Principalement ce sont les pathologies respiratoires aiguës et cardio-vasculaires. La fumée provenant du bois et du charbon de bois représente 43% de la pollution atmosphérique.
Le thème de la Journée mondiale de l’environnement cette année porte sur la pollution de l’air. Voilà pourquoi la 20e édition de la Quinzaine de l’environnement qui se déroulera du 5 au 17 juin prochain à Bamako sera consacrée aussi à ce problème environnemental. Le choix de ce thème se justifie aussi par le fait que le Mali, vaste pays continental, est confronté à de multiples défis environnementaux parmi lesquels la pollution de l’air figure en bonne place. Face à ce défis, notre pays a consacré l’article 15 de la Constitution de février 1992 à la protection de l’environnement et de la promotion du cadre de vie. C’est donc un devoir pour tous et pour l’Etat. Dans ce cadre, des initiatives ont été prises pour sensibiliser et prévenir les populations des risques et enjeux liés aux problématiques du développement durable en général, à l’environnement et à la santé de façon spécifique. Malgré ces initiatives, la pollution de l’air demeure l’un des défis majeurs auquel la population malienne est confrontée.
Depuis 1999, le ministère en charge de l’Environnement, à travers l’Agence de l’environnement et du développement durable (AEDD), organise chaque année une Quinzaine de l’environnement. Cet évènement phare s’inscrit entre deux dates majeures : le 5 juin, Journée mondiale de l’environnement et le 17 juin, Journée internationale de lutte contre la désertification. La Quinzaine de l’environnement se déroule sur l’ensemble du territoire national et constitue le cadre approprié pour mener une campagne de communication à grande échelle.
C’est dire que les activités de communication porteront en grande partie sur la pollution de l’air. Elle se définit comme la contamination de l’environnement intérieur ou extérieur par un agent chimique, physique ou biologique qui modifie les caractéristiques naturelles de l’atmosphère. Elle se manifeste par la présence de particules fines (les aérosols, et notamment de carbone). En milieu urbain, plus particulièrement dans les centres urbains, la qualité de l’air devient de plus en plus préoccupante à cause de cette pollution. Plusieurs facteurs contribuent à la dégradation de l’air atmosphérique, concourant à la détérioration du cadre de vie de la population.
TROIS MILLIONS DE DÉCÈS PAR AN – Selon Amadou Camara, directeur national de l’assainissement et du contrôle des pollutions et nuisances (DNACPN), les causes de la pollution de l’air sont nombreuses et sont dues à l’action volontaire et involontaire de l’homme. Il cite l’exemple sur le nombre croissant des moteurs, notamment les véhicules, les unités industrielles, la mauvaise ou l’absence de gestion des ordures (déchets solides et liquides), les activités ménagères qui produisent de la fumée. Ce dernier point représente 43% de la pollution atmosphérique.
Autres facteurs contribuant à la pollution de l’air, explique Amadou Camara, seraient les brûlages des pneus et des déchets, ainsi que la poussière. Selon notre interlocuteur, la pollution de l’air est un domaine extrêmement vaste, très complexe et multiforme. « Beaucoup d’activités que les gens mènent, émettent de l’air qui peut être polluant ou non. Les moteurs des véhicules émettent des gaz qui sont le monoxyde de carbone et les oxydes d’azote. Le bois et le charbon de bois utilisés par les ménagères dégagent de l’air polluant. Les unités industrielles rejettent des matières polluantes que sont l’oxyde d’azote et l’oxyde de souffre. Il ne faut pas non plus oublier le secteur agricole qui est responsable d’une partie de la pollution de l’air par l’utilisation de machines, mais aussi par le recours aux produits phytosanitaires, aux épandages et aux pesticides », a détaillé M. Camara, avant d’évoquer la problématique de l’aménagement des rues et du manque de nettoyage.
Evoquant les conséquences de la pollution de l’air, notre interlocuteur dira que les polluants sont nocifs pour la santé. En effet, explique-t-il, la pollution de l’air à l’extérieur comme à l’intérieur entraîne des maladies respiratoires aiguës (pneumonie, asthme), et des maladies cardio-vasculaires qui peuvent être mortelles. Il précisera que ces maladies respiratoires constituent 30% des consultations dans les hôpitaux. En effet, ce sont les couches vulnérables, notamment les enfants et les personnes âgées, qui sont plus touchées. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), quelque 3 millions de décès par an ont pour origine l’exposition à la pollution de l’air extérieur. La pollution de l’air à l’intérieur des habitations peut avoir aussi des effets meurtriers. En 2012, on estimait à 6,5 millions le nombre de décès liés à la pollution de l’air intérieur et extérieur confondus (soit 11,6% à l’échelle mondiale).
Au Mali, selon le système local d’informations sanitaires édition 2016 de la direction nationale de la santé, dans son rapport sur l’état de l’environnement, les maladies dues à la qualité de l’air ont progressé d’année en année jusqu’à atteindre plus d’un million de cas en 2015, soit 6.938 cas pour 100.000 habitants. En 2017, le nombre de cas retombera à un peu plus de 300 000, soit une baisse d’environ 300% sans qu’on ne puisse en donner les raisons.
La situation actuelle dans nos villes exige de prendre des mesures adéquates pour améliorer la qualité de l’air. Selon le directeur national de l’assainissement et du contrôle des pollutions et des nuisances, ces mesures peuvent être l’interdiction d’utiliser du charbon de bois et le bois de chauffage, l’utilisation de combustibles, l’amélioration de l’efficacité des moteurs des véhicules, l’interdiction de l’importation des vieux véhicules et une vaste campagne de sensibilisation des ménagères. M. Camara invite aussi nos concitoyens à arrêter de brûler les ordures dans la ville et de trouver une solution au problème des déchets. La lutte contre la pollution de l’air, soutient-il, ne saurait aboutir sans la réalisation d’ouvrage d’infrastructures d’assainissement adéquates en milieu urbain, à la protection de l’environnement et à l’application des textes et dispositions règlementaires en matière d’assainissement.
Lassina Coulibaly est membre d’un Groupement d’intérêt économique (GIE) de ramassage d’ordures. Selon lui, la solution de la pollution de l’air n’est pas liée aux moyens matériels et humains mais au comportement et à la mentalité des citoyens. Parlant des sanctions, notre interlocuteur rappelle que la législation dit que toute personne humaine et morale effectuant des actions provoquant la pollution de l’air est tenue au paiement d’amendes et de réparations civiles.
Du côté de la population, beaucoup semblent méconnaître les conséquences de leurs actes sur l’environnement. C’est le cas de l’automobiliste Drissa Diallo qui pense que circuler en voiture ne contribue en aucune manière à la pollution de l’air. La ménagère Aminata Diarra déplore qu’il n’y ait pas d’autres alternatives que d’utiliser le charbon de bois ou le bois de chauffage. « Même s’il y a d’autres alternatives, elles ne sont pas à la portée de tous les ménages. Par exemple, le gaz butane n’est pas à la portée des ménages à revenus faibles», s’exclame-t-elle. Pourtant, le gaz n’est pas plus cher aujourd’hui que le charbon de bois.
Anne-Marie KEÏTA
Source: L’ Essor- Mali