La désillusion du chemin de fer et la réouverture utopique de la Comatex n’auront pas suffi. Le chef de l’Etat pourrait tomber dans la nasse d’autres trafiquants de chimères avec le projet de réhabilitation de l’huilerie cotonnière du Mali SA (HUICOMA SA), qui avait jadis fait la fierté de la région de Koulikoro avant de tomber entre les mains de l’opérateur économique Alou Tomota en 2005, sur fond de mauvaise gestion. Conséquence, après deux années de fonctionnement difficile, le géant finit par fermer boutique en 2007. Au bout de 16 années de coma, les autorités de transition, sous la houlette du ministre de l’industrie et du commerce vraisemblablement prêt à tout pour se faire un bilan au milieu des rumeurs incessantes de remaniements, ont décidé de la remettre en marche. De simple intention en octobre 2023, l’idée prend corps ces derniers temps, au détour de son inscription au nombre des exigences des Assises Nationales de la Refondation. Toutefois, il se pose la question de savoir si les autorités de transition en ont véritablement évalué l’ensemble des contours et implications dont l’équation question d’un personnel qualifié. Tenez-vous bien. Après 16 années d’arrêt, plus de 90% du personnel d’Huicoma, selon des sources, ne sont plus opérationnels. Si beaucoup sont aujourd’hui admis à la retraite, ils sont nombreux à avoir succombé au changement spectaculaire de leur quotidien. Ainsi, pour relancer l’Huicoma, il va falloir non seulement renouveler l’ensemble des machines obsolètes mais également recruter et former un nouveau personnel. Un autre défi est celui lié à l’approvisionnement de l’usine en matières premières. Avec la fermeture de l’usine de nombreuses petites unités industrielles de même vocation ont vu le jour pour combler le vide. Elles sont aujourd’hui estimées à plus de 115 huileries dont les besoins en matière premières sont estimés à 2 millions de tonnes de coton-graines. Un besoin très loin d’être satisfait. Et selon des confidences tapies dans le secteur, la CMDT ne met à leur disposition que 350 000 tonnes de coton-graines. Quant aux besoins de l’Huicoma au moment de son arrêt, ils étaient estimés à 91 000 tonnes de graines de coton. Alors question : comment l’Etat malien compte approvisionner l’Huicoma en matière première sans sevrer les unités industrielles dûment créées de la graine produite par la CMDT, sachant que ces industries génèrent également des centaines d’emplois ? L’avenir nous le dira. En attendant, il va falloir trancher la question du lourd passif de l’Huicoma, notamment les travailleurs qui n’ont jamais reçu leurs droits après avoir été licenciés sans autres formes de procédures.
En somme, cette relance à l’allure de nationalisation d’une société dont on connait à peine l’identité de tous les actionnaires – risque d’être en deçà des résultats escomptés.
Amidou Keita