Au Mali, de grands partis ont émergé depuis l’avènement du multipartisme intégral, en 1992. La plupart d’entre eux n’ont qu’un seul leader visible sur la scène, sans une figure pour le seconder et assurer la relève.
« À part l’Adema, qui est en train de faire sa mue, aujourd’hui tous les partis politiques ne tiennent qu’à une seule personne, ou presque ». C’est le constat dressé par Woyo Konaté, Docteur en philosophie politique et enseignant à l’Université des sciences juridiques et politiques de Bamako. Au Mali, chaque parti politique est sous le monopole de son leader. À part lui, rares sont les membres du parti qui sont mis en lumière. « C’est la nature même de la politique qui veut que les différentes formations qui s’expriment sur le terrain démocratique soient tirées par des personnalités très charismatiques. Au Mali, en Afrique et ailleurs, ces partis sont identifiés à des personnes plutôt qu’à des formations politiques pures et dures », tente de plaider Cheick Oumar Diallo, Secrétaire politique de l’ADP Maliba. « Aux États-Unis, quand on parle du parti républicain on pense à Trump et pour le parti démocrate à Hillary Clinton. Les visages ont pris le dessus sur les partis, de telle sorte que quand on parle de l’ADP, c’est Aliou Diallo, de l’URD, c’est Soumaila Cissé et du RPM, c’est IBK. C’est une tournure des choses qui pose le problème de la pluralité des personnalités au sein des différentes formations », poursuit-il. Le multipartisme a été pourtant une exigence fondamentale en 1991, mais il a abouti aujourd’hui à « un désordre ». « Tous les statuts et règlements des partis politiques sont les mêmes. Leur objectif, c’est d’obtenir le financement de l’État », dénonce Cheick Diallo, Secrétaire administratif chargé des structures au parti ASMA. Il en appelle à un « centralisme démocratique » et non à « des partis unipersonnels ».
Quelle incidence ?
Les partis deviennent orphelins quand l’étoile de leur chef s’éteint, faute de dauphin. « Quand ATT a laissé le pouvoir, le PDES est allé en déconfiture. C’est la même chose avec les soubresauts que connait l’Adema depuis le départ d’Alpha Oumar Konaré », affirme Cheick Oumar Diallo, ajoutant que « cela pose la question de l’organisation et du fonctionnement des partis politiques ». Pour le Dr Woyo Konaté « les valeurs et l’idéologie sont reléguées au profit de celui qui finance ». Des réalités qui biaisent l’animation de la chose politique. Pour un renouveau politique, « il faut laisser s’exprimer des visages différents de ceux qu’on connait depuis des dizaines d’années », souhaite le Secrétaire politique de l’ADP Maliba, qui estime que son parti est un exemple.
Journal du mali