«C’est le temps de passer la main aux jeunes» ! Le rappel est d’Umaro Sissoco Embaló, le jeune président de la Guinée Bissau, à l’égard des «Vieux» qui aspirent toujours garder les rennes du pouvoir dans leurs pays et dans la sous-région. Lors du sommet extraordinaire de la CEDEAO sur le Mali, jeudi 20 août 2020, le président bissau-guinéen, Umaro Sissoco Embaló, n’a pas hésité à cracher ses quatre vérités aux présidents, Alassane Ouattara et Alpha Condé, qui sont en passe de briguer un troisième mandat au mépris de la stabilité de la Côte d’Ivoire et de la République de Guinée.
Et visiblement, le jeune président est sur la même longueur d’ondes qu’une grande partie de la population malienne qui souhaite la retraite, même «anticipée», de la classe politique issue du mouvement démocratique. Ces «démocrates convaincus» qui n’ont cessé d’enfoncer le pays en perpétuant les mauvaises pratiques que la démocratie était supposée combattre.
«Pour un Mali nouveau, pas de retour de politicard de tout bord (Dr Choguel Kokala Maïga, Me Mountaga Tall, Me Cheick Oumar Bathily, Cheick Oumar Sissoko, Mme Sy Kadiatou Sow, Ali Nouhoum Diallo, Pr. Tiémoko Sangaré, Pr. Iba Ndiaye, Boucary Tréta…)» ! Tel est le message qui a circulé sur les réseaux sociaux au lendemain du coup d’Etat du 18 août 2020 comme une pétition.
Une transition raisonnable (18 à 24 mois) et la retraite des ténors de la classe politique sont deux points qui font l’unanimité dans les débats sur les réseaux sociaux en évoquant l’après-IBK. Ils sont en effet nombreux ceux qui pensent que ces vieux loups de la scène politique malienne doivent maintenant travailler à léguer «un bel héritage à la génération future» au lieu de chercher à «instrumentaliser les jeunes à des fins politiques».
«Ce coup d’Etat n’aurait servi à rien si le CNSP s’entête à collaborer avec les diables et les démons de 1991» ! La réaction est d’un jeune activiste qui n’est pas d’habitude extrémiste. «Je veux que notre prochain président soit un jeune à l’issue d’une transition menée par un jeune», a-t-il ajouté.
Et la junte n’a pas besoin de se compromettre avec ces dinosaures d’autant plus que, comme elle l’a dit dans sa déclaration première après avoir contraint Ibrahim Boubacar Kéita à démissionner le 18 août 2020, le Mali est plein d’hommes valables et animés d’un patriotisme à toute épreuve.
A l’image du CNSP, la jeunesse malienne ne manque pas de valeurs sûres comme référence, à l’image d’Aïssata Diakité, promotrice de «Zabban Holding» qui est une entreprise spécialisée dans la transformation des produits agroalimentaires basés au Mali. On peut aussi citer, sans risque de se tromper, Moussa Kondo, Malick Konaté, Alioune Ifra Ndiaye, Zégué dit Moussa Diarra, Bréhima Touré, Kassim Traoré, Awa Méité, Dr Bréma Ely Dicko, Tiéoulé Mamadou Konaté, Adam Dicko, Fatoumata Sangho Kalilou Dama, Assétou Gologo, Sidi Kéita… Et la liste n’est pas bien sûr exhaustive puisque ce sont les premiers noms qui nous sont venus en tête comme références pour la jeunesse malienne. Je ne sais pas vous, mais je pense qu’il est justement temps de donner la chance à cette jeunesse instruite consciente, cultivée et patriote de faire ses preuves en ce qui concerne la gestion du pays.
La tâche ne semble pas être aisée. «La tâche ressemble à aider une grenouille à grimper à un arbre», pense un chroniqueur. «Le problème est qu’on ne peut pas réellement compter sur les jeunes Maliens. Ils sont faux et aiment la facilité. Ils préfèrent donc suivre ces vieux crocodiles et politiciens qui leurs jettent des miettes comme on jeterait des os à un chien bien dressé que s’assumer, s’affirmer et prendre leur destin et celui du pays en main», explique-t-il.
Après avoir aidé le M5-RFP à déstabiliser le pouvoir d’IBK, le prochain combat de la jeunesse politique malienne doit être de mettre à la touche cette génération qui se disait «des démocrates convaincus», mais qui ont été «une déception totale en terme de concrétisation des promesses de la démocratie». Ce sont eux qui ont cultivé le clientélisme politique, la corruption, la délinquance financière, la gestion familiale des affaires de l’État qui ont fini par «tuer toute opportunité de développement dans le peu qui reste encore de ce beau pays le Mali. La gabegie, le vol et l’arbitraire sont devenus des vertus.
Certains observateurs disent avoir observé «un éveil de conscience» en train de s’installer ces dernières années. Si tel est le cas, il revient aux jeunes maintenant de «le rendre plus fort, plus vivant». Pour concrétiser ce rêve de rajeunir la gouvernance de notre pays, c’est d’une vraie révolution de palais dans nos chapelles politiques dont la démocratie malienne a besoin. Plus que jamais les jeunes maliennes et les jeunes maliens doivent devenir des citoyens proactifs en s’armant intellectuellement afin de mieux maîtriser l’histoire contemporaine du Mali… Ils doivent s’éduquer sur la réalité et la complexité de la situation de notre pays ; comprendre les enjeux de sa déstabilisation, les obstacles liés à son émergence socioéconomique, son développement intégral et homogène.
Cela nécessite aussi un leadership fort, c’est des jeunes qui ont compris qu’il faut se battre d’abord pour l’intérêt général et non personnel, et qu’un vrai leader est celui qui a compris qu’il ne pourra pas illuminer le monde de son aura tant qu’il ne crée pas les conditions permettant à tout le monde de briller autour de lui.
«La tâche est ardue, mais pas impossible si nous sommes réellement déterminés à saisir cette opportunité que la junte nous offre maintenant. Il faut déjà prendre d’assaut les réseaux sociaux avec des arguments solides mettant en évidence la nécessité de ce changement générationnel», défend un confrère. «Essayons de jouer cette carte pour parachever cette révolution», conclut-il.
Hamady Tamba