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Police nationale : La nouvelle crise malienne au devant de la scène

Dans la nuit du jeudi 4 au vendredi 5 avril dernier, les populations de Bamako ont, une nouvelle fois, frôlé le pire. La raison ? Des policiers appartenant au Groupement mobile de sécurité (Gms) se sont affrontés en faisant usage d’armes de guerre. Le samedi, un détachement mixte, constitué de soldats de la police militaire, de gendarmes et de gardes, a investi le Gms pour désarmer les policiers et mettre fin au désordre qui, de jour en jour, menaçait l’unité de la police et surtout la sécurité des populations. Des affrontements s’en sont suivis faisant un mort et un blessé. Que s’est-il passé au sein du Gms? Pourquoi ce regain de tension entre policiers ? Pourquoi l’Etat a-t-il tardé à gérer cette rivalité entre policiers ? Réponses.

GMS groupement mobile de securite policeLes combats entre policiers ont duré une bonne partie de la nuit. Et pour échapper à cette folie destructrice, des populations de certains quartiers avoisinant le Gms ont été obligées de quitter leurs domiciles pour se réfugier dans d’autres quartiers de la capitale.

Pourquoi cette nouvelle tension au sein du Groupement mobile de sécurité, la plus grande garnison policière de Bamako? Qui en sont les responsables ?

Pour mieux comprendre la situation, il est utile de préciser que le Groupement mobile de sécurité abrite le plus gros contingent de la police malienne. En effet, ce groupement compte 4 compagnies de maintien d’ordre (MO), avec un effectif de près de 500 éléments pour chaque compagnie. Il y a également une compagnie chargée de la circulation routière (Ccr).

Fort du nombre et doté d’un équipement conséquent, le Gms s’est vite imposé à la fois comme une « unité » d’élite et le fer de lance du syndicalisme au sein de la police nationale. En effet, dans les années 1994, à la création du syndicat de la police, le groupement a obtenu plusieurs postes clés au sein du bureau syndical, au détriment des autres unités et brigades qui, même réunies, ne faisaient pas le poids devant l’effectif du Gms. Aussi, le siège du syndicat a été basé dans la cour du Groupement au quartier populaire de N’Tomikorobougou.

Au fil du temps, le pouvoir du Gms s’est accentué sur le syndicat. Conséquence : la rupture entre les différents corps de la police. C’est ainsi que, successivement, les commissaires et les inspecteurs décident de quitter la Section syndicale de la police, pour créer leurs propres syndicats. Dès lors, la section syndicale de la police est devenue une «affaire de sous officiers », pour ne pas dire un syndicat du Gms.

En 2011, des divergences entre «Gmsiens» secouent la Section syndicale qui, dès sa création, en 1994, s’était affiliée au Syntade (Syndicat des travailleurs de l’administration d’Etat), membre de l’Untm (Union nationale des travailleurs du Mali).

Ces divergences ont finalement conduit à la création d’un syndicat dissident, conduit par Siméon Keita. Celui-ci et ses troupes s’alignent derrière la Cstm (Confédération syndicale des travailleurs du Mali).

Dès lors, au sein de la police ou plus précisément du Gms, deux syndicats « rivaux» se regardaient en chiens de faïence. Il y avait le premier syndicat qui était dirigé par Tidiani Coulibaly (porté disparu depuis le coup d’Etat) et le second par Siméon Keita, qui serait recherché depuis samedi dernier, de même que certains de ses compagnons.

A la création du syndicat dissident (celui de Siméon), l’administration de la police avait été fortement soupçonnée d’avoir divisé les policiers, afin de mieux contrôler les syndicalistes de l’institution.

C’est dans cette atmosphère de haine et de division entre policiers, que le coup d’Etat de mars 2012 est intervenu. Aux premières heures du coup, Siméon et ses troupes du Gms font allégeance à la junte de Kati et se mettent à sa disposition. Les militaires putschistes n’attendaient que ça.

La Section syndicale de la police aurait été ainsi dotée d’armes de guerre et de véhicules, en provenance de Kati. Aussi, un important lot d’armes, de munitions et de véhicules provenant des stocks de la police, est confisqué et mis à la disposition du syndicat de Siméon. Un syndicat qui devient le bras séculier de la junte. En effet, plusieurs arrestations et autres « missions » décidées à Kati étaient exécutées par ces policiers-syndicalistes armés jusqu’aux dents et qui étaient hors de tout contrôle de la hiérarchie policière et même du ministre de la sécurité.

A ce sujet, un commissaire, sous couvert de l’anonymat, nous explique : «Comment des policiers sont-ils parvenus à avoir des dotations en armes et munitions qui ne sont pas du stock de la police malienne ?». Cette question est largement partagée par de nombreux policiers, notamment les officiers, qui pointent du doigt les autorités, principaux responsables du pourrissement de la situation au sein de la police.

Le laxisme des autorités

Depuis des mois, la situation ne cessait de se dégrader au sein du groupement au delà de la police malienne. Aux incessants problèmes syndicaux, sont venus se greffer d’autres problèmes comme celui relatif aux avancements en grades accordés (au mois de décembre 2012) à une vingtaine de policiers, tous membres du syndicat de Siméon (lui-même bénéficiaire de cette mesure) sur des décisions du président Dioncounda Traoré et du ministre de la Sécurité intérieure et de la protection civile, général Tiéfing Konaté. Comme il fallait s’y attendre, ces avancements provoquent un tollé au Gms et dans les autres unités. En effet, les policiers bénéficiaires (officiers et sous officiers) sont indexés d’être proches de Kati. La mesure a été aussi bien dénoncée par les commissaires que par des policiers du Gms qui s’estiment trahis par leurs compagnons.

Face à la contestation, le président Dioncounda et le ministre Tiéfing Konaté avaient rapporté la décision de promotions au mois de décembre. Cependant, ils reviennent encore à la décision initiale, le 9 janvier 2013. Des décrets et des arrêtés signés respectivement par le président de la République et le ministre de la sécurité accordent à nouveau les avancements aux mêmes policiers. Dioncounda et Tiéfing ont-ils agi sous la pression de Kati? Certains policiers l’affirment volontiers.

Il faut dire que dès lors, la tension n’a cessé de monter au Gms. Et les contestataires de la décision décident alors de la création d’un nouveau syndicat dit du renouveau. Objectif : dénoncer les avantages accordés à Siméon et ses hommes.

Au même moment, les commissaires et les inspecteurs fustigent les agissements du camp Siméon. «A plusieurs reprises, nous avons demandé le désarmement de ces policiers. Nous avons attiré l’attention du ministre sur les dangers que cela représentait à la fois pour la police et pour les populations. Mais nous n’avons pas été écoutés», affirme le commissaire.

En clair, l’Etat est pointé du doigt au sein de la hiérarchie, après les derniers événements survenus au Gms. A en croire de nombreux policiers, si les autorités avaient pris leurs responsabilités, le« problème du Gms aurait déjà trouvé une solution ». Mais à défaut, le groupement est devenu une «poudrière»,  au sein de la police.

Le laxisme des autorités de la transition, l’ingérence de certains militaires dans les affaires de la police, l’indiscipline, l’appât du gain, et surtout l’insubordination, ce sont là autant d’actes qui sont à la base des dérapages au niveau du Gms. Dont ceux qui ont conduit aux violents affrontements de la fin de semaine dernière. L’opération de désarmement de samedi au Gms s’est soldée par un soldat tué, un policier blessé, 16 policiers interpellés, et des armes et des munitions saisies, selon un communiqué du gouvernement.

Et si les autorités avaient pris leurs responsabilités, bien avant ? Pour prévenir, au lieu de devoir (maintenant) guérir.

C.H Sylla   

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