sur Kidal, le MNLA retourne ses armes de façon délibérer contre les populations civiles afin de faire porter le chapeau à l’armée malienne. Immédiatement, grâce aux chaînes de télévision et de radios servant de porte-voix à la rébellion, des images seront diffusées en boucle, des émissions spéciales seront organisées pour « démontrer » à la face du monde « la barbarie » de l’armée malienne en train de procéder à « un génocide » contre les populations touarègues. Et patati patata… !
L’une des conséquences immédiates serait alors une interposition des forces dites impartiales entre les belligérants afin de « protéger les civils ». La stratégie de partition de fait du pays s’en trouverait consommée une fois pour toujours.
A ce propos, il convient de se rappeler des cas éthiopien avec l’indépendance érythréenne, du Timor Oriental d’avec l’Indonésie et du Soudan récemment avec la partition du Sud-Soudan. Chaque fois, ces processus ont été accompagnés par la communauté internationale à travers le déploiement de « casques bleus » des Nations unies comme ce serait le cas au Mali à compter de juillet prochain.
Par ailleurs, les combattants du MNLA sont en majorité des civils armés. Quelle que soit l’issue d’un affrontement armé avec les forces régulières, le MNLA, avec le soutien et la complicité de puissants lobbys de la cause indépendantiste, pourrait transformer son inéluctable défaite militaire en victoire politique en sapant davantage l’image de notre pays sur la scène internationale.
Certes, il est urgent et impératif que l’on retrouve la normalité à Kidal comme partout ailleurs sur le territoire. Mais, il importe d’appréhender le problème dans toutes ses dimensions et complexités afin de ne pas ajouter de grain à moudre au moulin de la propagande déjà en cours par l’entremise des ennemis de notre nation.
Libérer Kidal, oui ! Mais également, il s’agit de tout mettre en œuvre pour maintenir le Mali dans son entièreté et son intégrité territoriale avec des communautés vivant en parfaite harmonie et contribuant les unes les autres à la consolidation d’une nation forte et soucieuse de l’avenir de l’ensemble de ses enfants.
Ainsi, la crise aura servi à solder toutes les questions et les nombreux défis qui se posent à notre vivre ensemble commun.
Bréhima Sidibé