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Me Marcel Caccaldi, Avocat au Barreau de Paris : « L’Afrique paye aujourd’hui les conséquences de l’intervention de l’Otan en Libye»

Avocat émérite au  Barreau de Paris et  anciens Secrétaire de Conférence, Me Marcel Ceccaldi, est aussi l’avocat de Seif El Islam Kadhafi. En transit à Bamako pour Conakry, la capitale guinéenne, Me Marcel s’est prêté aux questions de FAMA COM, une Agence de Communication que dirige notre confrère Alassane DIARRA. Au cours de l’interview qui suite l’Avocat aborde, analyse et commente le dossier judiciaire de Seif El Islam Kadhafi et par ricochet la révolution libyenne. Ainsi, il s’apprend à la communauté internationale et rend celle-là responsable de l’insécurité du monde. Le Tribunal Pénal Internationale (TPI) et la Cour Pénale Internationale (CPI) n’échappent pas également aux critiques de Me Marcel Ceccaldi qui, par ailleurs, invite l’Union africaine créée une chambre criminelle ad hoc ou permanente ce qui permettra de mettre fin à cette comédie judiciaire que représente la Cour pénale internationale. «Il faut rétablir l’ordre et la sécurité en Libye sinon le nord du Mali ne sera jamais stable, sinon le risque de contagion risque d’atteindre d’autre pays. On a vu au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire, le Sénégal même est menacé tout comme le nord de la Guinée», pense l’avocat.

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 Me, nous avons appris, depuis quelques jours, via les médias internationaux, la libération de Seif El Islam Kadhafi qui remonterait déjà en avril dernier. Comment se fait-il qu’une information si capitale ait été jusque-là tenue secrète ?

Ce n’est pas une information qui a été dissimulée, c’est le Parlement de Tobrouk, le seul reconnu par la communauté internationale qui a voté au mois d’avril une loi amnistie qui est entrée en application le 27 juin, il n’ya rien d’extraordinaire à cela, dans la mesure où le parlement de Tobrouk a usé de ses prérogatives. Chaque Assemblée nationale, chaque parlement d’un Etat qu’il soit est qu’à même de promulguer une loi d’amnistie.

En tant qu’avocat de Seif El Islam Kadhafi, pouvez-vous nous dire comment cette libération est intervenue ?

Ce qui est important, ce qu’il n’ya une pièce de justice sur le territoire libyen qui soit applicable à Saïd El Islam Kaddafi. Reste en l’Etat la Cour pénale internationale, mais nous allons revenir au rôle que joue la cour pénale internationale. A supposé que cette juridiction soit une véritable juridiction de jugement et non pas une juridiction d’exception comme elle est.

Après cette libération, Saïf Al-Islam restera-t-il poursuivi  par le Tribunal Pénal International (TPI) qui souhaite, depuis 2014, son extradition  à la Haye afin de le juger pour «crimes contre l’humanité», ce que la justice libyenne avait refusé d’accorder, affirmant qu’elle était juridiquement compétente pour juger cette affaire emblématique.

Votre question est intéressante, parce qu’elle pose   le rôle de la Cour pénale internationale, je vous rappelle que tout d’abord un premier mandat avait été délibéré par le bureau de la Cour pénale internationale en 2011 qui était à l’époque M Morano Campo, vous savez ce procureur de la Cour pénale internationale, danseur de Tango argentin,  avait délivré un mandat d’arrêt contre Mohammar Kaddaffi,  Saïl El Islam aussi et Abdel Senoussi. Ensuite la justice libyenne avait été saisie du cas Abdala Senoussi et de Saïf El Islam, la justice libyenne considérait qu’elle avait la volonté qu’’elle était apte à juger Saïf El Islam, comme elle est apte à le faire avec Abdalah Senoussi. Je vous rappelle que pour les mêmes faits et s’agissant de la même procédure, la Cour pénale a décidé que la justice libyenne était apte à juger Abdalah Senoussi par contre, elle a estimé que Saif El Islam devait lui être transféré, il faut avouer que  c’est une curieuse procédure celle-ci. C’est une procédure d’exception parce que la cour pénale internationale n’est pas une cour de justice, c’est une juridiction d’exception.

D’aucuns disent que la libération de Saïf El islam est une libération de fait, qu’il serait en résidence surveillée quand n’est-il?

Je vais revenir d’abord sur la Cour pénale internationale, je vous rappelle que Mme Fatou Bensouda, actuelle Procureur de la Cour pénale internationale, ancienne ministre de la justice de la Gambie. Je ne dirais rien sur le fonctionnement de la justice dans ce pays, Mme Bensouda s’est réveillée au mois de mai 2016, le 25 mai 2016 exactement, elle s’est souvenu que Saïf El Islam existait, elle  s’en est souvenue devant le Conseil de sécurité, c’est en réalité une réponse à la loi d’amnistie votée par le parlement de Tobrouk, le 27 avril. Mais je vous rappelle ce qui est le plus important, c’est lorsque le mandat d’arrêt a été délivré contre Saïf El islam. Pour quelle raison ce mandat d’arrêt a été délivré ? quand vous preniez les conditions de la mise en œuvre de la poursuite de la cour pénale internationale en vertu de ces déclarations incendiaires. En réalité au moment des événements, il faut reprendre la chronologie des faits, les premières grèves éclatent le 15 janvier, on était à l’époque dans un mouvement de contestation sociale  traditionnelle des mesures  ont été  prises à l’époque  par le gouvernement notamment la baisse des prix des produits d’importations, une aide supplémentaire de 250 euro a été attribué aux libyens, à partir du 15 février on passe d’un mouvement de contestation sociale en  rébellion armée. C’est le 15 février qu’un kamikaze s’explose dans une caserne de Bengazi ce qui permet aux rebelles de cerner. Le 16 février, Mohammar Kaddafi dans un geste de bonne volonté libère 110 prisonniers islamistes qui vont bien entendus tout de suite basculer dans la rébellion. Le 17 février Bengahzi tombe aux mains des rebelles. Les partisans de Kadaffi sont pourchassés, lynchés, égorgés dans des conditions abominables et atroces. Dans une déclaration à la télévision Saïf El Islam appelle au calme. Que si le calme ne revennait pas des rivières de sang vont se déverser sur la Libye. Les faits lui ont donné raison. Mais on s’interroge qui a manipulé cette déclaration, c’est la chaine qatarie El Jazeera. Il ya un véritable bidadage de cette déclaration, le même bidadage qui a conduit à la première guerre du Golf. A l’poque, la fille de l’ambassadeur du Koweit se présentant lors d’une conférence de presse comme une infirmière venant annoncer que les soldats irakiens avaient tué des bébés prématurés dans une  clinique. Le même bidonage souvenez-vous concernant les armes de destruction massive détenu par Saddam Hussein. Nous sommes dans le cadre d’une véritable manipulation de l’opinion qui permet aux grandes puissances d’intervenir.

Plus concrètement, il est en liberté ou en résidence surveillée ?

D’abord, il faut se préoccuper de sa sécurité, vous connaissez la situation en Libye qui depuis l’intervention de l’Otan est plongé dans le chaos. Donc la première règle, s’est préservé sa sécurité.

 D’autres membres de la famille Kadhafi sont-ils toujours en détention ? Si oui, peut-on espérer qu’ils bénéficient eux-aussi de mesures d’élargissement par les milices qui les détiennent ?

Ce volet est compliqué, parce que vous avez Saïdi Kaddafi qui et le frère Saïf El Islam, je vous rappelle que la famille de Kaddafi a été décimée au cours de cette guerre. Puisque un fils de kaddafi a vu sa maison bombardée par un drone par les troupes de l’OTAN, c’était un bombardement ciblé pour le tué. Cet acte est un homicide passible de la Cour pénale internationale. Parce qu’il est mort avec ses trois enfants mineurs. Vous avez Kamiss, un jeune officier qui est tombé pendant qu’il était à la tête de ses troupes.  Vous avez Motadem Kadaffi, qui a été tué au moment où il a été arrêté avec son père par les milices de Misrata. La décision concernant Saïdi kaddafi  dépend de Tripoli et non pas de Tobrouk. Ce que je peux vous dire, c’est que Tripoli a décidé de libérer six personnes qui avaient fait l’objet de procès dans le cadre de la procédure engagée contre Saïf El islam, alors on peut espérer pour les autres accusés bénéficient les mêmes avantages  très bientôt.

 Certains pensent que cette libération procède de la volonté du gouvernement d’union nationale d’aller vers une réconciliation nationale ?

Ecouter, si tel est le cas je m’en félicite. Car je retiens d’abord que cette libération est d’abord une décision du parlement de Tobrouk. Vous avez vu les conséquences de l’intervention de l’Otan, l’Afrique est en première ligne. L’Afrique paye aujourd’hui les conséquences de cette intervention et en particulier le Mali, la situation au nord du Mali  est la conséquence directe de cette intervention, les soldats maliens, les gendarmes maliens qui tombent sont les victimes de l’intervention de l’Otan en Libye, il faut le dire, il faut le répéter. Bien, depuis l’intervention de l’Otan, deux millions de Libyens sur une population de six millions d’habitants  ont quitté ce pays. Vous ne  pouvez pas  bâtir un gouvernement d’union nationale, ou d’entente nationale, qu’à condition que tous les courants de la société libyenne soient représentée et personne ne niera que Saïf El Islam représente un de ses courants.

 Alors cette libération n’est –elle pas une mauvaise nouvelle pour la droite française dont le chef file actuel Nicolas Sarkozy aurait été abondamment  financé par les Kaddafis.

Ecouter c’est une mauvaise nouvelle pour l’ensemble de la classe politique parce que je vous rappelle que l’intervention de la France, de l’Otan en Libye a été aussi appuyée et saluée par le parti socialiste dont François Hollande en sa qualité de Premier secrétaire, c’était l’unanimité. C’est la classe politique dans son ensemble qui est responsable de cette situation. Mais maintenant, il joue aux pompiers pyromanes, on a mis le feu, on essaye déteindre l’incendie et le meilleur moyen déteindre l’incendie, c’est d’abord de reconnaitre ces fautes.

 Me Vous pensez que votre client peut toujours un rôle de premier plan dans la vie politique de son pays ?

 D’abord il a beaucoup muri des épreuves de sa détention, qui lui a permis de faire des  étapes de réflexions, une introspection sur lui-même et sur els événements. Il représente un courant important de la société libyenne, c’est clair. Je vous rappelle que le Conseil représentatif des tributs libyennes avaient demandé dès le mois de janvier 2016 sa libération. Et vous savez quelle est l’importance des tributs en Libye. A partir du moment où il retrouve sa liberté de mouvement, de parole, je suis convaincu c’est un élément important quant à la restauration d’une paix durable dans ce pays.

La libération du fils de Kaddafi n’est pas exempt d’arrière-pensée de la part du gouvernement d’union nationale qui serait intéressé à trouver les traces de la fortune de l’ancien Reich, des fortunes que certains estiment  colossales. Qu’en est-il ?

 L’affaire libyenne, c’est le hold up du siècle, parce que vous avez dans les banques des Etats membres de la coalition les réserves d’or, des devises qui appartiennent à la Libye. Je vous donne un exemple, depuis 2011, la banque de France a de l’or libyen, la banque de France a des comptes en devise libyenne, ce qui permet à la  France d’emprunter au jour le jour sur le marché financier. Mais il en est ainsi à Londres, à Genève, Berlin, Vienne. C’est le hold-up du siècle. Quant au reste, il y a eu un comité  des Nations Unies, ce comité n’a pas produit de rapport, sinon, il allait mettre au grand jour le montant exact des sommes que les nations occidentales  membres de la coalition armée se sont appropriées en Libye.

Comment vous voyez l’avenir de la Libye dont une grande partie du territoire est sous le contrôle de l’Etat islamique ?

 La situation  est loin  d’être rétablie. On vous parle de Syrte. Mais il y a bien longtemps que Daech a quitté Syrte. Il avait préparé cette offensive menée par les milices de de Misrata  qui sont le bras armé des frères musulmans, financés par le Qatar. C’est-à-dire ma main gauche ignore, ce que ma main droite fait. Ils ont déjà essaimé en Libye, vous avez vu les attaques en répétition  en Tunisie, le borgne qui sévit au nord du Mali, il circule librement entre le sud libyen et  Tripoli. Au mois de décembre dernier on savait qu’il était en Tripoli. Vous voyez que les  Nations de l’Otan sont très gênés, car si vous décidé de mette en ordre les choses, de donner les moyens aux forces démocratiques libyennes qui peuvent être représenté par plusieurs courants, il s’agit du général Aftar, le courant de Saïf El Islam et d’autres courants, vous devez  admettre que votre intervention armée est la conséquence de cette situation. Il faut rétablir l’ordre et la sécurité en Libye sinon le nord du Mali ne sera jamais stable, sinon le risque de contagion risque d’atteindre d’autres pays. On a vu au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire, le Sénégal même est menacé tout comme  le nord de la Guinée.

Que pensez de la CPI ?

 Je voudrais, concernant la cour Pénale internationale, qu’on mette fin à cette imposture, je vous rappelle qu’elle a été saisie par le Conseil de sécurité au titre du chapitre 7, le conseil de sécurité a le pouvoir de lui demandé de suspendre son enquête et la procédure. Quand vous constater de telles dérives de la part de la Cour pénale internationale, vous constatez d’ailleurs qu’elle ne poursuit que des responsables des faits commis sur le continent africain personne d’autres. Il faut mettre un terme  à cette situation. La Libye est membre de l’union africaine, que l’Union africaine créée une cour criminelle compétente cela montrera que les Etats africains ont la volonté et l’aptitude de juger les crimes et délits commis sur le territoire de l’union africaine. Avec le procès Hussein Habré l’Afrique a montré ses capacités à juger. Il faut que l’Union africaine créée une chambre criminelle ad hoc ou permanente ce qui permettra de mettre fin à cette comédie judiciaire que représente la Cour pénale internationale.

Source : Les Echos du 14 juillet 2016/

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