Suite à l’attaque contre Ogossagou le 23 mars dernier, la marraine de Tabital Pulaaku, Adame Ba Konaré, s’est indignée à travers une lettre ce samedi 30 mars 2019 appelant tous les Maliens, tous les Peuls particulièrement aussi bien que les Dogons à plus de rationalité vis-à-vis de cette situation calamiteuse.
« Les images d’Ogossagou nous taraudent; elles peuplent nos nuits, nous coupent le sommeil avant de nous couper le souffle avec tant de regards inoubliables d’enfants apeurés et désemparés, hurlant aux côtés de leurs mères inanimées baignant dans des fanges de sang qu’en vain, ils supplient de leurs cris de se réveiller », a-t-elle déploré pour ensuite montrer ce qui lui aurait le plus choqué dans cette bavure : « Un regard singulier, celui d’un enfant pleurant sur le dos d’un garçon, qui peut être son frère, le visage sillonné de larmes de sang, les traits tellement marqués par l’angoisse qu’à eux seuls, ils donneraient une représentation vivante de l’anéantissement et de l’abîme d’anxiété dans lequel l’humanité peut s’engloutir. Cette image terrible traversera les siècles comme icône de l’épouvante. »
Décrivant de la sorte la scène de carnage de ces « agents de la terreur », elle crie au « Géronticide, l’infanticide ! », à « La logique d’extermination radicale ». Adame Ba Konaré dénonce toutes les atrocités commises durant cette attaque avant d’appeler : « D’Ogossagou, il nous reste des lueurs : un devoir de solidarité à cultiver, une croix mémorielle à porter par chaque membre de la communauté Peule, enfant, homme, femme, jeune et vieux, par chaque Malien, un engagement collectif à se souvenir à la fois des disparus et des circonstances effroyables qui ont occasionné leur mort. » La marraine de Tabital Pulaaku recommande alors : « Érigeons un monument aux morts d’Ogossagou, qui sera un espace commémoratif majeur, un lieu d’expression de nos deuils individuels et collectifs en tant que Peuls, où notre communauté viendra se ressourcer ; elle y professera la paix et la fraternité des peuples, pour exorciser le mal du diable et ses sordides facéties. Mais pas que les Peuls seulement, l’ensemble des Maliens et des Maliennes qui ont en horreur les actes ignominieux, de surcroît focalisés sur une ethnie particulière. » Sur ce monument devront s’inscrire les noms des disparus afin de témoigner aux générations futures leur mort martyre. À ce titre, l’ex-première dame de la République du Mali précise : « Mobilisons nos artistes pour édifier la stèle funèbre et dans une démarche duale, en sollicitant la participation de l’État, afin d’ancrer la présence des morts d’Ogossagou dans le territoire malien et pour que soit proscrits à jamais au Mali «Morts pour avoir été Peuls. »
Elle appelle tous les Peuls, tous les militants de cette association peule à la maitrise de soi et de ne jamais tomber dans une logique de vengeance en allant jusqu’à armer les Peuls contre les Dogons. « J’exige plus : ayons une pensée pieuse pour toutes les victimes de toutes les communautés, voisines, parentes, amies ou alliées. C’est ainsi que nous serons dignes du Pulaaku », invite-t-elle. À ses dires, on ne doit pas se substituer à l’État dans la logique de la protection des citoyens. Quant au deuil, elle invite : « Décrétons un deuil national à notre façon, en arborant des insignes, en organisant des marches funèbres. Lançons un vibrant appel à nos partenaires de la communauté internationale, la France en tête, à faire preuve de plus d’empathie pour les Peuls, pour notre peuple dans leurs déclarations officielles. »
Face à toutes ces bavures récurrentes, il importe de mettre la raison devant tous les actes afin d’éviter ce pays de tomber dans le chao.
Fousseni TOGOLA
Source: Le Pays