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Crise autour du complexe Loulo-Gounkoto : Barrick et l’État malien dans une épreuve de force judiciaire et économique

Le bras de fer entre l’État malien et la multinationale canadienne Barrick Mining Corporation, l’un des poids lourds mondiaux de l’or, atteint un tournant décisif. Ce lundi 16 juin 2025, Barrick a réaffirmé sa volonté de poursuivre l’arbitrage international qu’elle a engagé contre le Mali devant le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI). Cet arbitrage, déclenché en décembre 2024, vise à contester ce que l’entreprise qualifie de violations contractuelles majeures, sur fond de réforme du cadre légal minier au Mali.

Bamada.net-Alors que les tensions s’intensifient, le Tribunal de commerce de Bamako a, le même jour, ordonné la mise sous administration provisoire du complexe aurifère Loulo-Gounkoto, fleuron du portefeuille malien de Barrick. Un ancien haut fonctionnaire, Zoumana Makadji, a été désigné administrateur provisoire du site. Sa prise de fonction est prévue dans un délai de quinze jours. Bien que Barrick conserve pour l’instant la propriété juridique du complexe, cette décision est perçue par la compagnie comme une tentative directe de remise en cause de ses droits de gestion et d’exploitation.

Une escalade judiciaire sur fond de crise économique

La mise sous tutelle du site n’est que l’ultime épisode d’une série de mesures contraignantes prises par les autorités de Bamako depuis la fin de l’année 2024. Celles-ci incluent notamment la saisie d’environ trois tonnes d’or, le blocage des exportations minières, puis, en janvier 2025, la suspension pure et simple des activités du complexe Loulo-Gounkoto. Face à cette impasse, Barrick a exclu la production du site de ses prévisions annuelles, évaluant l’impact financier à plus d’un milliard de dollars de pertes.

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Au cœur de ce litige, la réforme controversée du Code minier de 2023. Ce texte a porté la part de l’État dans les projets miniers de 20 % à 35 %, tout en renforçant les exigences fiscales et en modifiant les conditions d’exploitation. Barrick estime que ces réformes constituent une rupture unilatérale des accords contractuels signés avec le Mali et une menace directe contre la sécurité juridique des investissements étrangers.

Arbitrage international et procédures internes en parallèle

La société canadienne a officiellement saisi le CIRDI à Washington, et le tribunal arbitral est désormais constitué. En parallèle, Barrick a déposé une demande de mesures conservatoires, destinée à préserver ses droits contractuels, dans un contexte où la situation évolue rapidement sur le terrain.

Sur le plan national, l’entreprise conteste avec fermeté la nomination d’un gestionnaire tiers pour Loulo-Gounkoto. Elle affirme que ses filiales demeurent les propriétaires légaux du complexe et que toute tentative de transfert de contrôle constitue une infraction flagrante au droit malien et international.

Barrick accuse également les autorités maliennes d’intensifier les pressions à travers des arrestations arbitraires de certains de ses employés, qu’elle considère comme une forme d’intimidation inacceptable. Selon l’entreprise, ces méthodes compromettent non seulement le dialogue, mais aussi l’attractivité du Mali en tant que destination d’investissement.

Un partenaire qui se dit « ouvert mais pas naïf »

Malgré les tensions croissantes, Barrick affirme rester attachée à une résolution négociée du différend. Le PDG du groupe, Mark Bristow, a récemment réitéré la disponibilité de la compagnie à s’asseoir autour de la table avec les autorités maliennes, à condition que les discussions soient menées dans un esprit de respect mutuel, de transparence et d’adhésion aux règles contractuelles en vigueur.

Il rappelle notamment que la compagnie a accepté plusieurs concessions, dont un accord unique autorisant le Mali à rapatrier 20 % de ses revenus miniers, une dérogation exceptionnelle dans le secteur selon Barrick, et jamais accordée à aucun autre investisseur étranger.

Un site stratégique à l’arrêt, un impact lourd pour le Mali

Le complexe Loulo-Gounkoto, exploité respectivement depuis 2005 et 2012, représente un actif stratégique pour l’économie nationale. Détenu à 80 % par Barrick et à 20 % par l’État malien, le site était jusqu’en 2024 l’un des premiers contributeurs aux recettes d’exportation du pays, à l’emploi local et aux investissements sociaux. Sa mise à l’arrêt entraîne des pertes fiscales colossales, affecte les chaînes d’approvisionnement, et fragilise davantage un budget national déjà sous tension dans un contexte marqué par des défis sécuritaires, humanitaires et économiques majeurs.

Une affaire à portée régionale et internationale

La bataille juridique entre Barrick et le Mali s’annonce longue, complexe et à fort potentiel de répercussions. Elle est suivie de près par d’autres acteurs du secteur minier opérant en Afrique de l’Ouest, qui redoutent que le contentieux ne devienne un précédent inquiétant en matière de sécurité juridique des investissements. Plusieurs analystes estiment qu’un échec du dialogue entre le Mali et Barrick pourrait refroidir l’intérêt de nouveaux investisseurs étrangers dans la région sahélienne.

Alors que les positions semblent irréconciliables pour l’instant, les regards se tournent désormais vers le CIRDI et les futures décisions du tribunal de commerce de Bamako. Le sort du complexe Loulo-Gounkoto pourrait bien devenir un test décisif pour l’attractivité du Mali dans le secteur minier, pilier économique national, mais aussi pour la capacité du pays à concilier souveraineté économique et respect des engagements contractuels internationaux.

 

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Moussa Keita

 

Source: Bamada.net

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