Les violences jihadistes ont fait des dizaines de morts civils au cours des dernières semaines dans le centre-est du Mali et la région dite des trois frontières, a indiqué jeudi dans un communiqué la mission de l’ONU (Minusma) dans le pays.
Cette vaste étendue est le théâtre depuis des semaines de violences et d’affrontements entre bon nombre des organisations armées (régulières et irrégulières) présentes sur le terrain, y compris entre groupes affiliés à Al-Qaïda et à l’organisation Etat islamique. Les jihadistes sont accusés de s’en prendre aux civils qu’ils soupçonnent de collaborer avec leurs ennemis ou de les renseigner. “La situation sécuritaire dans la zone dite des trois frontières entre le Mali, le Niger et le Burkina Faso, notamment dans les localités de Tessit, Talataye, Ansongo et la région de Ménaka, s’est considérablement dégradée au cours des dernières semaines”, a rapporté la Minusma dans un communiqué où elle exprime “sa vive préoccupation”. “Les attaques des groupes armés terroristes ont eu un impact dévastateur sur la population civile, déjà en détresse, entraînant des dizaines de morts et des déplacements importants de populations vers les villes de Gao et d’Ansongo”, ajoute-t-elle. La Minusma dit avoir “déployé une unité dans la zone depuis plus d’une semaine” et une autre unité était “en cours de déploiement jeudi”. Selon un texte du journal an-Naba du groupe Etat islamique, authentifié par l’organisme spécialisé américain SITE, les jihadistes de la “province du Sahel” nouvellement proclamée ont mené une série d’attaques contre les combattants du Mouvement pour le salut de l’Azawad (MSA), issu de l’ex-rébellion principalement touareg, et tué environ 250 d’entre eux autour de Ménaka entre le 9 et 11 mars. Les jihadistes disent s’être emparés de trois de leurs bastions, Tamalat, Inchinane et Anderamboukane. A Gao, ils disent avoir attaqué une base de l’armée malienne “tuant et blessant des dizaines” de soldats. Parallèlement, des ONG et d’ex-rebelles incriminent les forces armées maliennes (FAMa) pour des exactions présumées. Mardi, la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), qui rassemble des groupes touareg et nationalistes arabes entrés en rébellion contre le pouvoir en 2012, a déploré “des arrestations arbitraires suivies d’exécutions extrajudiciaires” qui auraient été commises le 26 mars contre les civils à Ansongo “par des éléments des FAMa”. La CMA citait nommément 17 civils qui avaient trouvé refuge à Ansongo pour se protéger d’attaques de l’organisation Etat islamique. Interrogées sur ces accusations, les autorités maliennes dominées par les militaires depuis le coup d’Etat d’août 2020 n’avaient pas répondu jeudi soir. Elles réfutent généralement ces mises en cause ou disent avoir ouvert des enquêtes. Le 15 mars, Human Rights Watch (HRW) avait dénoncé dans un rapport une “nouvelle vague d’exécutions de civils” ainsi que des pillages par l’armée malienne et les jihadistes dans le centre et le sud-ouest du Mali. Selon différents rapports publiés par la Minusma, dont le plus récent la semaine dernière, près de 600 civils ont été tués au Mali en 2021 dans des violences imputées principalement aux groupes jihadistes, mais aussi aux milices d’autodéfense et aux forces armées. Le Mali est plongé dans la tourmente depuis 2012. La propagation jihadiste, partie du nord, s’est étendue au centre et au Burkina Faso et au Niger voisins.
AFP