C’est dans une Cour d’appel de Bamako bien quadrillée par les forces spéciales anti-terroristes que s’est rouvert ce mardi 24 septembre 2024, le procès Fily Sissoko et autres dans le dossier dit de l’achat de l’avion présidentiel et les contrats de surfacturation des équipements militaires.
En plus du quadrillage de la Cour, des éléments des forces spéciales anti-terroristes, de la gendarmerie et de la police sont postés dans chaque coin et recoin de la salle d’audience. Même les couloirs jouxtant la salle d’audience, la salle de délibération et les toilettes n’ont pas échappé à cette mesure de sécurité impressionnante.
A situation exceptionnelle, mesure inhabituelle. Au regard du caractère sensible de ce procès fleuve, la Cour a exigé de l’auditoire venu suivre les débats d’éteindre les téléphones pour éviter la prise des photos et les filmages par inadvertance alors que lors des autres procès, la Cour demandait juste de mettre les téléphones sous mode vibreur ou silencieux.
C’est à 10 h 30 que les membres de la Cour ont fait leur entrée dans la salle d’audience puis s’en est suivie la vérification des renseignements généraux sur les accusés (date et lieu de naissance, situation matrimoniale, profession, domicile, service militaire…). Idem pour les témoins. Parmi ceux qui auront la charge de témoigner dans ce procès, on peut citer l’ex-ministre de la Défense et des Anciens combattants, Tiéna Coulibaly.
Juste après cette première étape, les avocats de la défense ont soulevé une exception qualifiée de “pertinente” par l’auditoire. Ils ont demandé la comparution de six témoins dont deux anciens Premiers ministres (Moussa Mara et Oumar Tatam Ly), Madani Touré ex-ministre délégué chargé du Budget, Sidiki Samaké (actuel secrétaire général du ministère de la Défense), Coumba Diallo (commission de réception des matériels au ministère de la Défense) et Sidi Coulibaly.
Après délibération, la Cour a rejeté la demande de comparution en qualité de témoins des anciens Premiers ministres et de l’ancien ministre délégué au motif que nulle part ceux-ci ne sont cités dans ce dossier depuis l’instruction jusqu’à la phase finale. De même elle a refusé la comparution des trois cadres du ministère de la Défense et des Anciens combattants manu militari si nécessaire.
Cependant à peine la greffière a-t-elle fini de lire les 35 pages de l’arrêt de renvoi qui épluche les faits reprochés à chacun des accusés, la défense a formulé à nouveau de nouvelles exceptions.
Cette-fois, les avocats des accusés ont tenté de démontrer que la procédure a été détournée par le parquet général, violant certaines règles de procédure, soutenant ainsi sa nullité.
Pour les conseils de Fily Sissoko et de Mahamadou Camara, ce n’est pas à une Cour d’assises spéciale comme celle-ci de juger leurs clients. Plutôt c’est à la Haute cour de justice de le faire au regard des postes qu’ils ont occupés. Ils ont également déclaré la Cour d’assises spéciale pour les crimes économiques et financiers incompétente pour juger Fily Sissoko et Mahamadou Camara.
Ces nouvelles exceptions de la défense ont créé un véritable tintamarre entre les parties au procès. D’ailleurs le ministère public, représenté par Koké Coulibaly, substitut du procureur général près la Cour d’appel, a qualifié ces exceptions soulevées par la défense “d’une mise en scène pour amuser la galerie et la mauvaise volonté de la défense à rentrer dans le fond des débats”.
Au terme de 4 h de joute orale entre le parquet général et la défense, la Cour, présidée par Banassa Sissoko, conseiller à la Cour suprême de Bamako, dans sa délibération a rejeté toutes les exceptions formulées par les avocats des accusés déclarant la Cour suffisamment compétente pour juger Fily Sissoko et autres.
Ce mercredi, la Cour a pu rentrer dans le fond des débats avec l’audition de Bouaré Fily Sissoko considérée comme l’accusée principale dans cette affaire après le décès de Soumeylou Boubèye Maïga.
Ousmane Mahamane