La plupart des entreprises de presse vivent d’ordinaire dans une situation financière difficile. Le Coronavirus a accentué les difficultés
La pandémie de Covid-19 continue de sévir à travers le monde. Notre pays ne fait pas partie des plus touchés mais chez nous la seconde vague de l’épidémie s’est montrée plus meurtrière que la première. A la date du 3 janvier dernier, les personnes contaminées par la maladie étaient au nombre de 8.119 personnes dont 6.011 guérisons et 333 décès. Heureusement, la courbe des contaminations marque un fléchissement ces derniers jours. Mais les effets néfastes de la pandémie ne faiblissent pas. Tous les secteurs d’activité sont affectés à des degrés divers. Le secteur des médias fait partie des domaines d’activité les plus frappés par le marasme ambiant entretenu par le ralentissement de l’économie. Même en temps normal, la précarité est le lot quotidien de beaucoup d’entreprises de presse. La crise sanitaire est venue aggravée davantage une situation déjà pas très reluisante.
Les patrons de presse le reconnaissent volontiers. La crise sanitaire est un facteur hautement aggravant de la précarité dans le milieu des médias. Le témoignage d’Alexis Kalambry, directeur de publication du bihebdomadaire d’information Mali-Tribune, est éloquent. «La Covid-19 a fortement impacté la presse écrite à plusieurs niveaux. Pour que les lecteurs achètent, il faut qu’ils sortent de leurs maisons. Les ventes ont fortement diminué. Beaucoup d’entreprises dans tous les secteurs ont été fermées. Celles qui n’ont pas fermé, ont drastiquement baissé leur budget de communication. Alors que la publicité représente plus de 70% des recettes des journaux », explique l’ancien vice-président de la Maison de la presse.
En effet, les mesures de restriction prises par les autorités pour faire face au coronavirus ont affecté beaucoup d’entreprises à réduire leurs activités et même souvent à fermer carrément leurs portes. Du coup, la possibilité de vente des journaux est réduite. Et aussi, le ralentissement de l’activité économique, diminue d’autant les opportunités d’annonces publicitaires dans les médias. Le marasme qui s’est emparé du secteur des médias, a eu des conséquences lourdes. «Les projets d’investissement, de développement ont été abandonnés ou gelés. Les salaires ont été retardés et chacun essaie à son niveau des solutions pour garder la tête hors de l’eau», confirme le journaliste Alexis Kalambry.
Une autre conséquence de cette maladie est l’accès difficile à l’information, notamment les sources. «La Covid-19 a ralenti les déplacements et les contacts. Il faut des mesures sanitaires et souvent des moyens de communication qui coûtent de l’argent. Le télétravail a rendu beaucoup de gens indisponibles», insiste le patron du bihebdomadaire paraissant les mardis et les vendredis. Pour lui, la crise n’a pas non plus aidé en termes de diversification des contenus. Devant la sécheresse de l’information et les difficultés d’accès aux sources, les journalistes sont obligés de faire preuve d’imagination et de créativité pour proposer des produits intéressants.
Les dommages auraient pu être supportables si la presse écrite nationale avait bénéficié d’un appui financier de la part du gouvernement. «La presse n’a rien eu pratiquement dans le colossal budget adopté pour faire face à la Covid-19. La Maison de la presse a approché les autorités, proposé des solutions, mais nous n’avons eu, à aucun niveau, une oreille attentive», déplore le patron de Mali-Tribune.
Le président de l’Association des professionnels de la presse en ligne (Appel-Mali) abonde dans le même sens. Pour Modibo Fofana, comme les autres médias, la presse en ligne n’a pas bénéficié d’appui financier de la part du gouvernement. Elle a par contre été soutenue par des partenaires internationaux et la société civile, soutient-il.
Pour notre interlocuteur, la pandémie a renforcé la précarité des médias qui ont su trouver des solutions pratiques, souvent drastiques, pour résister. «Au Mali, les médias ont été sérieusement touchés par la maladie à Coronavirus. Par conséquent, certaines entreprises de presse ont réduit leur personnel afin de pouvoir supporter les charges fiscales», explique le patron du site web : «Mali24». D’autres entreprises de presse ont réduit de moitié le salaire de leur personnel pour éviter les licenciements. Les médias ont également misé sur le télétravail afin de réduire les charges. A ce niveau, déplore le président de Appel-Mali, le coût élevé de la connexion a freiné les ambitions.
Babba B. COULIBALY
Source : L’ESSOR