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Recettes publiques : de l’approximation ministérielle à l’inexactitude scandaleuse

Un ministre qui oublie les finesses et subtilités de la langue de Molière dans sa chronique d’autopromotion sur l’utilisation des recettes publiques ; le symbole de notre fierté nationale qui se croit obliger de d’étaler sur la place sa reconnaissance pour des broutilles et une querelle de diplomates qui prend une tournure judiciaire, c’est la substance de votre Bêtisier du jour.

 

Recettes publiques : de l’approximation ministérielle à l’inexactitude scandaleuse

70% des recettes publiques sont dépensées directement ou indirectement en faveur de Bamako. Un des axes d’action de la transition est d’équilibrer cette balance. C’est dans ce sens que j’ai instruit «l’opérationnalisation» rapide des antennes régionales de nos grands programmes notamment l’ANPE, APEJ et le FAFPA, de même que les Directions Régionales de l’Emploi et de la Formation Professionnelle. Mes actions de cette semaine s’inscrivent dans cette logique, notamment à Koulikoro où nous avons accompagné 78 associations dans les domaines de la teinturerie, de la restauration, de la mécanique moto, de la menuiserie, de la rôtisserie. Et aussi à Kidal, en marge des travaux du comité de suivi de l’accord- CSA, où accompagné par le Directeur Général de l’ANPE, Ibrahim ag Nock, nous avons évalué, avec la société civile, la situation de l’Emploi et de la Formation Professionnelle afin d’y donner les meilleures réponses.
A cette occasion, j’ai rendu une visite de courtoisie à l’Amenokal Mohamed Ag Intallah pour lui réitérer ma volonté et celle de mon département pour l’accompagnement des organisations sociales et professionnelles de la région conformément aux axes stratégiques de la feuille de route de la Transition.
Le voyage de Kidal a du exténué la virtuose de l’art poétique (poï), au point d’oublier les finesses et subtilités de la langue de Molière. Dans sa chronique d’autopromotion ministérielle sur sa page Facebook, le ministre CMAS de l’Emploi et de la formation professionnelle, Mohamed Salia TOURE (ou l’administrateur de sa page par générosité) est allé au-delà de la gaffe juvénile dans un post publié le 14 février sur sa page Facebook personnelle.
Dans un populisme habituel (la révolution citoyenne en marche), le ministre vantant ses actions parcellaires en faveur des jeunes dont il a été le porte-drapeau et voulant charmer les broussards, écrit : « 70% des recettes publiques sont dépensées directement ou indirectement en faveur de Bamako… ». Pris telle qu’elle est la phrase ne peut être qu’incomplète, sinon elle serait d’une monstrueuse inexactitude. Le déficit d’exactitude induit la fausseté, la manipulation et la propagande grossière qui ne peuvent prospérer au service de l’État.
Nulle acrimonie envers ce jeune brillant, au contraire. Juste l’application d’une vieille maxime qui veut qu’on tape bien souvent sur ceux qu’on aime. A Mohamed Salia TOURE, il faudrait donc rappeler qu’un ministre n’est pas un Facebookeur et blableur. Il doit, comme il le fait dans ses Poï, mettre un grand soin à choisir ses mots, sinon sa pensée est vite travestie. Il faut qu’il écoute moins ceux qui lui chantonnent « aux âmes bien nées… » pour intégrer qu’un ministre n’a pas d’âge, mais une responsabilité à assumer, en actes et en paroles. Dans ce cas qui nous préoccupe Monsieur le ministre a mal rendu sa pensé, mal formulé ce qu’il voulait certainement écrire et ça donne une grosse bévue. Parce que dire que « 70% des recettes publiques sont dépensées directement ou indirectement en faveur de Bamako… » (tout court) ne correspond à aucun vérité. Donc Mohamed Salia Kouma ma nya ! Et pour cause ?
Les recettes publiques
Les recettes publiques correspondent aux recettes perçues par l’ensemble des administrations publiques : l’État et les organismes divers d’administration centrale, les administrations publiques des collectivités locales ainsi que les administrations de sécurité sociale (ASSO). Et, Monsieur le ministre doit certainement savoir que les recettes publiques se scindent en deux catégories principales : les prélèvements obligatoires et les autres recettes.
1°) Les prélèvements obligatoires, principale source de financement des administrations publiques désignent tous les versements effectués par des personnes physiques ou morales aux administrations publiques afin de financer leurs dépenses. On distingue : les impôts, les cotisations sociales, les taxes fiscales.
2°) Par autres ressources de financement des administrations publiques on entend celle qui proviennent principalement des recettes non fiscales, des fonds de concours et de l’emprunt.
– Les recettes non fiscales se composent des revenus du patrimoine tels que les revenus du domaine de l’État, des revenus des activités industrielles et commerciales, et des rémunérations pour services rendus, telles que la redevance audiovisuelle.
– Les fonds de concours sont des dons ou legs versés à l’État par des personnes publiques ou privées, pour concourir avec lui à certaines dépenses et conformément aux intentions de la partie versante.
– L’emprunt constitue l’une des ressources majeures des administrations publiques. En effet, depuis la saint glinglin le budget au Mali est voté en déséquilibre du fait de dépenses supérieures aux recettes. L’État emprunte ainsi chaque année sur les marchés financiers par l’intermédiaire de l’Agence UEMOA-Titres pour d’une part financer la dette arrivée à échéance et d’autre part émettre de nouveaux emprunts permettant de financer le déficit du budget général.
Dans leur aspect formel, les recettes publiques sont constituées par les recettes du domaine de l’Etat, les taxes et les droits, les impôts et les emprunts.

Dans leur essence, elles trouvent leur origine dans trois sources notamment :
– Dans le revenu national, c’est-à-dire dans les revenus représentatifs du coût de production social, de surplus social et les rentes qui les composent ;
– Dans la création des ressources monétaires demandées à l’expansion du crédit et de la monnaie ;
– Dans l’apport des capitaux étrangers, la recette en monnaie tient ainsi lieu de recette en nature. Ce pouvoir d’achat est soustrait de l’économie nationale lorsqu’il est prélevé sur le revenu national. Il est créé de toutes pièces lorsqu’il est formé par l’expansion de crédit et de monnaie. Il est transféré de l’étranger lorsqu’il est emprunté.
La recette publique est donc un transfert ou une création du pouvoir d’achat, le transfert s’opérant lui-même à l’intérieur de l’économie nationale, de l’économie privée à l’Etat, ou sur le plan international, d’une nation à l’autre.
Au Mali comme ailleurs, les recettes publiques sont donc constituées principalement par les impôts, les taxes, les revenus domaniaux, les recettes administratives, les droits de douane, les redevances, les recettes diverses issues de différentes divisions administratives.
Trois éléments fondamentaux interviennent dans le calcul des recettes : (i) les derniers chiffres connus des recettes fiscales, (ii) l’accroissement probable du produit intérieur brut (PIB) au cours de l’année à venir et (iii) les effets de modifications de la législation fiscale intervenues en cours d’année.

Les recettes budgétaires du mali se sont chiffrés à 2 181,8 milliards de FCFA dans le budget 2020 contre un montant de 2 054,7 milliards de FCFA dans le budget rectifié 2019, soit une augmentation de 127,2 milliards de FCFA ou 6,19%. Cette augmentation est imputable à l’augmentation des budgétaires générales et des comptes spéciaux du trésor.
Les recettes du budget général se sont chiffrées à 2 049,6 milliards de F CFA en 2020 contre 1 928,1 milliards de FCFA dans le budget rectifié 2019, soit une augmentation de 6,3 %. Les recettes des budgets annexes se sont élevées à 7,8 milliards de F CFA en 2020 contre 7,9 milliards de F CFA en 2019. Quant aux Comptes spéciaux du Trésor, ils se sont chiffrés à 124,4 milliards F CFA en 2020 contre 118,7 milliards F CFA dans le budget rectifié 2019, soit une augmentation de 4,8% (Cf. tableau 4).

Les recettes du budget général sont internes et externes :
Recettes intérieures : effort national de mobilisation des recettes. Elles étaient constituées en 2020 de recettes fiscales, de recettes non fiscales, de recette de produits financiers et des recettes des budgets annexes et comptes spéciaux du trésor. Elles s’élevaient à 1 937,9 milliards de FCFA dans le budget 2020 alors qu’elles étaient de 1 802,8 milliards de FCFA dans celui rectifié 2019, soit une hausse de 135,0 milliards de FCFA ou un taux de progression de 7,5 %. Cette hausse était imputable aux recettes fiscales qui ont connues une augmentation de 12,6%. Le taux de pression fiscale ressortirait à 15,8 % en 2020 contre la norme de l’UEMOA de 20%.
Recettes extérieures : coopération avec l’extérieur. Elles comprennent les dons et les annulations de dette. Elles se sont chiffrées à 244,0 milliards de FCFA dans le budget 2020 contre un montant de 251,8 milliards de FCFA dans le budget rectifié 2019, soit une légère baisse de 7,9 milliards de FCFA.
Cette baisse s’explique essentiellement par la diminution du montant relatif à l’annulation de la dette. Le montant total de l’annulation de la dette est estimé à 8,98 milliards de FCFA en 2020 contre 17,80 milliards de FCFA dans la loi de finances rectificative de 2019, soit une baisse de 49,70 milliards de FCFA (Cf. tableau 3).
Les ressources internes et externes représentaient respectivement 88,8 % et 11,2 % du budget total en 2020 contre 87,7 % et 12,3 % du budget rectificatif 2019 respectivement.
En ce qui concerne les ressources de trésorerie, elles étaient constituées de produits provenant de la cession des actifs, de produits des emprunts projets, de produits des emprunts programmes, de dépôts sur les comptes des correspondants et des remboursements de prêts et avances. Elles se chiffraient à 263,2 milliards de FCFA en 2020 contre à 359,7 milliards de FCFA dans le budget rectifié 2019, soit une baisse de 26,8 %. Cette baisse s’explique en partie par la diminution des montants des dépôts sur les comptes des correspondants (-83,3%), des produits provenant de la cession des actifs (-71,3%) et des produits des emprunts programmes (-71,87%) (Cf. tableau 5).

Utilisation des ressources publiques en 2020 :
Comment le gouvernement a-t-il dépensé les ressources publiques en 2020 ?
Les dépenses du budget d’État se sont chiffré à 2 604,6 milliards de FCFA en 2020 contre 2 387,7 milliards de FCFA dans la loi de Finances rectificative 2019. Ces dépenses étaient en hausse de 216,8 milliards de FCFA correspondant à un taux d’accroissement de 9,1 %. Cette augmentation s’expliquait essentiellement par :
• l’incidence financière de la révision de la grille indiciaire dans le cadre de l’amélioration de vie des travailleurs ;
• l’incidence financière de l’opérationnalisation des nouveaux services publics ;
• l’incidence des Décrets n°2016-0413/P-RM et n°2016-0415/P-RM du 14 juin 2016 fixant la liste, les conditions et modalités d’octroi et les taux des indemnités et allocations accordées respectivement aux fonctionnaires de la Police et de la Protection Civile ;
• l’incidence de la poursuite de la mise en œuvre de la Loi d’Orientation et de Programmation Militaire (LOPM);
• l’incidence de la poursuite de la mise en œuvre de la Loi de Programmation de la Sécurité Intérieure (LPSI) ;
• l’incidence financière de la mise de la Loi d’Orientation et de Programmation du Secteur de la Justice (LOPJ) ;
• la prise en charge des dépenses urgentes liées à la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation au Mali ;
• la prise en charge de nouveaux projets et programmes dans le cadre du Budget Spécial d’Investissement ;
• le renforcement des dotations des secteurs sociaux (Education, Santé, Développement Social, Promotion de la Femme et de l’Enfant), des secteurs de l’Hydraulique et de l’Assainissement ;
• le renforcement de la dotation destinée au secteur de l’agriculture.
En français facile :
On retient par nature de budget que les dépenses du budget général se sont élevées en 2020 à 2 472,4 milliards contre 2 261,2 milliards de FCFA dans le budget rectifié 2019, soit une hausse de 211,2 milliards de FCFA ou 3,4%. La croissance du budget général est due en partie à celle des dépenses en capital, qui ont connu une hausse de 125,7 milliards de FCFA, soit un taux d’accroissement de 14,7% contre 6,1% pour les dépenses courantes.
Les dépenses des budgets annexes sont passées de 7,9 milliards dans le budget 2020 à 7,8 milliards dans celui rectifié 2019, soit une légère baisse de 0,6%.
Quant aux comptes spéciaux du trésor, ils ont enregistré un montant total de 124,4 milliards de FCFA dans le budget 2020 contre 118,7milliards de FCFA dans la loi de finances rectificative 2019, soit une hausse de 4,8 %.

Par nature de dépenses, on distingue :
1°) les dépenses courantes, nécessaires pour assurer le fonctionnement de l’administration publique (salaires d’employés publics, frais pour le fonctionnement des administrations, transferts et subventions),
2°) les dépenses pour les frais financiers et passifs (intérêts de la dette intérieure et extérieure et l’apurement du passif) et
3°) les dépenses d’investissement pour la réalisation des infrastructures socioéconomiques (routes, écoles, logement sociaux, centres de santé, forages, etc.), des aménagements agricoles, etc.
Les dépenses courantes se sont élevées à 1 500,9 milliards de FCFA dans le budget 2020 contre 1 415,4 milliards de FCFA dans la loi de finances rectificative de 2019, soit une hausse de 85,5 milliards, correspondant à un taux d’augmentation de 6,0%. Elles représentaient 54,2%2 du budget général 2020. La hausse des dépenses courantes se justifie en partie par les dépenses de personnel qui connaissent une hausse de 40,7 milliards de FCFA, soit un taux de progression de 6,8%
L’augmentation des dépenses de personnel découle entre autres de l’incidence des accords entre le gouvernement et les partenaires sociaux, des recrutements dans l’armée dans le cadre de la mise en œuvre de la Loi d’Orientation et de Programmation Militaire (LOPM) et de la Loi de Programmation de la Sécurité Intérieure (LPSI), de l’augmentation du plafond de la grille indiciaire des fonctionnaires et contractuel de l’Etat, du relèvement de trois (03) ans de l’âge de départ à la retraite par catégorie, de l’incidence sur la pension de la majoration de la grille, etc.
Quant aux frais financiers et passifs, ils passent de 131,1milliards de FCFA dans le budget rectifié 2019 à 160,4 milliards de FCFA dans celui de 2020, soit une hausse de 29,4 milliards de FCFA. Cette augmentation est imputable essentiellement au règlement des intérêts de la dette intérieure qui ont augmenté de 16,5 milliards de FCFA, soit un taux d’évolution de 25,1%. Dans le budget général 2020, les frais financiers et passifs représentent environ 6,5%.
Pour ce qui est des dépenses d’investissements, elles sont évaluées à 971,5 milliards de FCFA dans le budget 2020 contre 845,8 milliards de FCFA dans la loi de finances rectificative 2019, soit une hausse de 125,7 milliards de FCFA ou 14,9%. Elles représentent 39,3% du budget général 2020 (Cf. tableau 6 et figure 7).

Source : INFO-MATIN

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