Le 6 novembre 1975, 350 000 citoyens amenés par le Roi Hassan II marchent vers le Sahel Occidental, le Maroc au cœur et le Coran à la main. L’impressionnante déferlante est pacifique mais le cyclone silencieux envoie un message au monde : considérant l’affaire du Sahara Occidental comme une atteinte à son intégrité territoriale et à son droit historique, le Royaume chérifien ne cédera pas.
Pour l’Histoire
Et quarante ans plus tard le constat est toujours qu’il tient à se faire entendre. Le compromis, il l’accepte sous la forme d’une autonomie élargie et d’une décentralisation avancée qui pour le Sahara comme pour les autres provinces du Royaume accélèreront le développement local, donc le bien-être absolue des populations.
Mais toute autre formule pour Rabat relèvera de la compromission, voire de la trahison. Ce dont il ne peut être question selon Mohammed V déjà. Telle est la signification de la visite royale effectuée en février 1958 à M’Hamid El Ghizlane dans le sud marocain et où Mohammed VI, met l’accent sur l’histoire, la géographie et le sang. En particulier sur l’intégration des populations de cet espace et de leur attachement au Maroc.
Il met en relief le sacrifice des jeunes Sahraouis lors de la bataille du Royaume pour son indépendance dont la décisive bataille de Bougafer en 1933à laquelle les provinces Sud paient un lourd tribut est un moment épique. Du grand père Mohammed V au père Hassan II en passant par le fils Mohammed VI, la question du Sahara n’a subi aucune variation dans le traitement. D’ailleurs, bien plus significativement, c’est le Maroc entier qui s’unit autour de cette affaire : majorités politiques et oppositions, chaumières et palais, hommes et femmes, jeunes et vieux.
Comme s’il s’agit d’un jihad pour lequel plus d’un acceptera d’affronter la mort. Cette détermination collective a eu sa rançon : l’élan international pour une République Sahraouie indépendante qui mobilise à la fin des années 1970 s’estompe. Il aura même fortement reculé vu le nombre d’Etats qui retirent leur reconnaissance au Polisario ou qui s’alignent sur la position onusienne concernant un règlement amiable de la question du Sahara.
Pour l’avenir
Au quarantième anniversaire de la Marche Verte, Mohammed VI est venu à Layoun. Il y campe même. Retour du crime sur ses pas ? Le Roi a pris toutes les précautions pour que ce périple ressemble à un pèlerinage sain, à un travail de mémoire mais également et surtout une invitation à dépasser l’Histoire. Souvenons-nous des grands axes des discours solennels du souverain : il croit en le Maghreb, un grand Maghreb fort et intégré qui pèsera de son influence dans les relations internationales.
Entre les lignes de ses évocations sur le différend Maroc-Algérie, on découvre que pour le Roi il ne peut y avoir un rideau de fer durable entre ces deux Etats qui sont les mêmes peuples. Autre axe fort de la doctrine Mohammed VI : le Maroc qui progresse, pas seulement dans les indicateurs mais d’une croissance soutenue et redistribuée pour vaincre au plus vite la précarité et la pauvreté des masses déjà fortes de leur « capital immatériel », c’est-à-dire la paix, la laïcité, les droits fondamentaux. Dernier pilier de l’offensive chérifienne : rebâtir les passerelles avec l’Afrique subsahariennes autour d’un partenariat mutuellement bénéfique et basé sur le respect dû aux nations.
Or qui dit passerelle dit tête de pont. Les provinces sahariennes du Maroc seront cette tête de pont, comme cela est naturel. Mais ce rôle ne peut être joué que sur fond de révolution tranquille au profit de provinces qui devraient être au même niveau que leurs homologues du reste du Maroc. Voire plus. D’où les milliards de dollars d’investissement annoncés dans tous les secteurs structurants.
Layoun contre Tindouf, croient déceler des esprits fins. Ce sera peut-être une conséquence. La vérité est cependant que la théorie et la pratique de l’émergence constituant l’épine dorsale de la gouvernance de Mohammed VI ne peut encourager ni des ilots d’opulence ni des silos d’exclusion. Le souverain à Layoun était en face d’un test de cohérence. Ses ambitions pour la Région indiquent qu’il l’a réussi.
Adam Thiam
Source: Lerepublicainmali