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Poissons importés : ATTENTION AU VIRUS DU TILAPIA

La FAO a donné l’alerte il y a 3 mois sur l’existence d’un virus à l’origine d’une maladie contagieuse. Beaucoup de pays à travers le monde ont déjà interdit l’importation de ce type de poisson

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Jamais le poisson importé n’a connu autant de controverse dans notre pays comme dans la plupart des pays importateurs de ce produit. En effet, il y a bientôt trois mois, le Système mondial d’information et d’alerte rapide (SMIAR) de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a donné l’alerte sur une maladie hautement contagieuse qui se propage chez le tilapia, l’un des poissons les plus consommés au monde.
Selon l’organisme onusien, l’épidémie devra être appréhendée avec soin surtout dans les pays qui importent le tilapia. La FAO a ainsi sommé les pays importateurs de prendre des mesures appropriées pour la gestion des risques tels que la multiplication des tests de diagnostic, le renforcement des certificats de santé, l’instauration des mesures de quarantaine et le développement de plans d’urgence. Depuis, la plupart des pays importateurs ou ceux de transit de ce poisson ont développé des initiatives pour minimiser les risques. Après la République démocratique du Congo et le Bénin, c’est la Côte d’Ivoire qui a interdit depuis le 7 septembre dernier l’importation et la commercialisation du tilapia en provenance de cinq pays (Colombie, Équateur, Égypte, Israël et Thaïlande).
Pour un pays importateur comme le nôtre, l’annonce d’une telle menace effraye plus d’un car le poisson importé est consommé par la plupart des ménages. Moins cher que le poisson d’eau douce local, le poisson importé est aussi apprécié pour sa saveur. En absence de toute statistique fiable en la matière, on constate que le marché bamakois absorbe une grande quantité de poissons de mer et d’eau douce importés. De nos jours, ce commerce a franchi les limites de la capitale pour gagner d’autres grandes villes où le maquereau, le chinchard, la dorade ou autres tilapias importés sont consommés en grande quantité avec «l’atiéké», ce couscous de manioc venu de la Côte d’Ivoire. Le «Djouka», ce couscous à base de fonio et d’arachide, est aussi apprécié avec du poisson.
La multiplication de poissonneries dans nos villes atteste l’engouement de nos concitoyens pour les poissons importés. Nos commerçants acheminent les cargaisons de poissons à partir des ports de Dakar (Sénégal), de Nouakchott (Mauritanie), de Casablanca (Maroc), d’Abidjan (Côte d’Ivoire). Malgré le long voyage, les prix de ces poissons sont très abordables sur le marché. Le kilogramme est vendu entre 1200 et 1500 Fcfa. La vente au détail profite également à beaucoup de femmes. «Aujourd’hui, nous n’avons rien à envier aux pays côtiers. Dans notre pays, on peut trouver toutes les variétés de poissons et de fruits de mer. Des dorades aux sardines en passant par les poulpes, les calamars et même de petits squales dont la chair est très appréciée quand elle est servie avec le riz», commente un restaurateur que nous avons croisé au marché de Médine.

EXCELLENT GOÛT. Le poissonnier Malimag (Société d’importation de poissons) est spécialisé dans l’importation, la distribution et la vente en gros des produits de mer. Son gérant Abderrahmane Cissé explique que sa société importe principalement du Sénégal et de la Mauritanie. «Le poisson et les fruits de mer, c’est notre affaire. On en importe pendant toutes les périodes de l’année en fonction des variétés disponibles chez nos fournisseurs. Par exemple, actuellement nous n’avons que des dorades. Mais pendant la période de grande pêche, nous importons du Mérou, de la dorade, du chinchard, de la baudroie, des limandes, des roussettes, des seiches, des soles, des poulpes et des calamars», énumère-t-il.
Selon notre interlocuteur, le chinchard et la dorade sont les deux espèces les plus appréciées dans notre pays. «Ces deux types de poissons constituent l’essentiel de nos importations. Ils ont un excellent goût, semblable à celui des silures et des poissons d’eau douce», confie le commerçant qui estime que la consommation de poissons dans nos villes rivalise actuellement avec celle de la viande, surtout pendant les périodes de pic comme le Ramadan.
Pour s’en convaincre, il suffit de faire le tour des poissonneries de la capitale. Beaucoup d’importateurs de poissons sont installés aux Halles de Bamako. Ici, des centaines de conteneurs frigorifiés y déversent chaque jour leurs contenus. Des points de vente proposent diverses variétés de poissons. C’est le tilapia importé qui semble être le plus prisé. Ce poisson d’eau douce importé est cédé au détail entre 1500 Fcfa à 1300 Fcfa le kilogramme. Les clients affluent toute la journée et les revendeurs se frottent les mains comme Mamadou Guindo. «Beaucoup de Maliens connaissent le tilapia parce qu’il est pêché dans nos fleuves. Cependant, le tilapia local est trop cher, c’est ce qui explique l’engouement pour le tilapia importé. Il y a un mois, je pouvais vendre plus de 200 kg de poissons par jour. Mais depuis l’annonce de ce virus, je ne fais même pas 30 kg par jour», raconte le commerçant.
Mme N’Diaye Fanta Traoré, une ménagère, rencontrée devant une poissonnerie, n’a pas caché son inquiétude face à cette mauvaise nouvelle. «J’ai appris cette nouvelle il y a juste une semaine à travers une radio de la place. J’avoue que cela m’inquiète d’autant plus qu’il s’agit d’un poisson très prisé chez nous », dit notre interlocutrice qui explique que le tilapia local se vendait entre 2500 Fcfa à 4000 Fcfa/kg selon les catégories. Avec le développement de la pisciculture dans notre pays, son prix a baissé de 3500 Fcfa à 2000/kg selon les tailles. Mais le prix du tilapia importé est entre 1300 et 1500 Fcfa/kg selon les points de vente.
Quant à Mme Diarra Zeynabou Cissé, elle a décidé de ne plus acheter le tilapia importé depuis qu’elle a appris la présence du virus. «Les poissons importés de façon générale sont à la base de beaucoup de nos soucis de santé. Les conditions d’importation sont exécrables et leur qualité reste douteuse. C’est à cause de la cherté de la viande et du poisson local que nous achetons ces poissons importés. Mais, moi j’ai arrêté», dit-elle avant d’inviter les autorités à prendre les dispositions nécessaires pour faire face à cette situation.
Au Mali, l’interdiction du tilapia importé n’est pas encore à l’ordre du jour. Ce qui fait qu’on en trouve en vrac dans nos marchés. Si les importateurs se frottent les mains, les clients sont aujourd’hui totalement désemparés à cause du virus que le poisson importé peut avoir. «On ne sait plus à quel saint se vouer. Le poisson local est trop cher. Tout comme la viande. Le poisson importé sur lequel tout le monde se rabat constitue aujourd’hui un danger pour la santé. Depuis l’annonce de ce virus, les consommateurs ont vraiment peur», exprime le chef de famille Mamadou Samaké.
Face aux inquiétudes légitimes des consommateurs, nous avons approché les autorités en charge de la santé animale. Mais impossible de trouver un interlocuteur en l’absence du premier responsable en congé. Les rares personnes qui ont accepté de parler appellent les consommateurs à la prudence sans donner le moindre détail. Aux autorités maintenant de réagir face à cette situation.

Doussou DJIRE

 

Source: Essor

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