Après une première partie dédiée à l’Agriculture, un deuxième volet consacré aux infrastructures, Modibo Koné poursuit sa réflexion en abordant la question du développement social. Pour ce cadre malien, qui a eu à participer au montage et au financement de la plupart des infrastructures réalisées dernièrement en Afrique de l’Ouest, la finalité de l’économie, c’est l’homme. Les politiques publiques doivent, plus que jamais, être appréciées à l’aune du social et de la création de l’emploi. Pour lui, le développement social est un facteur important qui conditionne la croissance, la qualité du capital humain et la bonne gouvernance.
« Quand vous êtes un soldat du développement, le développement social est au centre de vos préoccupations. La lutte contre la pauvreté et la recherche du bien-être des populations sont au cœur de vos missions. Les projets de développement prennent en compte par nature les préoccupations sociales et environnementales », dit Modibo Koné qui vient de démissionner de la BOAD.
Pour lui, « la croissance inclusive est confrontée dans les pays africains à plusieurs problèmes, le partage des fruits de la croissance observée est encore difficile face aux ressources qui n’ont pas le niveau escompté. Les investisseurs s’intéressent quasi exclusivement aux matières premières et n’investissent pas beaucoup dans des secteurs permettant de donner de l’emploi au plus grand nombre ».
Modibo Koné pense que des initiatives devront être prises en direction du secteur privé, des PME/PMI pour leur permettre de créer des emplois et ainsi peser sur la réduction des inégalités. Les collectivités locales ont aussi un important rôle à jouer pour faire rentrer dans l’économie les personnes qui en sont exclues.
La poussée de l’urbanisation n’est pas spécifique à l’Afrique. En 2008, 50 % de la population mondiale vivait dans les villes, ce taux passera à 60 % en 2030 et à 75 % en 2050.
Le phénomène s’accentue en Afrique avec la forte croissance démographique que l’on observe et qui est appelé dividende démographique par certain. Cette nouvelle donne oblige de plus en plus de villes en Afrique à composer avec une dimension sociale et sanitaire importante en faisant face concomitamment aux problèmes d’approvisionnement en eau et en électricité.
Les villes sont à un niveau de proximité avec les populations qui les obligent maintenant à intervenir pour leur apporter du bien-être, mais elles auront besoin que certaines compétences leur soient transférées par les gouvernements.
L’introduction de nouveaux services accessibles à tous par le smartphone permet à l’Afrique de combler des retards. Le mobile money créé en Afrique a révolutionné le secteur bancaire et a permis une inclusion financière des populations.
L’on dénombrait, en mars 2017, 54 services d’argent mobile en activité dans 14 pays et c’est un modèle qui commence même à s’exporter en Europe. Le monde rural est impacté, l’information utile est maintenant à la portée des agriculteurs. L’éducation, la santé, la musique, le commerce, le sport tous les secteurs sont touchés. Selon un rapport de GSMA, à la fin 2016, la moitié des habitants de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) avaient un abonnement mobile, ce qui correspond à 172 millions d’abonnés uniques. Le nombre total de connexions atteignait 320 millions, soit un taux de pénétration de 92 %.
D’ici 2020, 45 millions de personnes supplémentaires seront connectées aux services mobiles dans l’ensemble de l’Afrique de l’Ouest, portant le nombre total d’abonnés uniques à 220 millions et le taux de pénétration à 54 %. L’expertise pour créer des produits et des services s’est démocratisée, elle est à la portée de tous. Des services créés en Afrique ont vocation à s’exporter de par le monde.
Le numérique porte en son sein une vague d’opportunités qu’il faut saisir. Il faut financer le développement de l’enseignement du codage, mettre en place des espaces publiques de connexion, financer des incubateurs d’entreprise du secteur, faciliter l’installation de Datacenter, lancer de vastes programmes pour équiper nos administrations et former les agents de l’Etat et des collectivités territoriales.
Aichatou Konaré
les echos