J’avais bien raison quand j’écrivais la semaine dernière que nos amis de l’opposition semblent avoir épuisé leurs thèmes et même leur temps de parole. J’en veux pour preuve leur volonté d’organiser « une gigantesque marche » (j’emprunte à Tiébilé Dramé, directeur de campagne de Soumi).
Quand on sait que ce sont les mêmes qui battaient le pavé du temps de la contestation contre la révision constitutionnelle, on pourrait penser qu’ils sont nostalgiques. C’est vrai que pour des braillards, ne pas faire du bruit équivaudrait presque à être privé d’oxygène. Donc pour répondre à l’appel de la rue, ils veulent marcher. C’est un besoin irrépressible, presque inextinguible, de marcher et de crier dans les rues. Sinon, les raisons pour lesquelles ils veulent marcher ne nécessitent nullement de sortir : tenue des élections libres et crédibles, levée de la censure de l’ORTM, la crise au centre du pays, l’accessibilité aux services sociaux de base, pénurie d’eau et d’électricité, etc. Comme on le voit, ce sont là des sujets très préoccupants. Mais entre nous, pour autant faudrait-il vraiment marcher ? J’ai l’impression que l’opposition et les marcheurs veulent défoncer des portes déjà ouvertes. En effet, le gouvernement a fait preuve d’une constance à toute épreuve dans sa détermination à organiser les élections à date et à promettre une transparence à toute épreuve.
Le gouvernement a presque traîné l’opposition pour l’amener dans les différentes concertations, tant au ministère de l’Administration qu’au sein de l’Assemblée nationale. Mieux, pour ce qui est de la loi électorale, le gouvernement et la majorité ont laissé l’opposition aux manettes et ont pris en compte toutes ses préoccupations. Mais la vérité est que toutes les secondes l’opposition trouve de nouvelles revendications, comme si inconsciemment elle ne souhaitait pas la tenue des élections. Mieux, la rue n’est pas un lieu de débat surtout que sur la question, le gouvernement s’est montré ouvert et disponible. Pour ce qui est de la question de l’eau et de l’électricité, il y a de quoi se taper le cul par terre de rire. Les problèmes d’eau et d’électricité ne datent pas de cette année et ne sont pas propres exclusivement à notre seul pays. Pour reprendre un des messages de Ras Bath, avant qu’il ne bascule, de 2013 à cette année, l’opposition n’a pas interpellé une seule fois le gouvernement sur les questions d’eau et d’électricité. Or nous avons connu des crises plus aigües de 2013 à maintenant. Du temps où Soumi était ministre des Finances, les Maliens ont connu des délestages interminables. Pour les autres questions, qu’ils en fassent un programme et battent campagne avec cela. Parce que c’est de cela qu’il s’agit. Comme ils n’ont rien à proposer aux Maliens, ils adoptent leur posture favorite : la stratégie de la tension permanente. Lors de la contestation de la révision constitutionnelle, les mêmes avaient apporté tous les amendements à l’Assemblée nationale pour ensuite prendre la rue dans une logique insurrectionnelle.
Mon petit doigt me dit qu’en fait ils veulent tester leur capacité de paralysie et de nuisance et même de violence. Quand on entend les messages véhiculés, y compris par des personnes a priori raisonnables, il y a de quoi prendre peur. Sérieux, il y a de quoi avoir la trouille. Quand on te parle de crocs de bouchers, de machettes, de casser le pays, de casser la tête aux autorités religieuses et traditionnelles, oui, je dis il y a des fous à lier dans la nature. Il parait qu’ils évoquent le Rwanda et son génocide (je ne l’ai pas entendu personnellement). Tout ce déferlement de violence verbales et de menaces, pourquoi ? Parce qu’ils estiment qu’ils ont déjà gagné. S’ils ne gagnent pas, c’est qu’on les aurait volés, et si on les vole ils promettent l’enfer pour le Mali et les Maliens. A la date d’aujourd’hui, je n’ai pas entendu Soumi condamner les propos tenus par ses compagnons, encore moins Tiébilé, encore moins Modibo Sidibé, encore moins Moussa Mara, etc. Je ne les ai pas entendus parce que certainement ce sont eux les inspirateurs des discours de la haine et de la violence (à ce niveau, je soustrais Modibo Sidibé du lot). Tous pensent que s’ils ne gagnent pas, ce serait la fin du monde, la fin de leur monde. Oui, quand on voit l’âge de Soumi, en 2023, il aura 74 ans et ses amis qui ont l’âge de ses enfants lui diront « boua, i té sé ka présenté ». D’où son attitude qui consiste à faire feu de tout bois. Et c’est là que les Maliens ont compris que c’est une question de personne. La situation sécuritaire qu’ils décrivent comme pire qu’il y a deux ans ou trois ans avait servi de motif pour exiger le retrait de la nouvelle Constitutionnelle au regard de l’impossibilité de faire voter tous les Maliens. Comme il s’agit du pays, cela ne les intéressait, on pouvait arrêter le pays surtout qu’ils étaient prêts à y mettre le feu. Aujourd’hui qu’il s’agit de leur petite personne aucun d’eux ne dit qu’il faut reporter les élections parce que l’insécurité pourrait empêcher des Maliens de voter. S’ils pensent que les Maliens sont dupes, ils se mettent le doigt dans l’œil jusqu’à l’omoplate.
Je dois avouer que je suis heureux de la décision prise par le gouverneur d’interdire la marche. J’espère que, contrairement à ce que je vois sur les réseaux, les organisateurs seront accessibles à la sagesse et renonceront. J’espère aussi que l’Etat sera à la hauteur pour préserver la quiétude des populations. Parce que les thèmes de la marche ne valent pas qu’on braille.
Pour ce qui est des morveux, il y en a la tonne et le quintal. Il suffit que le président de la République place un mot, un seul pour que certains se croient viser ; il y en a qui se croient même plus visé que d’autres. Ils se disputent la place de cible ou de victime du Président. Ça leur donne l’impression qu’ils sont importants. Je me concenterai juste sur le cas de Me Tall. Ayant complètement disparu des radars, il a fait un post sur les réseaux sociaux pour s’en prendre gratuitement au Président. Au motif que lors de sa visite à Ségou, IBK l’aurait critiqué sans le nommer, il s’est déchargé. Le bonhomme en avait gros sur le cœur et en avait après IBK. Et il semble qu’il le poursuit de sa vindicte, pour ne pas dire de sa haine, depuis que Me Tall était le chef de l’opposition et IBK le Premier ministre. Parmi ses vérités qu’il a assénées, il y a une qu’il a omise : sa fuite peu glorieuse quand ça chauffait. Parmi ses contre-vérités, il y a une qui mérite d’être rectifiée IBK et Alpha se parlent et se voient en fonction de leur agenda respectif.
Ali Kéita
Source: Nouvelle République