Le processus de paix piétine au Mali. Cependant, une lueur d’espoir était perceptible le mercredi 23 août 2017, lorsque la Coordination des mouvements de l’Azawad(CMA) et la Plateforme signaient une trêve de 15 jours. Lors de la cérémonie de signature de cette trêve, la presse était au rendez-vous. D’ailleurs, des acteurs de la mise en œuvre dudit accord ont non seulement invité les médias à redoubler d’efforts dans la vulgarisation de l’accord, mais ils ont aussi loué les efforts consentis par la presse dans le processus de paix au Mali.
Président de la CMA, Sidi Brahim Sidatti, parlait du rôle de la presse dans la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation issue du processus d’Alger. Sans détours, il a fait savoir que le rôle de la presse est essentiel. Avant d’ajouter que le premier garant de cet accord est la société malienne elle-même et qu’il n’y a pas de société sans information, sans la presse.
Selon lui, c’est le déficit de communication qui fait que le projet de l’accord n’est pas porté par la population malienne. « Si vous voyez aujourd’hui que nous vivons tout ce problème, c’est par ce qu’il y a un déficit de communication ; parce qu’on n’a pas donné à la presse son rôle. Mais il faut aussi avoir une presse responsable. Nous sommes dans une situation de crise, nous sommes dans une situation de reconstruction de notre pays. Il faut une presse qui puisse donner des informations et non pas une presse qui jette de l’huile sur le feu. Voila mon point de vue par rapport à la force de la presse dans cet accord », a déclaré le président de la CMA.
A ses dires, la presse doit être présente dans toutes les rencontres et, à chaque fois, aux événements de mise en œuvre importants de l’accord. « La presse doit être auprès de toutes les parties et que chacune des parties donne l’occasion à la presse d’aller sur le terrain et trouver l’information à la source et de pouvoir communiquer tout en donnant la vraie information », a précisé le leader de la CMA.
Sidi Mohamed Ould Mohamed dit Lidi, représentant du MAA (Mouvement Arabe de l’Azawad) au sein de la cellule de communication de la Plateforme (premier mouvement signataire de l’accord) abonde également dans le même sens. Selon lui, la presse doit être présente auprès des acteurs de la mise en œuvre de l’accord pour donner l’information en temps réel à la population. « Notre presse est souvent zéro dans ce domaine », a-t-il déploré. En outre, Sidi Mohamed Ould Mohamed de la Plateforme a exprimé son indignation face « aux opportunistes dans le domaine de la presse qui sont tout le temps auprès des ennemis de la paix ».
Par ailleurs, il a mis l’accent sur le blocage constaté durant le mois d’août 2017 dans la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation issue du processus d’Alger. Fort heureusement que ce blocage fut surmonté le mercredi 23 août 2017 par la signature d’une trêve de 15 jours entre les protagonistes, à savoir la CMA et la Plateforme. Cette trêve a été principalement signée par le président de la CMA, Sidi Brahim Ould Sidatti et le président de la Plateforme, Me Harouna Touré.
Au delà des principaux acteurs, ladite trêve a été également signée par le gouvernement malien en tant que témoin, en la personne du ministre de la Sécurité et la Protection civile, le Général Salif Traoré ; par le patron de la Minusma (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation du Mali), Mahmat Saleh Annadif, et par le chef de file de la médiation internationale.
L’objectif de cette trêve est de mener les réflexions en vue de parvenir à un accord de cessation d’hostilités global et définitif. La Cérémonie de signature de trêve de deux semaines qui a eu lieu au CRESS de Badalabougou sur la colline du savoir a regroupé plusieurs autres personnalités dont l’imam Mahmoud Dicko, président du Haut conseil islamique du Mali ; le Haut représentant du président de la République pour la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation issue du processus d’Alger, Mamadou Diagouraga et bien sûr la presse qui était au aguets pour relayer l’information.
Difficile accès de la presse à l’information
Ces deux responsables des groupes armés précisent que la presse doit être présente auprès des acteurs pour pouvoir informer l’opinion nationale et internationale. Pourtant l’accès de la presse à l’information est un véritable parcours de combattant dans un pays comme le Mali. Pour preuve, au cours de la rédaction de cet article, beaucoup d’acteurs du processus de paix n’étaient pas disponibles à nous parler. C’est le cas du bureau du Haut représentant du président de la République pour la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation, un des acteurs incontournables du processus de paix au Mali. Quand nous nous sommes rendus là-bas afin d’avoir ses impressions sur le rôle de la presse dans la mise en œuvre dudit d’accord, à notre grande surprise, la secrétaire chargée des programmes nous a clairement fait savoir que le Haut représentant du président de la République pour la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation ne pourrait pas se prononcer sur le sujet. Nous nous sommes alors rabattus sur le ministre de l’Economie numérique et de la Communication, Monsieur Arouna Modibo Touré, qui nous a donné ses points de vue sur le rôle crucial de la presse dans la mise en œuvre de l’accord.
A ses dires, le rôle traditionnel de la presse est d’informer, d’expliquer, de commenter pour apporter des éléments de réponses aux questions que se posent les lecteurs, auditeurs ou téléspectateurs sur un sujet donné. Selon lui, l’accord issu du processus d’Alger concerne toutes les couches de la société malienne et dans tous les recoins du Mali. « Les médias nationaux ont été les pionniers dans l’explication de la première mouture et ont accompagné toutes les étapes de son élaboration jusqu’à sa signature. Aujourd’hui leur rôle doit consister à accompagner sa mise en œuvre. Fort heureusement, la presse malienne est en train de jouer ce rôle. À travers les comptes rendus réguliers, elle permet au peuple malien de suivre les efforts du gouvernement, sa volonté sans faille de mettre en œuvre les différents points de l’accord. C’est le lieu de saluer ce rôle pédagogique que joue notre presse dans l’accompagnement de notre Accord car il s’agit bien d’un accord inter Malien », a souligné le ministre Arouna Modibo Touré.
Joint depuis la Mecque par téléphone le samedi 26 août 2017 aux environs de 16heures (temps universels), le président du groupement patronal de la presse écrite, Chahana Takiou, directeur de publication du journal « 22 septembre » nous a fait savoir que le rôle de la presse dans la mise en œuvre de cet accord est tout d’abord de comprendre l’accord. «En s’appropriant l’accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger, la presse doit divulguer ledit accord. Il faut se l’approprier pour pourvoir l’expliquer à ses lecteurs, aux citoyens », a précisé Chahana Takiou. En outre, il a indiqué que la presse doit dénoncer les violations éventuelles d’une ou des parties de l’accord. Enfin, le président du groupement patronal de la presse écrite a souligné que la presse doit attirer l’attention de la communauté internationale sur les violations de l’accord.
Depuis le processus d’élaboration de l’accord de paix à Alger en 2014, la presse malienne aussi bien qu’étrangère étaient au four et au moulin pour relayer l’information. Finalisé après d’âpres tractations entre les acteurs, l’accord pour la paix et la réconciliation issue du processus d’Alger sera signé au Centre international de conférence de Bamako (CICB) les 15 mai et 20 juin 2015. Là aussi, la presse s’était mobilisée pour non seulement être les témoins oculaires de cette signature, mais aussi, vulgariser l’accord de paix au Mali.
Donc depuis le début du processus, la presse s’est donnée un rôle de sensibilisation, de vulgarisation du document. Mais au delà de ces rôles indéniables, la presse s’est donnée comme tâche d’analyser le document, de critiquer les insuffisances constatées et avérées dans la mise en œuvre de l’accord, d’interviewer les acteurs impliqués dans le processus surtout lors des sessions ordinaires ou extraordinaires du comité de suivi de l’accord (CSA).
En dépit de la pluralité des lignes éditoriales, elle (la presse) se donne les moyens pour répondre aux nombreuses sollicitations des parties de l’accord soit à travers des points de presse, des conférences de presse ou débats, des séminaires de formation, des journées d’informations ou d’autres activités entrants dans le cadre de la mise en œuvre dudit accord.
Pour autant, le rôle de la presse n’est pas terminé. Elle doit être vigilante et continuer à œuvrer pour la dissémination de l’accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger. Elle doit faire preuve d’impartialité tout en respectant ses règles d’éthique et de déontologie. Par conséquent, elle ne doit pas, en aucune manière, aider ou soutenir une partie au détriment des autres parties de l’accord.
Aguibou Sogodogo
Source: Le Républicain