En République démocratique du Congo, la malnutrition et ses effets dramatiques touchent six enfants sur 10. Caritas en a sauvé plus de 900 dans un camp de réfugiés de l’est mais risque de devoir bientôt cesser, faute de moyens.
A une dizaine de kilomètres de la grande ville de Goma (est), dans le camp de Mugunga 1, plus de 50.000 personnes déplacées par les conflits qui ravagent depuis 20 ans la province du Nord-Kivu s’entassent sous des abris de fortune faits de bâches blanches.
En lisière du camp, l’organisation catholique Caritas a installé un centre de santé. Une réussite, mais son avenir est menacé par les difficultés financières du Programme alimentaire mondial (PAM) dans le pays.
« Les besoins sont immenses », explique soeur Marie-Valérie, qui dirige le centre de santé. Car « les déplacés n’ont rien » et la population locale n’est guère mieux lotie, explique-t-elle: « C’est à peine si l’on trouve une ration par jour » pour se nourrir.
Selon le PAM, 59,6% des enfants du pays souffrent de malnutrition chronique à aiguë. Les conséquences sont graves: une mortalité infantile élevée, une amputation fréquente du développement physique et intellectuel.
Pour combattre ce fléau à Mugunga, Caritas a lancé un programme de « dépistage actif » et « d’éducation nutritionnelle » des familles, raconte Guylain Bathaweza, chargé du suivi des projets.
Avec l’aide du PAM, le projet, ouvert aux enfants de six mois à cinq ans et aux femmes enceintes et allaitantes, a vu le jour en décembre pour une durée initiale d’un an, mais l’organisation catholique souhaiterait pouvoir le poursuivre au-delà.
Ce mardi, quelque 300 femmes et enfants sont présents au centre de santé.
Pendant que l’on prépare le « premix », riche mélange de farine de maïs, de soja, d’huile et de sucre qui sera donné aux bénéficiaires, les familles attendent dans les braillements et les cris que les enfants soient pesés, toisés et passent le test du périmètre du bras.
Ces trois mesures permettent de déterminer si un enfant est malade et peut bénéficier du programme, qui n’est pas une simple aide alimentaire mais une véritable thérapie, insiste M. Bathazewa.
70 millions de dollars à trouver
Le « premix » est un « médicament », explique-t-il, et si l’enfant prend bien sa ration journalière de 240g préparée en bouillie et apportant 1057 kcal, il a de grandes chances de guérir.
Après avoir suivi un cours de nutrition dans un sombre bâtiment en bois, les mères, qui ont en moyenne cinq à six enfants, repartent avec une dose de « premix » suffisante pour 15 jours.
Il s’agit de leur faire comprendre que la ration donnée doit être consommée exclusivement et régulièrement par celui ou ceux qui sont malades. Le message passe bien: au bout de trois mois, le taux de guérison est de 85%, indique soeur Marie-Valérie.
Mapendo Mubawa, 30 ans, est venue faire examiner deux de ses neuf enfants. Comme 54 autres, ils viennent d’être admis au programme et elle s’en réjouit. « J’ai l’espoir que bientôt, mes enfants seront guéris », dit-elle.
Mais pour cela, il faudrait que l’aide puisse continuer. Or, « on risque de ne plus être capables de servir nos bénéficiaires à partir de novembre », s’inquiète Wolfram Herfurth, coordinateur du PAM pour l’est du pays.
L’agence onusienne doit trouver 70 millions de dollars pour pouvoir continuer sa mission en RDC dans les six prochains mois.
Au-delà de Mugunga, le tarissement des ressources du PAM pour la RDC serait dramatique à l’échelle du pays: l’organisation prévoit d’y venir en aide à 4,2 millions de personnes jusqu’à fin 2015.