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Orpaillage traditionnel : Vers une catastrophe écologique sur le fleuve Sankarani à Sélingué

Le fleuve Sankarani, dans la commune de Sélingué, présente un spectacle de désolation depuis des mois à Falabacoura (commune de Baya) et à Sokorô Danga, dans le cercle de Yanfolila, où prospère l’orpaillage par le dragage sur les cours d’eau. L’eau du fleuve est de plus en plus boueuse. La biodiversité aquatique et les populations riveraines sont en souffrance face à cette pollution sans précédent. Pourtant, aucun début de mesure n’est encore en vue. Que se passe-t-il pour que le Sankarani soit ainsi pollué ?

 

Le fleuve Sankarani  traverse les territoires de la Guinée, de la Côte d’Ivoire et du Mali. C’est un affluent du Niger en rive droite. Le fleuve représente une fierté pour les habitants de Sélingué, de Komana et Bougoudalé car il accueille l’un des barrages hydro-électriques du pays le plus important, dans la petite localité de Baya. Il est ainsi une source importance de développement pour les localités traversées dominée par l’agriculture et la pêche.

Un constat amer sur le fleuve

Depuis l’année dernière, ses populations riveraines y voient leur fleuve, leur patrimoine, subir les affres d’une pollution sans pourvoir rien y faire.

« La couleur de notre fleuve a vraiment changé, c’est presque de la boue maintenant », constate un habitant.

Le fleuve a viré du gris clair à l’ocre. Les dépôts argileux sont de plus en plus denses. Ce changement a déjà gagné d’autres localités du pays traversé par le fleuve. La plupart des activités menées par les populations sur le fleuve sont quasi à l’arrêt à cause des risques alimentaires et la paupérisation.

En plus, des risques sanitaires importants sont à craindre. Dans plusieurs petits hameaux installés sur le cours du fleuve, celui-ci constitue la seule ressource pour la consommation, la cuisson des aliments et les autres besoins domestiques en eau.

La source potentielle de la pollution…

Les informations fournies par les habitants font état de la présence d’orpailleurs clandestins en amont du fleuve. Ces derniers utilisent anarchiquement le fleuve pour laver la terre retirée des carrières aurifères. Ce qui expliquerait l’aspect boueux du fleuve.

L’inquiétude est alors très grande au regard de la source de pollution. Parce que, la pratique de l’orpaillage s’accompagne souvent avec l’utilisation du mercure pour amalgamer les particules et paillettes minuscules d’or. Le mercure est un métal lourd très dangereux pour la santé des hommes, des animaux et pour l’environnement. Une partie importante du mercure est absorbée par la matière organique et se retrouve directement dans les rivières et fleuves. Dans le cas où les pépites et les paillettes d’or sont facilement récupérables par gravité, la technique du mercure n’est pas appliquée par les orpailleurs qui réduisent ainsi leurs coûts de production.

Aussi, un état des lieux urgent doit-il être réalisé pour évaluer les risques actuels de l’usage de l’eau Sankarani. Adama Berthé, expert consultant sur l’environnement révélé qu’une étude faite fait état de l’existence du cyanure dans toutes les rivières, qui entourent les sites d’orpaillage de notre pays. « Cette situation présente un danger permanent pour les populations riveraines, eu égard aux effets néfastes de ce produit chimique », a-t-il averti. Il a souligné que l’orpaillage clandestin, qui connaît un développement fulgurant et sauvage ces dernières années, touche la quasi majorité des régions de notre pays. Avant d’indiquer que l’extraction de l’or est exercée en toute illégalité par plus de 500 mille personnes.
« La non-maîtrise des bonnes pratiques entraîne la prolifération de maladies diverses et transmissibles ; l’utilisation des enfants sur les sites d’exploitation accroît le taux de déscolarisation (…) les problèmes d’insécurité et de cohabitation sociale, générés par un flux massif et non maitrisé de la population », a rappelé l’expert.

Aujourd’hui, l’orpaillage artisanal, par son ampleur, modifie durablement le paysage social, économique et environnemental malien. La situation étant transfrontalière, les gouvernements, maliens, ivoiriens et guinéens doivent de concert réfléchir à des solutions adéquates. Si rien n’est fait, c’est le fleuve Niger, source de vie des Maliens car très utile dans le secteur agricole, qui risque d’être contaminé dangereusement.

Paul N’GUESSAN

Mali Horizon

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