les principaux leaders de l’opposition ivoirienne convoqués ce matin par le ministre de l’Intérieur, alors qu’Emmanuel Macron est attendu aujourd’hui à Abidjan. L’information est à la Une des quotidiens indépendants ivoiriens L’Inter et Soir Info, mais aussi à celle du journal Le Temps, proche de l’ex-président Laurent Gbagbo.
« Guikahué et Assoa Adou convoqués », lancent en chœur ces trois journaux, le troisième cité ajoutant que le régime est « apeuré face au FPI et au PDCI », avant d’affirmer que « Port-Bouët est prêt à relever le défi ».
Port-Bouët ? C’est cette commune de l’agglomération d’Abidjan où perche notamment la base militaire française et où ladite opposition compte bien, demain, tenir un nouveau giga-meeting commun FPI-PDCI.
Justement. « Le giga-meeting (…) est maintenu » demain, place Seyni Fofana, martèle en Une, Le Nouveau Réveil, quotidien proche du PDCI de l’ex-président ivoirien Henri Aimé Konan Bédié.
Que va-t-il, dès lors, se passer ? « Macron mettra-t-il sur la table les questions qui fâchent, comme celle du troisième mandat que son hôte aurait l’intention de briguer ? », se demande, au Bukina Faso voisin, le journal Wakat Sera.
« En attendant d’en savoir plus, hasard du calendrier ou pas, le retour du fils prodigue, Guillaume Soro, annoncé pour le 22, a été reporté au 23 décembre, lendemain du départ de Emmanuel Macron », pointe ce quotidien ouagalais.
En France aussi, cette visite est longuement analysée par la presse. Si, en toile de fond de cette visite présidentielle, la volonté d’aller « de l’avant » est volontiers affichée, le journal Le Figaro se demande si elle peut « dépasser les simples mots ».
Évoquant l’élection présidentielle prévue l’an prochain en Côte d’Ivoire, un « diplomate » évoque dans ce quotidien « la perspective de plus en plus probable » de la candidature de Laurent Gbagbo, Henri Konan Bédié et Alassane Ouattara, à ce scrutin – comme en 2010.
Et, dans Le Figaro, Adama Bictogo, proche du président Ouattara, dit que « quoi qu’il arrive, Gbagbo aura une grande influence. Son acquittement le fait passer pour un martyr et l’a remis en selle. »
Emmanuel Macron à Abidjan, c’est le « père Noël en kaki », formule Libération, qui dénonce « l’affichage » du président Macron au côté d’un « chef d’État contesté », ce qui sur place est interprété comme « le choix de la France » pour la prochaine élection présidentielle.
D’autant qu’en se rendant à Bouaké, fief de « la rébellion qui a porté Ouattara au pouvoir il y a près de dix ans », énonce en toutes lettres Libé, Emmanuel Macron « ravive les clivages sur l’interprétation controversée » du bombardement du lycée Descartes en novembre 2004.
Dans Libé, le politiste Frank Hermann Ekra pointe ce qu’il estime être un « gouffre abyssal » entre la « réalité » et la « vitrine » de ce voyage de Noël.
Du reste, pour ce journal français, le choix d’Abidjan effectué par Emmanuel Macron pour réveillonner avec les troupes françaises positionnées en Afrique est « finalement assez inattendu et peut-être ambigu. Car si ce Noël aux côtés des militaires en Afrique semblait justifié cette année, c’est d’abord en raison de l’accélération inquiétante de la déstabilisation du Sahel ».
Dès lors, estime Libé, « on aurait pu s’attendre à ce que le président se rende à Gao (au Mali). Ou bien à Niamey (au Niger) », où Emmanuel Macron ne fera qu’un « passage rapide » dimanche.
« Loin de ces zones inflammables, le président français a donc préféré la moiteur de la lagune aux mirages du désert. A-t-il seulement conscience que d’autres “mirages” l’y attendent ? », interroge Libération.
Lequel quotidien publie également tout à la fois un éclairage sur la francophobie qui se manifeste au Mali, mais aussi un reportage au Burkina Faso :
Au Mali, où Barkhane, aujourd’hui, est certes une opération militaire sachant se défendre « contre les jihadistes », mais dont il n’est « pas sûr » qu’elle « remporte le combat » contres les « attaques politiques et médiatiques » qui se multiplient dans ce pays sahélien.
Au Burkina Faso, qui est confronté à la « pire crise de son histoire » et où la « grogne » dans l’armée nationale ne se dément pas, du fait de « l’abandon des troupes envoyées sur le terrain », mais aussi en raison du recours à des civils armés pour maintenir l’ordre, relève Libé.
Journal selon lequel « cette année, cinq sites militaires auraient été désertés après des attaques » jihadistes.
RFI