Il y a trois semaines, huit membres d’une délégation anti-Ebola avaient été tués par des habitants de Womé en Guinée forestière qui les soupçonnaient de véhiculer le virus. Ce week-end, des avocats et des journalistes ont été empêchés d’enquête dans le village quadrillé par les forces de l’ordre. Leur matériel, des cartes mémoires et une tablette, avait été confisqué par l’armée après plusieurs heures d’interrogatoire. Finalement, hier, lundi, le gouverneur de Nzérékoré leur a restitué. Mais selon les informations de RFI, une partie de leurs enregistrements et des photos ont été effacés.
Pourquoi a-t-on voulu cacher des preuves ? Que s’est-il vraiment passé à Womé en septembre ? Difficile à dire, mais Faya Millimono, président du Bloc Libéral et porte-parole d’un comité de crise mis en place par plusieurs citoyens guinéens pour que la lumière soit faite sur l’affaire de Womé, s’interroge :
« Ça semble trop surréaliste qu’on dise qu’on est allé sensibiliser une population par rapport à une maladie mortelle et que soudain, à travers le discours du gouverneur, les gens se soient ligués pour s’attaquer à la délégation et enlever la vie à huit personnes, explique-t-il. Qu’est-ce qui a déclenché la colère des populations ? On ne le sait pas. Est-ce que ceux qui sont allés avec le gouverneur n’ont pas fait usage d’armes à feu ? Voici autant de questions que nous nous posons auxquelles nous n’avons encore malheureusement pas de réponses réelles. Nous comptons beaucoup sur le travail de cette équipe mixte qui est composée de professionnels de l’information, des droits de l’homme, etc., pour commencer à comprendre ce qui s’est passé à Womé. Mais malheureusement, l’action gouvernementale risque de nous empêcher d’arriver à la vérité sur cette affaire ».
Inquiétudes sur la situation des habitants de Womé
Faya Millimono attire également l’attention des autorités sur les conditions difficiles dans lesquelles vivent aujourd’hui les habitants :
« Nous sommes très préoccupés, affirme-t-il. Depuis l’incident du 16 septembre 2014, il n’y a presque aucun villageois à Womé. Le village est d’ailleurs occupé par l’armée et après l’intervention du ministre de la Communication qui a menacé quiconque recevrait un villageois de Womé, tous les villages voisins refusent de recevoir les habitants de Womé qui sont en train d’errer dans la nature. Les enfants se retrouvent sans aucun soin. On nous rapporte le cas d’une femme qui a été mordue par un serpent et qui en est morte. Nous pensons que d’un drame, nous sommes en train d’en vivre un autre d’une ampleur beaucoup plus importante ».