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Poterie : Une affaire de femmes, à Touna, dans le Centre du Mali

Bla, 24 mai (AMAP) Touna, une localité, située à 21 km du chef-lieu du Cercle de Bla (Centre), sur la Route nationale (RN6) sur l’axe Bla-Ségou, au Mali. Dans le quartier périphérique des forgerons, à Noumouna, les habitants pratiquent le métier de forgeron. Mais l’activité principale des femmes des forgerons est la poterie. Elles la pratiquent pour subvenir à leurs besoins. Au Mali, particulièrement à Bla, la poterie est exercée par une seule couche sociale : les femmes de forgeron.

Le canari est un ustensile très utilisé à beaucoup de fins au Mali. Il est, parmi tant d’autres, fabriqué en terre cuite et est de diverses formes, couleurs. Le canari, en général, est divers et varié selon sa provenance.

A Touna (une des dix-sept communes de Bla), nous nous sommes rendu chez la vieille Ballo Mariam Fané, une battante, très engagée pour la cause des potières. Agée de soixante-quinze ans, mariée et mère de sept enfants, elle nous apprend l’histoire de son métier de potière.

« C’est après mon mariage que j’ai appris cette activité auprès de ma belle-mère. Je la suivais dans tous ses mouvements. Un jour, elle m’a demandé si je voulais apprendre la poterie. Très contente, je lui ai rapidement répondu oui », se souvient Mariam Fané.

Selon elle, comme les femmes de forgerons ne peuvent pas travailler le fer, certaines d’entres elles s’occupent avec la poterie et d’autres petites activités. « C’est en 1980 que j’ai fabriqué mon tout premier canari avec de jolis motifs », ajoute notre interlocutrice.

« Ma belle-mère fabriquait déjà beaucoup de sorte de canaris (abreuvoirs de volaille, jarres). Après quelques expériences, j’ai essayé d’ajouter d’autres comme le couscoussier et l’encensoir car je les avais déjà vus au marché de Ségou lors d’une visite là bas », poursuit Mariam Fané.

C’est à Niando, un village à 2 km de Touna, sur une élévation, que les potières extraient l’argile, la matière première de la poterie. Un travail si difficile que « nos propres filles n’aiment pas le pratiquer ». Selon Mme Ballo Mariam Fané, une paresseuse ne peut pas faire la poterie car c’est un travail très difficile et ça demande l’effort de tout le corps surtout lors du malaxage.

« La fabrication d’une pièce de poterie commence par le mélange des terres (argile, marne, silice) mais, chez nous, à Touna, on ne trouve que de l’argile noire. L’argile est malaxée avec la poudre d’un vieux canari concassé et on le fait manuellement. La pâte obtenue est conservée au repos dans un grand récipient pendant cinq à sept jours, Pour que le mélange pourrisse », explique Mariam Fané.

Après, c’est le modelage qui consiste en la mise en forme à partir d’une boule de terre par la pression des doigts jusqu’à l’obtention de l’objet désiré. « Nous vendons les produits chez nous, mais certaines commerçantes aussi viennent acheter avec nous pour revendre à Ségou, à Bla et même dans d’autres Régions du Mali ».

Le gain ? Il sert à assurer les charges de la famille. « Souvent à l’achat du trousseau de mariage de nos filles. En période de soudure également, on vient en aide à nos maris », dit-elle.

Le canari est utilisé par beaucoup de personnes, certains l’achètent pour la préparation des médicaments traditionnels, d’autres pour utiliser comme jarre, certains pour préparer du repas, etc.

Alima Ballo est âgée de 60 ans, Elle a appris la poterie auprès de sa mère, depuis l’âge de 9 ans. «  Mon mari ne s’est pas opposé à mon activité », dit celle qui exerce ce métier depuis trente ans. « Beaucoup de gens passent leurs commandes de fourneaux, jouets d’enfants, jarres, etc. Le prix du canari varie selon la forme, la qualité et la période », explique-t-elle. « Maintenant que je n’ai plus assez de force pour pleinement faire le travail, j’emplois des femmes pour m’aider contre rémunération. Par jour, je peux fabriquer dix jarres. Si elles sont de petite taille, je peux en faire vingt », nous dit notre interlocutrice.

Alors que la jarre est vendue souvent à 1.500 Fcfa, les petits canaris sont écoulés à 250F, les fourneaux à 1.250F. « Souvent, je gagne mais des fois, je perds. Je peux fabriquer quinze jarres et, au moment de la cuisson ou même après cette étape, tout se brise. Les jours se suivent mais ne se ressemblent pas », dit philosophiquement Alima Ballo.

Chaque grande famille de forgerons a son site de cuisson et les fours à bois sont derrière la ville car la chaleur qu’ils dégagent est très forte. « Tous les revenus de ce métier sont utilisés dans nos foyers, notamment pour l’éducation des enfants (coopérative, achat de fournitures scolaires), l’habillement et, même souvent, on aide nos maris avec de l’argent en espèce.»

Les ustensiles en terre cuite ont d’autres utilités comme nous dit Salika Traoré, 75 ans, « Nous les utilisons pour conserver les repas, les semences et même pour filtrer l’eau. Il y a certaines utilités qu’on ne doit pas vous dire. Nos vieilles personnes nous disaient que le repas qui est préparé dans un canari a plus de force que celui préparé dans une marmite.», nous révèle Salika

La poterie fait partie de ces activités culturelles en voie de disparition dans beaucoup de localités maliennes. Parce que les filles d’aujourd’hui ne s’intéressent pas à cette activité et l’accès à l’argile n’est pas facile. La matière première devient très rare.

MO/MD (AMAP)

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