À la tête d’une mission de 36 enquêteurs, le Procureur du Pôle judiciaire spécialisé de lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale a séjourné 3 jours à Sobane Da pour fixer la scène du crime, recueillir les indices et auditionner les témoins.
Au cours d’une conférence de presse hier, au ministère de la Justice, le Procureur Boubacar Sidiki SAMAKE a rappelé que c’est sur instruction du département de tutelle qu’une enquête a été ouverte. Pour les besoins de cette enquête de terrain, a-t-il fait savoir, il a bénéficié du soutien de spécialistes de la Direction nationale de la Police (6 éléments), de la Direction générale de la Gendarmerie (6 éléments) et de la Légion de la Gendarmerie de Mopti (7 éléments).
Il ressort des témoignages recueillis sur place par l’équipe d’enquêteurs que le hameau de Sobane Da, qui compte 300 habitants, a été attaqué par des motocyclistes armés de 17 h à 23 h. Les témoins précisent qu’au cours de l’attaque, un premier groupe s’en est pris aux populations, tirant et incendiant les maisons. Un deuxième groupe rassemblait du bétail et extorquait systématiquement de l’argent aux habitants. Un troisième groupe encerclait le village, de sorte que personne n’y entre ou n’en sorte.
Sur la base des témoignages, le Procureur affirme qu’il y a eu des victimes par arme à feu ou par incendie. Le bilan fait également état d’importantes pertes matérielles.
Les mêmes témoignages mettent en cause des groupes de motocyclistes armés.
À propos du bilan, M. SAMAKE a jugé regrettable la polémique qui l’a entouré ; d’autant plus qu’un mort est un mort de trop. Il a avancé un bilan provisoire de 35 morts susceptible d’évoluer.
« Pour le moment, notre constat ne nous permet pas d’aller au-delà de 35 morts », a indiqué le Procureur du Pôle judiciaire spécialisé.
Parlant des pièces à conviction, M. SAMAKE a fait savoir que les enquêteurs ont recueilli des étuis de 7.62 (PM) et de fusils de chasse. Il y a donc la preuve de l’utilisation d’arme de guerre, a-t-il souligné.
Le conférencier a informé qu’une partie de l’équipe d’enquêteurs est toujours à Sangha pour rassembler le maximum d’éléments possible permettant de faire avancer l’enquête.
À la question de savoir s’il y a un lien entre les différents événements tragiques, le Procureur SAMAKE répond en révélant que de prime abord, ils ont pensé que Sobane Da était une réponse à Ogossagou. « Mais, pour le moment, rien ne le prouve », a-t-il dit.
Établissant le parallèle entre les deux tragédies, il a rappelé qu’à Ogossagou-Peulh, il y a eu toutes formes de massacres (balle, incendie). Ce massacre a été commis, selon les témoignages, par des individus identifiés comme habillés en tenue traditionnelle donso, semblait planifié.
À Sobane Da, il s’agissait de motocyclistes armés arrivés en groupes de 8, 8 et 20 personnes.
Si ces 2 attaques ont pour dénominateur commun qu’elles ont été perpétrées par des groupes armés, des détails à Sobane Da ont retenu l’attention du Procureur : les assaillants demandaient de l’argent aux villageois et une partie du village a été épargnée de la barbarie des assaillants.
S’agit-il d’activités terroristes comme cela est ressorti des communiqués officiels ? Le Procureur répond qu’au stade actuel des enquêtes, on ne peut que le présumer en se basant sur la définition que donne la loi du terrorisme.
Le conférencier a exhorté la population à dénoncer tout fait susceptible de menacer la sécurité et à ne pas céder à l’amalgame.
« Il faut plus de solidarité et de synergie avec les services de l’État », a-t-il ajouté.
Pour terminer, le Procureur SAMAKE a partagé une conviction forte : « il faut que nous arrivions à désarmer les milices ». Car, « un civil avec une arme de guerre devient une menace pour la population et pour l’État ».
PAR BERTIN DAKOUO