Il faut d’emblée dire que les choses ne seront jamais plus comme avant dans notre pays après cette crise qui a perturbé les mentalités. Même si les mêmes veulent toujours rester au pouvoir, il n’en demeure pas moins qu’une partie de l’opinion se sent aujourd’hui trahie par ceux en qui elle avait placé ses espoirs. Pourtant, il reste incontestable qu’en démocratie, ce sont les grands partis qui restent les éternels favoris, quels que soient les appels au changement. Le charisme peut toutefois bouleverser la règle. Il suffit de se rappeler qu’ATT n’était pas militant d’un parti politique.
La crise qui perdure dans notre pays a mis en relief Ibrahim Boubacar Kéita, président du Rassemblement pour le Mali, qui ne s’est pas illustré dans l’extrémisme.
En effet, en politique, les extrêmes sont très sensibles et vulnérables pour ne pas dire périlleux. Comme tout démocrate, IBK a condamné le putsch du 22 mars, mais la suite des évènements a fait dire à certains qu’il est pro-putsch. En fait, Il ne s’est pas pour autant camouflé derrière une mise en scène de mauvais aloi tout à fait à contre courant de la réalité de notre pays, en s’acharnant contre des militaires que tout le monde contribue aujourd’hui à soutenir dans l’effort de guerre. Malgré tout, le président du Rpm, resté pareil à lui-même, devra sûrement répondre à des allégations de connivence avec des marcheurs, en période sensible, même si les Maliens ont aujourd’hui besoin d’un homme de poigne pour diriger le pays. En somme, pouvait-il aller à contre courant de son regroupement ou faire des omelettes sans casser des oeufs ? Il est vrai que c’est là où l’attendent ses pires adversaires.
Les élections ne se gagnent pas en solo, quoique que les évènements n’aient cessé de lui donner raison, dans ses prises de position liées à l’accord d’Alger, l’audit du fichier électoral et les concertations nationales dont le pouvoir a du changer le vocable pour opter pour la Commission dialogue et réconciliation mise en cause par le Coren, la Copam, etc. La mise en place, selon nos sources, d’un plan anti IBK est en marche. Le Fdr ne s’en cache pas et selon des indiscrétions, le projet compte démolir le charisme d’IBK à travers des révélations relatives au mandat mené de concert avec l’Adéma-Pasj et sa participation au consensus d’ATT, donc la gestion commune du pays au moment où il était Premier ministre et président de l’Assemblée nationale. Mais, selon les mêmes sources, les concepteurs de ce projet anti IBK rencontrent des difficultés, du moment qu’au premier tour chacun prêchera pour sa chapelle.
Il faudra pourtant compter sur le président du RPM au second tour, sans ignorer l’incontournable Adéma-Pasj, le plus grand parti du pays et la montée en puissance du mentor de l’Urd, dont la gestion à la Commission de l’Uemoa a fini par convaincre les technocrates les plus sceptiques de sa compétence. C’est dire que les cates ne sont pas joués d’avance. Mais comment détruire le charisme de l’homme au second tour, sans courir le risque de le renforcer au moment où deux les deux finalistes seront face à face? C’est pourtant là que le front anti IBK compte viser le talon d’Achille et miser gros avec ses grosses pointures, entre autres, l’Adéma-pasj, l’Urd… puisque les élections, à cause de la stature des candidats, ne se gagneront que par alliances. Nul ne sera président des Maliens s’il ne trouvera pas la bonne méthode de les rassembler autour de lui après une crise qui a laissé place à de douloureuses incertitudes et de profondes cicatrices. C’est aussi sur ce point que les équations sont à plusieurs inconnues, car nul ne sait si l’actuelle hiérarchie politique reste telle et pourra désormais convaincre des Maliens déçus et qui réclament le changement pour ne pas dire la sanction.
Ne faudra-t-il donc pas changer de direction d’analyse et se retourner vers les technocrates : Soumana Sako ou Cheik Modibo Diarra (si toutefois il est candidat) qui pourra sûrement profiter de l’occasion pour expliquer au peuple malien pourquoi il a autant été combattu par une bonne partie de la classe politique quand il a été nommé Premier ministre de pleins pouvoirs ? Serait-il présomptueux d’oublier les jeunes loups tels que Moussa Mara qui abat un travail de Titan, tient des discours très cohérents, notamment sur la situation sécuritaire du pays et Ousséyni Amion Guindo qui continue pas à pas de rassembler des partis et des hommes autour de lui. Ces jeunes jugés encore précoces pour une présidentielle, comptent aussi sur leurs chances en se basant sur la jeunesse, la lutte contre la corruption, le chômage et l’espoir du changement après le dur échec de la classe politique pour garantir la paix au Nord. Dans cette quadrature du cercle, les anti-Rpm auront-ils suffisamment d’arguments pour battre IBK ?
Fatoma Ballo