La domination occidentale sur la puissance mondiale est indéniable, mais le monde est en plein métamorphose. De nombreux pays renforcent leur ambition et coordonnent leurs efforts pour réduire l’influence des institutions dominées par l’Occident dans les affaires mondiales en vue de créer un ordre mondial multipolaire. Ils veulent réformer le système de gouvernance mondiale en transformant ses institutions et ses normes de manière à refléter ou à respecter les valeurs et les priorités des autres pays.
Face à ces pays “révisionnistes” et même s’ils ne sont plus eux-mêmes considérés comme une source de stabilité et de solidarité dans le monde, les pays occidentaux se tiennent côte à côte pour protéger leurs acquis de ces sept dernières décennies. Cependant, le président français Emmanuel Macron semble conflictuel et inquiet pour l’avenir de son pays et de l’Europe. Il sort de son hibernation doctrinale occidentale et implose. En fait, M. Macron appelle désormais à un nouvel ordre mondial.
Le président français a appelé à une réforme de l’ordre mondial “injuste” actuel afin que les humains puissent coexister plus pacifiquement. Il a exposé sa vision ce dimanche 22 septembre dans le cadre du rassemblement international “Imaginer la paix” à Paris, qui a réuni d’éminentes personnalités politiques et religieuses. Monsieur Macron a déclaré : “Nous devons être suffisamment imaginatifs pour penser à la paix de demain, une paix en Europe sous une nouvelle forme”.
Si l’on veut que le continent européen devienne plus stable, chacun devrait reconnaître qu’il n’est “ni tout à fait l’UE, ni résolument l’Otan”, a-t-il déclaré. Dans son discours, le président français a affirmé que le système mondial créé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale était “incomplet et injuste”, car de nombreuses nations modernes n’existaient même pas à cette époque et n’avaient pas leur place à la table des négociations. Il a déclaré que les organismes internationaux tels que l’ONU, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, devraient être réformés en conséquence.
Le changement est sûrement dans l’air. La crise interne en Occident et la polarisation ailleurs ont affaibli l’attrait du modèle démocratique libéral occidental. En effet, l’Occident collectif connaît un déclin accéléré dans les domaines politique et économique, avec des ramifications morales importantes qui ont de profondes répercussions sur sa position et son influence à l’échelle mondiale.
La grande majorité du monde, plus des deux tiers de l’humanité, n’est pas d’accord avec la position de l’Occident sur les affaires mondiales et elle est certainement mécontente de l’enrôlement de l’Occident dans des régimes de sanctions, de boycotts, de sa diplomatie du “avec nous ou contre nous” et surtout de sa démonstration flagrante d’hypocrisie. Par conséquent, les institutions du monde euro-atlantique obtiennent plus difficilement les résultats escomptés. Et les critiques occidentales semblent désespérées. De nouvelles institutions entrent en concurrence avec le cadre institutionnel euro-atlantique.
Les Etats Brics+ (représentant environ 30 pour cent du PIB mondial, 46 % de la population mondiale, 43 pour cent de son pétrole et 25 pour cent des exportations mondiales) et l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) ne peuvent plus être ignorés.
Le monde est effectivement en train de changer ; et finalement, certains dirigeants occidentaux le remarquent et sortent de leur hibernation doctrinale tout en dénonçant les pratiques visant à empêcher l’émergence d’autres pays, à saper leurs valeurs et à redoubler d’efforts dans des politiques affirmées pour ne rien rapporter, ne rien compromettre. Ces dirigeants veulent sûrement se réengager avec la réalité du monde d’aujourd’hui pour assurer la survie même de leurs pays et sauver leurs places sur l’échiquier mondial.
Espérons que les peuples et gouvernants africains prennent note des facteurs du changement géopolitique en cours. Cette modification du paysage géopolitique mondial doit être un point d’inflexion pour l’Afrique et un moment ou les africains orientent le cours de l’histoire vers une diplomatie moderne et pertinente et un développement durable.
Cheick Boucadry Traoré