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Réforme du secteur de la Santé du Mali: l’APM MALIKO sceptique sur les résultats

Le parti Alliance pour le Mali (APM-MALIKO), dans une déclaration dont nous avons copie, signée de son président, Modibo KADJOKE, estime que la nouvelle réforme du système de santé du Mali, adoptée en février 2019, paraît, certes séduisante par l’annonce des gratuités des soins à un plus grand nombre, mais risque de décevoir plus d’un, en raison des attentes qu’elle aura suscitées.

Aussi, il reste convaincu que ladite réforme suscitera non seulement des espoirs difficiles à combler, mais également aura le mérite de déstructurer le modèle de santé communautaire, qui constitue le fondement même de la politique de santé de notre pays.

Nous vous proposons l’intégralité de la Déclaration du parti APM-MALIKO sur la réforme du secteur de la Santé, annoncée le 25 février 2019 au CICB.

«Le 25 février 2019, des réformes importantes pour la Santé des Maliens ont été annoncées en grande pompe au CICB par le Ministre de la Santé en présence du Chef de l’Etat.

A titre de rappel, le Mali, dès son indépendance, opta pour une politique de gratuité complète des soins de santé. Après plusieurs années de mise en œuvre de cette gratuité, les indicateurs de santé notamment la mortalité maternelle et infantile ne furent pas significativement réduits.

Face à l’impossibilité pour l’Etat malien de poursuivre sa gratuité des soins, il fut contraint, en 1985, à la privatisation des professions médico-pharmaceutiques.

En 1987, l’Initiative de Bamako voit le jour, en se fondant sur le principe de la participation communautaire à l’offre de services de qualité selon le modèle de recouvrement des coûts.

En 1988, devant l’incapacité de l’Etat à offrir aux populations des services de santé répondant à leurs besoins, les populations de Banconi, ouvraient la voie à l’innovation en matière de santé en créant leur propre structure de santé, le Centre de Santé Communautaire (CSCOM) de Banconi entièrement géré par elles selon le système de recouvrement des coûts. La réussite de ce modèle désormais connue sous le nom de « Santé Communautaire » a servi d’inspiration à la Politique Sectorielle de Santé et de Population du Mali, adoptée en décembre 1990 comme fondement de la politique actuelle du pays.

L’avènement de la santé communautaire a favorisé l’extension de la couverture sanitaire en rapprochant les soins des populations, tout en leur offrant des services de santé de qualité avec la médicalisation des formations sanitaires.

Au plan des infrastructures sanitaires de premier niveau, on est passé de 225 CSCOM en 1998 à 1314 en 2017. En termes de financement, la part des ménages dans l’offre des soins de santé reste la plus importante.

Le modèle de santé communautaire malien, fierté nationale, inspire plus d’un pays africain et bien au-delà. Sa contribution à l’amélioration de la santé des populations en fait un modèle répliqué dans la plupart des pays.

Pendant que le Mali constitue un modèle dans le domaine de la santé communautaire qui tire son essence du système de recouvrement des coûts avec la participation communautaire comme mode de gouvernance, est-il justifié de remettre en cause ce modèle ? N’aurait-il pas fallu procéder à son évaluation préalable ? Evaluation qui pourrait corriger les dysfonctionnements actuels s’il y a lieu ? Quels impératifs justifient un tel reniement d’un modèle fonctionnel et viable ?

Les réformes envisagées par le Gouvernement en février 2019, instaurant la gratuité des soins au niveau des Centres de Vie Communautaires (CVC) et des maternités rurales en création aux côtés des CSCOM gérés selon le modèle de recouvrement des coûts, sont une remise en cause totale de la politique sectorielle de santé. Elles annihilent tous les progrès engrangés par le Mali en une cinquante d’années grâce à des femmes et des hommes patriotes engagés à la recherche permanente du bien-être des populations. Ce serait dommage de faire ce grand bond en arrière, pendant que les autres pays prennent le Mali en modèle pour son système de santé.

Quelle étude scientifique amène le Mali à détruire son propre système qui a toujours fait sa fierté ?

Au moment où le pays vit une crise économique et sécuritaire sans précédent, que l’effort budgétaire des dépenses publiques en matière de santé ne dépasse guère les 5%, que celles-ci ne représentent que 2% du PIB et que près de 30% de ces dépenses proviennent de l’aide extérieure, est-ce le bon moment d’annoncer des gratuités tous azimuts ? Quelle est l’incidence financière et qui doit payer, quand et comment ? Quelle pérennité pour une telle initiative ? L’évaluation des gratuités existantes surtout leur impact sur les structures de santé publiques a-t-elle été faite ?

Au moment où la réforme prévoit la mise en place des Hôpitaux de 4ème référence, le Ministère de la santé s’est-il interrogé sur la fonctionnalité de ceux de 3ème référence ? Dispose-t-on suffisamment de personnels hautement qualifiés pour faire fonctionner les différents Hôpitaux de 3ème et 4ème référence ?

Pour APM-MALIKO, la nouvelle réforme du système de santé, si elle paraît séduisante par l’annonce des gratuités des soins à un plus grand nombre, risque de décevoir plus d’un, en raison des attentes qu’elle aura suscitées, mais dont la non satisfaction aura des externalités fortement négatives sur la vie des populations. Pire, elle aura suscité des espoirs difficiles à combler, mais plus encore, elle aura le mérite de déstructurer le modèle de santé communautaire, qui constitue le fondement même de la politique de santé du pays, mais aussi plongera le Mali dans un recul sans précédent avec une forte mortalité dont la remise à niveau nécessitera des efforts humains et financiers au-delà de nos capacités.

Par nous, nous pouvons ! ».

Bamako le 1er Avril 2019

Pour le Directoire d’APM-MALIKO

Modibo KADJOKE

Info-matin

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