De notre correspondante à Bamako,
La tension est montée d’un cran ces derniers jours dans la capitale. Ce vendredi, comme le 5 juin, plusieurs dizaines de milliers de manifestants ont répondu à l’appel du M5, ce mouvement qui rassemble politique religieux et société civile. Sur la place de l’indépendance, à la tribune, se sont enchainés aujourd’hui des chants, notamment l’hymne national et des prières. Autour du monument de l’indépendance, on entendait les Bamakois scander « IBK dégage », le principal slogan de la rue depuis début juin.
Alors aujourd’hui, même si tous insistent sur le caractère pacifique de leur action, cette fois-ci, le mouvement de contestation a envoyé des émissaires à Koulouba pour aller chercher la lettre de démission du président. Mais ils n’ont pas pu acheminer cette lettre, bloqués par les forces de l’ordre. Dans la déclaration finale du M5 ce vendredi, Cheick Oumar Sissoko, l’un des leaders prévenait : si les revendications ne sont pas entendues, « le peuple exercera son droit à la désobéissance civile ». « Nous serons non violents. Mais nous allons nous battre jusqu’à la satisfaction de notre demande », a conclu vendredi l’influent imam Mahmoud Dicko, l’un des leaders sinon le leader du M5.
La pression maintenue
Le M5 maintient donc la pression avec cette mobilisation de la rue et renouvelle sa principale revendication : la démission du chef de l’Etat. C’est la principale revendication et de cette revendication découle finalement toutes les autres, selon les manifestants. Certains parlent de dissolution de la nouvelle Assemblée nationale, contestée depuis les élections législatives fin mars début avril ou de dissolution de la Cour constitutionnelle, responsable selon les manifestants des fraudes électorales. Mais pour l’heure, tous se concentrent et réclament la démission du chef de l’État car « cela fait sept ans que IBK a été élu et que tout va de mal en pis », déclarait un manifestant ce vendredi.
L’imam Oumarou Diarra, cadres de la CMAS, le mouvement des amis de l’imam Dicko, rappelle que le mouvement se veut pacifique mais déterminé.
Côté majorité, on reste stoïque. En fin de semaine, le président de l’Assemblée nationale, Moussa Timbiné, a tout de même mis en garde contre une déstabilisation des institutions. « De fil en aiguille c’est le Mali qui sera complètement occupé par des jihadistes. Beaucoup de ceux qui marchent sont avec les jihadistes », a-t-il déclaré en séance plénière jeudi.
Multiplication des appels au dialogue
La majorité présidentielle qui a été reçu aussi par des personnalités ou institutions qui ont tenté des médiations pour apaiser et résoudre la crise politiques et sociale.
Car tout au long de cette semaine, les appels au dialogue se sont multipliés, sans succès. C’est d’abord le chef de l’État qui a appelé au dialogue dimanche dernier dans une allocution à la nation. Puis, mardi, au centre des congrès. IBK y a ajouté une proposition : celle de former un gouvernement d’union nationale. Une proposition tout de suite rejetée par le M5 qui ne s’est pas déplacé d’ailleurs pour entendre les propositions du chef de l’État.
Puis jeudi, c’est la Cédéao qui a tenté une médiation. Trois ministres des Affaires étrangères, le Nigérien, le Nigérian et l’Ivoirien ainsi que le président de la commission ont rencontré tous les acteurs de la crise. L’organisation africaine n’a cependant pas obtenu le report du rassemblement d’aujourd’hui.
« La mission note que l’arrêt de la Cour constitutionnelle dans le cadre du contentieux des dernières élections législatives est à la base de la crispation socio-politique actuelle. Elle invite donc le gouvernement de la Répiblique du Mali à reconsidérer les résultats de toutes les circonscriptions ayant fait l’objet de révisions par l’arrêt de la Cour. De nouvelles élections partielles pour les circonscriptions concernées devraient être organisées dans les meilleurs délais. En outre, la mission insiste sur la nécessité d’oeuvrer pour le rétablissement d’oeuvrer pour le rétablissement d’un climat de confiance renouvelée entre les parties maliennes, éviter la violence, mettre en place un gouvernement consensuel d’union nationale tenant compte des recommandations du dialogue national inclusif, accéler la mise en oeuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger », a déclaré Jean Claude Brou, président de la Cédéao.
Finalement, les appels au dialogue lancé depuis la semaine dernière par IBK n’ont pas reçu de réponse favorable. « Il y a déjà eu des dialogues par le passé mais aujourd’hui, il y a une crise de confiance », rappelait jeudi à la sortie de la réunion avec la Cédéao l’ancien ministre Choguel Maiga, l’un des leaders politiques du M5.
Source: Rfi.fr