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Marché financier régional : quelles conséquences du défaut de paiement du Mali ?

À la date du 10 février 2022, l’État malien cumulait un total de plus de 53 milliards de francs CFA d’impayés sur le marché financier régional de l’UEMOA. Cette impossibilité de payer ses dettes ou même  d’émettre de nouvelles créances fait suite aux sanctions de la CEDEAO et l’UEMOA infligées au pays depuis le 9 janvier 2022.

 

 

Dans une note adressée aux investisseurs, le 1er février 2022, le ministre de l’Économie et des finances Alousséni Sanou assurait que les échéances non réglées seraient immédiatement payées dès la levée des restrictions, affirmant aux investisseurs la « volonté » et la « capacité » de l’État du Mali à faire face à ses engagements.

« À cause de ces restrictions, et malgré des avoirs suffisants du Trésor public du Mali dans ses livres, la Banque centrale n’a pas procédé au règlement de l’échéance du 28 janvier 2022 au titre du paiement du coupon sur les Obligations assimilables du Trésor, pour un montant total de 2,699 milliards de francs CFA », dénonçait-il.

Cette situation a par la suite évolué pour atteindre plus de 53 milliards, avec d’autres impayés le 31 janvier et les 2, 7 et 10 février 2022.

Blocage

Première conséquence des sanctions financières, dès le 12 janvier une tentative de levée de fonds par le Trésor public du Mali, d’un montant de 30 milliards de francs CFA, sur le marché monétaire de l’UEMOA pour le compte du gouvernement malien était ajournée.

L’État du Mali a en outre été exclu du programme d’émissions de titres publics pour le 1er trimestre de 2022, alors qu’il emprunte d’importantes sommes sur le marché financier régional.

« Le Mali a emprunté 675 milliards de francs CFA sur le marché financier de l’UEMOA via l’émission de titres publics en 2020. En 2021, ces emprunts se sont élevés à 897,5 milliards, dont 150 mobilisés sur le marché financier de l’UEMOA, contre 747,5 milliards sur le marché monétaire », explique l’économiste Modibo Mao Makalou.

À en croire ce dernier, l’agence de notation Moody’s a baissé d’un cran sa notation à long terme, de Caa1 (haut risque) à Caa2 (ultra spéculatif), un niveau plaçant la dette malienne sous surveillance, « en vue d’une possible nouvelle dégradation ».

Une décision qui, pour l’économiste, était attendue, « à partir du moment où l’ETA malien n’a pas été autorisé à rembourser 2,7 milliards de francs CFA d’intérêts échus sur le marché de la dette de l’UEMOA le 28 janvier 2022 ».

Par ailleurs, les banques commerciales du Mali, qui détiennent 31% de la dette de l’État malien, plus de 300 milliards de francs CFA remboursables sur le marché régional au titre de l’année 2022, risquent de faire face à des difficultés de trésorerie si la situation perdure.

« La BCEAO a injecté le 14 février 2022 un montant de 4 046,36 milliards sur le marché interbancaire de l’UMOA, sur les 4 101 milliards sollicités par les banques commerciales. 94 banques commerciales ont ainsi réussi à se faire refinancer auprès de la Banque centrale à la hauteur de leurs besoins en liquidité, à l’exception des banques commerciales du Mali », indique M. Makalou. Afin de pallier ces difficultés, le Mali a attaqué les décisions de l’UEMOA devant la Cour de justice de l’institution. Selon le collectif d’avocats qui porte le dossier, les recours, au nombre de deux, ont été enregistrés au Greffe de la Cour de justice de l’UEMOA le 15 février 2022.

Crédibilité en jeu

Outre des difficultés économiques et financières pour le Mali, Modibo Mao Makalou pense que les sanctions infligées par la CEDEAO et l’UEMOA auront à moyen et long terme de graves conséquences sur le système financier et monétaire de la zone UEMOA et qu’un défaut de paiement de l’État du Mali risque de ternir la crédibilité du marché financier et monétaire de l’UEMOA sur la même période.

« Les paiements n’ont pas été acceptés par la plateforme de paiement de la BCEAO alors que le Mali disposait de liquidités pour honorer ses engagements envers les investisseurs. Donc les investisseurs du marché financier sous-régional qui ont fait des prêts à l’État malien ne seront pas remboursés, pas par défaut de paiement mais du fait de la tentative d’asphyxie de l’État et de l’économie malienne par des sanctions économiques, financières et commerciales infligées au Mali par la CEDEAO et l’UEMOA », avance-t-il.

Mohamed Kenouvi

Source : Journal du Mali

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