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Mme Sy Kadiatou Sow, membre de l’Alliance pour la Démocratie au Mali, ancienne ministre

Le Républicain : A Kidal, deux journalistes ont été enlevés et exécutés, quels sont vos sentiments en participant à cette marche à l’appel de la maison de la presse ?

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Mme Sy Kadiatou Sow : J’ai des sentiments de colère, d’indignation et d’incompréhension. Je suis là en tant que démocrate au nom de mon association Alliance pour la Démocratie au Mali, pour exprimer toute notre solidarité à l’ensemble de la presse, à tous les journalistes du monde, en particuliers ceux de RFI, et aussi ceux du Mali. C’est un crime odieux, mais pas le premier. Nous associons tous les crimes antérieurs à celui-là. Ce qui s’est passé peut arriver à tout moment, à n’importe qui et partout, c’est une situation qui est intolérable, c’est le règne de l’arbitraire. Il est peut être temps que nos autorités, que la communauté internationale, prennent des mesures qu’il faut, pour que cette situation ne continue pas. Tout le monde le dit, Kidal ça ne peut pas continuer, c’est intolérable, c’est inacceptable…

Est-ce la situation particulière de Kidal qui a favorisé ces crimes ?
Mon sentiment personnel est que ceux qui ont fait ont choisi de le faire à Kidal pour marquer un coup. Ils n’auraient pas pu peut-être le faire si facilement  à Gao ou à Tombouctou où l’Etat malien a recouvré sa souveraineté. Tout le monde reconnait maintenant, y compris les autorités elles-mêmes, que la souveraineté de notre pays n’est pas totale dans cette région de Kidal, même si tout le monde n’ose pas le dire.
L’administration n’y est pas l’armée … ?
L’armée est cantonnée, je ne l’apprends à personne, ça été dit avant, par des autorités plus qualifiées que moi pour le dire…

Le gouverneur n’est pas au gouvernorat…
Puisque cette situation est tel qu’aujourd’hui, le MNLA dit que c’est son fief, et tout le monde le reconnait, ils sont là-bas et cela a pu se faire. Et ils n’ont pu rien faire contre. Donc qui gère quoi ? Apparemment personne ne gère, et continuer dans cette situation veut dire que de fait, le MNLA réussit à imposer une forme d’autonomie qui ne dit pas son nom. C’est une situation effectivement qui est intolérable pour les Maliens. Mais n’attendons pas des gens qu’ils disent, « ce n’est pas acceptable ». Nous attendons que tous ceux qui disent ce n’est pas acceptable, que ce soit les autorités maliennes, la France, la communauté internationale, que toutes ensemble, tout en disant cela, agissent pour qu’il n’en soit plus ainsi. C’est ce que nous attendons.

Qui peut se cacher derrière de tel crime odieux ?
Qu’est ce qu’on en sait, moi je constate simplement que c’est une nébuleuse, on ne sait pas qui en fait, on a à faire.

Est-ce que les plus hautes autorités françaises et maliennes doivent se limiter à dénoncer ?
Je pense que tous ceux qui dénoncent doivent agir y compris les citoyens maliens que nous sommes, parce que l’Etat malien, c’est nous aussi. Il ne suffit pas que les Maliens restent assis, ils ont voté, ils ont élu un président de la République, c’est très facile de dire « bon le président n’a qu’à gérer, le président va gérer ».

Autrement, le président n’a pas une baguette magique ?
Non, le président n’a pas une baguette magique et il faut que les Maliens se disent qu’en tant que citoyens maliens, ils doivent aussi s’engager pour aider à mettre en œuvre les engagements qui ont été pris et si les choses se passent bien qu’ils approuvent, qu’ils soutiennent. Dans le cas contraire, qu’ils fassent preuve de leur droit de dire « nous ne sommes pas d’accord avec tel ou tel point. Et nous voulons que les choses changent ».

Et quels que soient les moyens d’expressions ?
Quels que soient les moyens d’expressions, il ne faut pas se contenter de dire on a eu le président, il a été plébiscité, il va régler les problèmes, on n’est pas dans une situation d’homme providentiel de quelqu’un qui a une baguette magique qui fait tout ce qu’il peut. Ce n’est pas le cas si les Maliens ne se mobilisent pas pour dire « oui on est d’accord avec ça, et non, on n’est pas d’accord avec tel point », on restera là. Ceux qui vont considérer qu’ils sont déçus à peine deux mois de l’installation du président, le dire change quoi ? Il faut se mobiliser pour agir et agir ne veut pas dire forcement que tout est mauvais. Il faut le soutenir et dénoncer ce qui est mauvais. Il faut qu’ils sachent que le président est en mission pour tous les maliens.

Qui est visé derrière cette attaque,  la presse, RFI, la France, le Mali ?
Je pense que ça va au delà de tout ça, je crois que ceux qui ont décidé de changer, d’imposer leur idéologie, les terroristes, les jihadistes,  c’est eux qui sont derrière, mais ils utilisent des gens qui disent qu’ils ne sont pas avec eux et qui ont la capacité eux de se fondre dans cette population et d’utiliser les gens, de les manipuler au gré de leurs intérêts. Et aujourd’hui, c’est tous qui sont menacés. On a vu, le Mnla s’est allié à  Ansa dine et à Aqmi. On a vu ce que cela a donné. Le Mnla avait presque disparu, mais on l’a remis en selle parce qu’on pensait qu’il était capable de faire quelque chose. Je crois qu’il n’y aurait pas eu cet assassinat là, aussi facilement, aussi rapidement.

Ces assassinats arrivent quelques heures seulement après la libération de quatre otages français et pendant que siègent les assises nationales quel commentaire faites-vous ?
Tout cela procède d’une volonté délibérée, de saboter toute initiative qui pourrait aller dans le sens de la paix, du retour de la cohésion nationale. Je pense que ça procède de tout cela. Maintenant qu’est ce qui se passe à l’intérieur de ces groupes disparates, de cette nébuleuse ? Personne ne le sait. Il faut juste maintenant qu’on se mette en tête qu’il faut que, ce soit les communautés qui s’expriment, qu’on laisse les communautés s’exprimer. Qu’on ne fasse plus confiance à des soit disant représentants d’un groupe ou d’un autre par ce que ceux-là ont pris les armes, qu’ils soient plus audibles  que ceux des citoyens maliens qui ont décidé de se battre et revendiquer leur droit pacifiquement. Aujourd’hui, on donne plus d’importance à ceux qui prennent des armes, on les écoute mieux et on les mets en avant, on est  prêt à composer avec eux et on laisse les autres ceux qui sont pacifiques, ils sont laissés à eux-mêmes. Et ça ce n’est pas normal et crée une situation qui fait que les gens se disent « pour ce faire entendre il faut prendre les armes ». Il faut voir la réaction de nos parents de Gao, ils ont protesté vigoureusement par rapport à la composition de la délégation qui est venue ici, je pense qu’ils ont eu raison, même s’il faut éviter d’utiliser la violence, ils peuvent s’exprimer mais pas par les actes de violences. Ils ont raison d’exiger qu’ils soient représentés pour parler eux mêmes,  en leur propre nom, au nom  de leur communauté.
Réalisé par B. Daou

SOURCE: Le Républicain

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