Pour ce qui est de la baisse du prix du kilogramme de la viande de bœuf dont le gouvernement s’était réjoui la semaine dernière, on peut dire que la joie a été de courte durée. Et cela d’autant plus que beaucoup de boucheries sont restées fermées lundi dernier (12 juillet 2021), le jour où les nouveaux prix devaient entrer en vigueur. Et celles qui étaient ouvertes, les prix y sont restés intacts comme pour défier le gouvernement et les syndicats de bouchers. Ce qui pose réellement la crédibilité de ceux avec qui le ministère du Commerce et de l’Industrie a négocié ces nouveaux prix.
Le prix du kilogramme de viande avec os devait être vendu à 2 300 F Cfa et celui sans os à 2 800 F Cfa à partir du lundi dernier (12 juillet 2021). L’annonce avait été faite le 6 juillet, suite à la signature d’un protocole d’accord entre le gouvernement et les syndicats des bouchers de Bamako. Cet accord obtenu après plusieurs tractations entre les deux parties pouvait paraître comme un «ouf de soulagement» pour les populations, même si celles espéraient une baisse plus conséquente des prix.
Au ministère de l’Industrie et du Commerce on s’était donc réjoui de cet accord qui devait être appliqué sur deux mois. Selon le ministre Mahmoud Ould Mohamed, des dispositions devaient être prises avec le temps pour l’amélioration de la situation. «Ce problème a tant fait souffrir les populations de Bamako», a-t-il souligné.
Sauf que, visiblement, une grande partie des bouchers n’entendent pas les choses de cette oreille. Ce qui fait qu’elles étaient nombreuses boucheries qui étaient fermées lundi dernier dans le district de Bamako pour protester contre cet accord.
«Ce matin je me suis mise à faire un petit sondage en appellant des parents et amies dans différents quartiers de Bamako pour m’enquérir du prix de la viande. Sur 10 quartiers, les bouchers sont en grève dans 7, dont mon quartier, et les 3 autres les bouchers refusent catégoriquement d’appliquer les prix indiqués par le DRCC (Direction régionale de la consommation, du commerce et de la concurrence) et le syndicat des bouchers», a amèrement constaté Dicko Amina Dicko, ménagère et actrice engagée de la société civile.
«Au marché de Faladié-Banankabougou ce matin (lundi 12 juillet 2021), les bouchers n’ont pas vendu de viande au motif qu’ils ne sont pas d’accord avec les prix fixés par le gouvernement», a constaté un confrère. «Mali Kura s’annonce bien: on annonce une baisse du kilo de viande de bœuf et elle disparaît des étals», ironise M. Dicko, cadre dans une organisation de la société civile. Et de s’interroger : Les interlocuteurs de l’État sont-ils crédibles ? Comment se fait la répartition des subventions de l’État aux acteurs du secteur de la viande de manière à garantir l’équité ?
Des questions que de nombreuses ménagères nous ont aussi posé ce lundi matin dans certains marchés de la Commune IV. «Je demanderais au gouvernement de plutôt subventionner les ménages et de laisser bouchers et vendeurs d’animaux trouver un terrain d’entente. Entre-temps, on va parcourir le pays pour une sensibilisation à la consommation des espèces disponibles sous la main», propose M. Dicko.
Une proposition qui, selon nos interlocutrices dans des marchés du district, mérite d’être sérieusement étudiée. Et cela même si elles sont conscientes qu’elle a peu de chance d’aboutir. «Les subventions représentent la poule aux œufs d’or pour certains fonctionnaires de l’Etat. Donc, ils ne vont pas accepter de gré qu’on leur enlève le pain de la bouche», commente Kadidiatou Coulibaly, cadre de l’administration publique qui savoure un congé de maternité. Elle a marché sur la langue de nombreuses sœurs pour qui remplir aujourd’hui le panier de la ménagère est une équation sans solution.
Il faut souligner que le Front contre la vie chère avait déjà contesté ces nouveaux prix en estimant que le kilogramme de la viande doit redescendre au prix initial. Selon sa présidente, Mme Mariam Koné, le prix du kilogramme de la viande doit revenir à 2 000 FCFA ou au moins 2 200 F Cfa comme il était un moment convenu. Avant d’ajouter qu’elle ne sait pas ce qui s’est passé pour que le prix se retrouve à 2. 300 FCFA. «Nous n’allons pas l’accepter car au Mali quand les prix augmentent, leur réduction posent problème», a indiqué Mme Mariam Koné.
Il faut rappeler qu’en plus de la viande, d’autres denrées de première nécessité sont concernées par cette augmentation des prix dénoncée par les populations depuis quelques mois à travers le pays. Et les consommateurs de Kayes ont manifesté samedi dernier (10 juillet 2021) leur ras-le-bol face à la hausse généralisée des prix des denrées de première nécessité.
Aïssata Bâ
Source : Le Matin